Les horlogers canadiens
L'horlogerie canadienne est loin d'être négligeable d'abord à cause du nombre important d'horlogers qui s'exilèrent vers le Canada du 17ème siècle au début du 20ème siècle et parce que les pièces vendues sur place furent d'une très grande qualité qui motivait la présence d'excellents horlogers formés dans le berceau européen de l'horlogerie qu'étaient la Suisse, la France, l'Angleterre, l'Irlande et l'Ecosse.
Les montres canadiennes ne sont pas exclusivement des montres de chemins de fers avec au dos des élans ou des locomotives à vapeur. L'histoire de l'horlogerie canadienne est beaucoup plus ancienne et ancrée dans l'histoire du pays. La Nouvelle France qui englobait une grande partie du Canada actuel et en particulier la région de Québec était à partir du 16ème siècle un espace qui vit émigrer plusieurs horlogers tant de Franche Comté que de Grande-Bretagne, d'Ecosse et de Suisse vers cette nouvelle terre d'accueil. Cela suffit à expliquer que le Québec en particulier fut au 19ème siècle le terrain d'une grande tradition horlogère. Les migrations massives justifiaient l'idée d'un besoin de montres et d'heure.
De fait on retrouve de grandes dynasties d'horlogers qui de génération en génération vont traverser le 19ème siécle et entamer le 20ème en perpétuant des noms de familles que l'on retrouve plus de 100 ans plus tôt sur les cadrans.
James Orkney, un horloger écossais très réputé migra ainsi et s'installa dans la Côte de la Montagne en 1785 et y tint une boutique jusqu'en 1820. Epousant la fille de James Hanna un autre horloger émigré en provenance de Dublin, ils eurent un fils, James Godfrey Hanna qui lui-même devint un horloger très réputé qui s'installa lui aussi sur la côte de la Montagne au Québec.
La boutique d'Alfred Charles Routier au début du 20ème siècle (Photo propriété de Jean-Marie Lebel - Historien canadien Parmi les noms les plus significatifs, celui de Charles Routier peut être retenu comme le représentant d'une grande dynastie, celui des Ardouin de la rue Saint-Jean entre 1820 et 1860. Celui de William McMaster, originaire d'Ecosse, de 1827 à 1854. Thomas G. Cathro eut lui aussi une boutique rue Notre-Dame, à proximité de l'église Notre-Dame-des-Victoires de 1822 à 1844. William Baxter fut horloger lui aussi de 1835 à 1878 dans les rues Buade et Saint-Jean. On citera encore Jos l'Heureux et Caron à Montréal et un certain Emile Jacot rue saint Joseph, installé en 1862. Ce dernier se fournissait chez Wittnauer qui distribuait Longines.
Montre de Jos L'Heureux installé à Montreal avec un mouvement Omega "inversé" La plupart du temps, ces horlogers achetaient en Suisse leurs mouvements de montres ou d'horloges et les emboitaient grâce à des fabrications "locales". Sur le cadran, le nom de la marque pouvait aller jusqu'à être totalement éclipsé pour être remplacé par celui de l'horloger canadien. Le Canada proche de la grande Amérique bénéficia ainsi de mouvements suisses de belle qualité tels que les Express Leader et Express Monarch que Longines fabriquait spécifiquement pour le marché Nord Américain.
Montre d'Emile Jacot - Québec - Calibre Leader Express Longines 17 rubis 20 lignes. Certains fabricants se tournèrent comme ce fut le cas pour Alfred Charles Routier vers des ateliers anglais avant de devenir revendeurs de montres Omega, Movado, Vacheron & Constantin ou Patek Philippe. Routier parvint à devenir l'un des horlogers les plus fournis en pièces de haute qualité. Les Américains avant 1850 ne savaient pas réellement faire de bonnes montres en grande série et lorsqu'à partir de la seconde moitié du 19ème siècle, ils devinrent plus efficaces, le marché canadien fut exploré par les plus grandes marques américaines comme Elgin, Waltham ou Hamilton. Les grandes maisons suisses nouèrent alors des accords avec des distributeurs locaux auxquels elles livrèrent des mouvements à emboîter. Les assembleurs américains se fournirent de la fin du 19ème siècle jusqu'aux années 1930 auprès de fournisseurs de calibres suisses. Bulova, Gruen, Benrus et même Elgin sont parfois équipés de mouvements suisses. Omega étendit sa zone de diffusion ainsi sur tout le Canada. Millan à Vancouver livrait les compagnies de chemins de fer avec des montres équipées de calibres Omega.
Montre équipée d'un calibre Omega vendue par Millan à Vancouver. Le Canada après les années 30 affiche de moins en moins les noms des horlogers sur les cadrans mais essentiellement ceux des marques et normalise ainsi la distribution. L'expérience horlogère des Suisses avec le Canada n'est pour autant pas terminée puisque des grandes marques suisses dont Longines, Omega et Zenith livrent jusqu'à la fin des années 50 des mouvements pour la fabrication de montres pour les compagnies de chemins de fer canadiennes. La plus célèbre d'entre elles est sans doute la RR 56 de Zenith.
La RR 56 de Zenith fut livrée en 1956 et 1957 A lire : « Les Routier : une dynastie d’horlogers de Québec » http://www.erudit.org/culture/cd1035538/cd1044716/7668ac.pdf
https://sites.google.com/site/zenithistoric/