Il y avait cette montre que je venais d'acquérir, on le pouvait encore en février 2009. J'avais choisi la Milgauss avec le verre blanc car je croyais dur comme fer que le verre vert ne résisterait pas longtemps. J'étais content d'avoir cette montre au poignet dans cette rue de Honfleur où il flottait des cordes plus que de raison.
Dans une petite rue, la vitrine d'un confiseur pâtissier fixa mon regard. Il avait ces fruits confits faits maison qu'on ne trouve, en principe, qu'en Provence. Une fois dans la boutique, je craquais sur des pates d'amande, du chocolat et des fleurs , oui des fleurs enrobées de sucre… Un truc à tomber.
Alors qu'on se régalait de ces friandises, la vitrine d'un antiquaire me scotcha. Il y avait là une sculpture qui rappelait l'une des saisons de Mucha, j'étais incapable de trancher entre l'automne et l'été… L'artiste était un de ces sculpteurs du début du 20 ème siècle mais le thème était juste "art nouveau".
Je décidais d'acheter ce bronze qui pesait dans les 5 à 7 kilos. J'allais donc trainer ce sac à commission offert par le brocanteur et porter mes kilos de bronze tout le reste de la balade. C'est alors qu'une galerie d'art et de tableaux en particulier représentant la ville de New-York attira notre regard.
20 minutes plus tard, je tenais un tableau de 1 mètre x80 cm de la main encore disponible. Je transpirais dans ce Kway en nylon acheté en désespoir de cause au détour d'une rue, vous savez ces Kway avec des élastiques au poignet qui vous font ressembler à un zombi en couleur fluo. Le truc était vert pomme, le seul à ma taille. Comme j'avais déjà pris la pluie, j'avais emballé mon corps et mes vêtements mouillés dans un espace étanche. Non seulement j'avais froid, mais en plus je transpirais et les vêtements puaient le chien mouillé. La galère n'était pas au bout … L'anse du sac à commission craqua et il fallut porter par en dessous le sac avec le bronze. La voiture était loin, Honfleur n'aime pas les voitures et en nage, épuisé, avec le bras inerte, je touchais enfin la voiture. Je chargeais le coffre et tous ces efforts nous avaient donné faim. Nous repartîmes à la chasse d'une crêperie. Il fallut retraverser la moitié de la ville et passant devant la vitrine d'un autre antiquaire, c'est un stylo ancien Montblanc qui attira mon œil. Il me fut offert dans l'instant et la pluie s'intensifiant, nous constatâmes que l'étanchéité du KWay était toute relative. Nous abandonnâmes la couette pour une douche chaude.
Cette Milgauss est indéfectiblement associée à ce souvenir que j'avais sorti de ma mémoire et qui est remonté ce matin en passant cette Milgauss. La montre serait donc Proustienne ? Je n'en sais rien. Faut-il le savoir ?
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Contraria contrariis curantur. (Les contraires se guérissent par les contraires).