| La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) | |
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Auteur | Message |
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ZEN Rang: Administrateur

Nombre de messages : 57513 Date d'inscription : 05/05/2005
 | Sujet: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Sam 13 Oct - 17:06 | |
| Vous n'avez pas demandé à lire une histoire triste mais je vous conte celle-ci qui est 100% authentique hélas.
Appelons la Catherine. Catherine est née au milieu des années 40 dans une famille modeste où pour devenir quelqu'un il faut choisir entre le métier d'infirmière et celui d'institutrice. Catherine a 24 ans quand elle se retrouve devant sa première classe de bambins de cours préparatoire. Dans ses préoccupations premières, l'apprentissage de la lecture et des chiffres bien sur et puis celui de l'heure. Catherine fait la rencontre d'un menuisier en février 1966 chez une amie institutrice comme elle. Elle l'épouse, un samedi de mars 1971. Un homme gentil qui pour ses bambins construit une immense pendules avec un engrenage qui entraine l'aiguille des minutes quand on tourne celle de l'heure. Le système est débrayable car Catherine veut pouvoir demander à ses élèves de montrer n'importe quelle heure. C'est ingénieux et sans prétention sinon celle d'être une incitation à apprendre. 19 ans durant la pendule permet inlassablement de donner envie aux enfants de connaître l'heure et Catherine parvient fort bien dans ce domaine comme d'ailleurs elle a le don d'enseigner la lecture et le calcul. Le 28 septembre 1990, le mari de Catherine est pris de terribles douleurs dans le ventre, les pompiers se déplacent pour l'emmener à l'hopital. Il ne connaîtra pas l'année 1991. Catherine se retrouve seule. Elle adore les enfants et malgré un traitement adapté, la nature n'a pas voulu lui donner le plaisir d'être mère. L'adoption, elle en parlait avec son mari mais d'un seul coup, l'appartement est vide, vide comme ses forces, vide comme son envie de vivre, vide comme ses pensées. Catherine ne surmonte pas cette disparition. Chaque seconde de sa vie lui fait penser à son mari et lorsqu'elle dort, elle est avec lui dans chacun de ses rêves. Des encouragements, Catherine en reçoit plus que de raison, mais rien ni personne ne semble capable de l'aider. Catherine perd sa mère, dernier membre de sa famille directe un an plus tard. Le pot de fin d'année de l'école va donner à Catherine une mauvaise occasion de penser à autre chose. L'un de ses collègues la fait boire et s'amuse de la voir rire après les mois sinistres de ses conversations lors des récréations. On se quitte ce soir de juin en lui disant qu'elle semble aller mieux et une petite tape sur l'épaule achève de l'enfermer dans sa solitude et de se donner bonne conscience. Catherine va devoir affronter deux mois de plein silence, deux mois d'extrême isolement, deux mois qu'elle appréhende mais elle a elle-même l'impression d'aller un peu mieux parce que ce qu'elle a bu lui a fait tourner la tête autant que l'air vivifiant qu'elle respirait quand des heures durant, elle allait se promener dans les collines. Dès le début des vacances, Catherine décompte le nombre de jours avant la rentrée scolaire, elle égraine le temps et coche sur son calendrier chaque jour qui passe. Ce bien être furtif de la soirée de fin d'année scolaire, Catherine a envie de le retrouver. Du coup, elle retourne dans cette cave qu'elle ignore depuis un an où son mari entreposait quelques bouteilles de bon vin et de champagne. Chaque jour de consommation devient pour Catherine un jour qui se déroule mieux que le précédent. Si au début un verre ou deux suffisent à l'ennivrement, c'est une bouteille complète qui est nécessaire à la fin des vacances. A la rentrée chacun se félicite du retour de Catherine à la normale car sa sinistrose était crainte par les parents pour leurs chères têtes blondes. Nul ne prête attention aux problèmes légers d'élocution de Catherine lorsqu'en début d'après midi, elle assure l'accueil des enfants. Par contre, les parents viennent protester quand elle décide de remonter au grenier de l'école la pendule en bois qu'elle ne peut plus voir sans avoir les yeux gagnés par les larmes. Catherine pour se justifier explique que l'engrenage est cassé. Et pour cause, elle l'a totalement démonté et caché dans son appartement. On recherchera dans toute l'école l'engrenage et le directeur ira même dans chaque classe demander en vain, aux élèves qu'il suspecte de cette disparition de restituer les pièces de bois.
L'année scolaire suivante devient difficile pour Catherine qui dès le matin ingurgite une dose d'alcool pour se motiver. Ses cours restent efficaces mais les parents se plaignent qu'elle fume pendant la récréation et que son haleine semble laisser s'évaporer des odeurs d'alcool. Vite, très vite, une pétition est adressée à l'inspection d'académie. Quand l'inspecteur se déplace Catherine gère sa classe normalement et rien , non rien ne permet la moindre sanction. L'école perd ses élèves lors de la rentré suivante " c'est lécole de l'institurice qui boit" et dans l'année, on lui retire sa classe avec des recommandations de soins. Catherine double la dose d'alcool pour oublier et puis un jour, il y a cette douleur au coeur qui la conduit à l'hopital. L'examen ne lui détecte pas d'anomalie du coeur et pourtant Catherine au delà d'un coeur immense, se souvient de chacun de ses élèves qui dans la rue viennent l'embrasser même lorsqu'ils sont devenus adultes. Non Catherine a un autre problème médical trop avancé pour y faire quoi que ce soit. Elle disparaît seule dans sa maison entre Noël et le jour de l'an.
Les héritiers viendront prendre les bijoux, et une socité de nettoyage est chargée de vider l'appartement. Dans la benne à encombrants, un ancien élève de l'école reconnait dans deux grosses roues en bois, l'engrenage de le pendule de l'école.
Cette pendule là est définitement arrêtée. _________________ Contraria contrariis curantur. (Les contraires se guérissent par les contraires).
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PIFPAF Membre référent

Nombre de messages : 5339 Age : 42 Localisation : parc de sceaux, avec les écureuils, dans le maquis... Date d'inscription : 24/04/2007
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Sam 13 Oct - 17:39 | |
| Un certains gout pour la mélancolie. Et les histoire triste. Etonnant de voir l'horlogerie à travers le prisme de l'inéxorable mort. Certes la vie n'est qu'un long compte à rebourd. Mais dans cette vie tu peux la remplir de plein de chose. C'est meme pour moi l'intérèt de porter une belle montre, se rappeler combien le temps est précieux. Or s'attarder sur l'inéductabilité du temps c'est le meilleur moyen de le perdre, ce temps... |
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Amator Membre super actif
Nombre de messages : 423 Date d'inscription : 05/08/2007
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Invité Invité
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Sam 13 Oct - 19:31 | |
| - @ZEN a écrit:
- ...
Catherine va devoir affronter deux mois de plein silence, deux mois d'extrême isolement, deux mois qu'elle appréhende mais elle a elle-même l'impression d'aller un peu mieux parce que ce qu'elle a bu lui a fait tourner la tête autant que l'air vivifiant qu'elle respirait quand des heures durant, elle allait se promener dans les collines. Dès le début des vacances, Catherine décompte le nombre de jours avant la rentrée scolaire, elle égraine le temps et coche sur son calendrier chaque jour qui passe. Ce bien être furtif de la soirée de fin d'année scolaire, Catherine a envie de le retrouver. Du coup, elle retourne dans cette cave qu'elle ignore depuis un an où son mari entreposait quelques bouteilles de bon vin et de champagne. Chaque jour de consommation devient pour Catherine un jour qui se déroule mieux que le précédent. Si au début un verre ou deux suffisent à l'ennivrement, c'est une bouteille complète qui est nécessaire à la fin des vacances... J'ai toujours pensé que les profs avaient trop de vacances. L'inactivité est la mère de tous les vices, la preuve... H3 Acadomia.com..... |
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km'rol Membre éminent.

Nombre de messages : 23532 Localisation : Socialie , pays enchanté de la spoliation légale Date d'inscription : 10/07/2007
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Sam 13 Oct - 20:41 | |
| très belle et triste histoire  |
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legrospascal Membre super actif
Nombre de messages : 439 Date d'inscription : 23/02/2007
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Sam 13 Oct - 20:44 | |
| en pleine forme Zen en ce moment.... si en plus la France perd, aie aie aie |
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Invité Invité
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alemmar Passionné de référence

Nombre de messages : 3129 Localisation : marseille Date d'inscription : 24/12/2006
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oscar75 Membre Hyper actif

Nombre de messages : 516 Date d'inscription : 11/06/2007
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Dim 14 Oct - 9:48 | |
| Belle et triste histoire. Bien narré. Merci d'avoir partagé.  |
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Guy 67 Modérateur

Nombre de messages : 15112 Localisation : Strasbourg Date d'inscription : 07/05/2005
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Dim 14 Oct - 9:59 | |
| _________________ La mode se démode, le style jamais. Membre AHA n°1 Amicalement Guy 67 |
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Lundi Animateur

Nombre de messages : 943 Date d'inscription : 22/01/2007
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Dim 14 Oct - 10:40 | |
| C'est beau, c'est triste, ça donne envie de boire, tiens ! Et ça me rappelle ce texte d'un grand poète : La pendule de l'entrée S'est arrêtée sur midi A ce moment très précis Où tu m'as dit: "Je vais partir" Et puis tu es partie J'ai cherché le repos J'ai vécu comme un robot Mais aucune autre n'est venue Remonter ma vie
Là où tu vas Tu entendras j'en suis sûr Dans d'autres voix qui rassurent Mes mots d'amour Tu te prendras Au jeu des passions qu'on jure Mais tu verras d'aventure Le grand amourJe sais plus si c'est Verlaine ou Baudelaire  |
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Invité Invité
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Dim 14 Oct - 10:59 | |
| c'est de Nicolas Skorsky. (désolé, un autre Nicolas avec un nom ressemblant!)
la suite: Ça s'en va et ça revient C'est fait de tout petits riens Ça se chante et ça se danse Et ça revient, ça se retient Comme une chanson populaire....
H3 claudette
Dernière édition par le Dim 14 Oct - 11:01, édité 1 fois |
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rolexor Animateur

Nombre de messages : 1003 Age : 49 Localisation : st malo Date d'inscription : 14/07/2007
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ZEN Rang: Administrateur

Nombre de messages : 57513 Date d'inscription : 05/05/2005
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Dim 14 Oct - 11:36 | |
| Une réflexion sur le temps qui passe n'est jamais si triste. c'est davantage l'attitude humaine qui parfois prête à être confondante. Pour la dépression, je vous rassure, pas mon genre  _________________ Contraria contrariis curantur. (Les contraires se guérissent par les contraires).
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loule Animateur Chevronné

Nombre de messages : 1439 Age : 70 Localisation : HAMMAMET (Tunisie), au pays du jasmin... Date d'inscription : 09/10/2007
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Dim 14 Oct - 11:59 | |
| Triste histoire qui reste belle néanmoins dans la démarche éducative  |
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oscar75 Membre Hyper actif

Nombre de messages : 516 Date d'inscription : 11/06/2007
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Dim 14 Oct - 13:45 | |
| Ben moi, pour rester dans les chansons populaires, çà me rapelle : Les vieux ne parlent plus ou alors seulement parfois du bout des yeux Même riches ils sont pauvres, ils n'ont plus d'illusions et n'ont qu'un coeur pour deux Chez eux ça sent le thym, le propre, la lavande et le verbe d'antan Que l'on vive à Paris on vit tous en province quand on vit trop longtemps Est-ce d'avoir trop ri que leur voix se lézarde quand ils parlent d'hier Et d'avoir trop pleuré que des larmes encore leur perlent aux paupières Et s'ils tremblent un peu est-ce de voir vieillir la pendule d'argent Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, qui dit: je vous attends
Les vieux ne rêvent plus, leurs livres s'ensommeillent, leurs pianos sont fermés Le petit chat est mort, le muscat du dimanche ne les fait plus chanter Les vieux ne bougent plus leurs gestes ont trop de rides leur monde est trop petit Du lit à la fenêtre, puis du lit au fauteuil et puis du lit au lit Et s'ils sortent encore bras dessus bras dessous tout habillés de raide C'est pour suivre au soleil l'enterrement d'un plus vieux, l'enterrement d'une plus laide Et le temps d'un sanglot, oublier toute une heure la pendule d'argent Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, et puis qui les attend
Les vieux ne meurent pas, ils s'endorment un jour et dorment trop longtemps Ils se tiennent la main, ils ont peur de se perdre et se perdent pourtant Et l'autre reste là, le meilleur ou le pire, le doux ou le sévère Cela n'importe pas, celui des deux qui reste se retrouve en enfer Vous le verrez peut-être, vous la verrez parfois en pluie et en chagrin Traverser le présent en s'excusant déjà de n'être pas plus loin Et fuir devant vous une dernière fois la pendule d'argent Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, qui leur dit: je t'attends Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non et puis qui nous attend.Je sais plus si c'est de Nicolas Skorsky, Claude François, ou René Char.  |
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PP3940 Puits de connaissances
Nombre de messages : 4383 Date d'inscription : 14/01/2007
 | Sujet: Re: La pendule de l'école ( Histoire vraie hélas) Dim 14 Oct - 15:13 | |
| On connait l'heure de notre naissance et pas celle de notre mort (et c'est tant mieux, il manquerait plus que ça!  ). |
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