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| Sujet: Actu : Patrick Aebischer. l’EPFL cherche des mécènes Jeu Juil 17 2008, 12:44 | |
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- Patrick Aebischer. l’EPFL cherche des mécènes
Par Philippe Le Bé
Financement. Le président de l’EPFL souhaite attirer davantage de personnes privées pour soutenir la grande école.
L’ascenseur jaune qui conduit au bureau de Patrick Aebischer, président de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), ressemble à ceux qui sont en service dans les grands ensembles de la banlieue parisienne. Le ton est donné. La grande et prestigieuse école ne donne pas dans le luxe ostentatoire. Pourtant ses ambitions sont grandes. Et ne peuvent être réalisées qu’avec le concours toujours plus fort du secteur privé. Sans pour autant que la Confédération ne retire ses billes.
Quels sont les prochains projets de partenariat de l’EPFL? Cette année, nous prévoyons la création de dix nouvelles chaires. Jusqu’à présent, nos partenaires étaient surtout de grandes industries. Désormais, nous développons également le mécénat de particuliers qui s’engagent personnellement. A l’image de ce qui se pratique couramment aux Etats-Unis depuis des décennies.
Dans quels domaines d’activité? Il y a quelques années encore, les biotechnologies suscitaient le principal centre d’intérêt. Mais aujourd’hui, tous les secteurs d’activité du campus sont concernés: le développement durable, avec la chaire LODH, la finance avec Swissquote, l’ingénierie avec la fondation swissUp présidée par Daniel Borel, etc.
Le développement durable devient-il une priorité? Oui, bien sûr, comme les questions énergétiques et la santé. Les grands industriels réalisent qu’ils ne peuvent continuer à produire de la même manière. Le réchauffement climatique est devenu une réalité. Comme un campus tel que le nôtre couvre l’ensemble des technologies, le monde de l’industrie est toujours plus enclin à s’en rapprocher.
Avez-vous aussi un projet de nouvelle chaire avec Pierre Landolt, qui préside la Fondation de la famille Sandoz et avec lequel vous avez fondé l’an dernier la start-up Amazentis, spécialiste de produits thérapeutiques bioactifs? En l’occurrence, il ne s’agit pas d’une nouvelle chaire mais d’une manière de sensibiliser nos étudiants par des professeurs invités. C’est encore un peu tôt pour en parler. Cela dit, la Fondation de la famille Sandoz a déjà financé trois chaires à l’EPFL. Concernant le développement durable, Pierre Landolt est un pionnier, car cela fait plus de trente ans qu’il travaille sur le sujet, et ce, par la pratique.
Créer un fonds de développement qui ne serait pas affecté à un projet en particulier, cette idée qui vous est chère fait-elle son chemin? C’est un rêve de président! Avec ses 6500 étudiants, l’école se développe sans cesse, le périmètre des technologies s’élargit. L’Etat n’a pas les reins financiers assez solides pour accompagner une telle croissance. Début juillet, la Confédération nous a annoncé un nouveau frein à l’endettement en 2009. D’une augmentation de 3,7% promise et jurée, nous sommes passés à une hausse de seulement 2,7%. A ce rythme, nous ne couvrirons bientôt plus l’inflation. Aller chercher des moyens supplémentaires est pour nous une nécessité absolue.
Les universités américaines sont apparemment mieux loties. Un modèle à suivre? Harvard dispose en effet d’un fonds de 38 milliards de dollars. Avec un retour sur investissement moyen de 15% sur une telle somme au cours des dix dernières années, il y a de quoi se sentir à l’aise! De son côté, l’EPFL fonctionne avec une contribution fédérale soumise à un stop & go erratique. D’un montant de 488 millions cette année, elle représente les trois quarts de ses revenus. Quant aux 157 millions de fonds provenant de tiers, ils concernent des projets de recherche précis sans prise en compte des coûts indirects. Dès lors, plus le projet d’un professeur connaît un succès, plus cela pose de problèmes financiers. Car les coûts indirects ne suivent pas. Enfin, l’écolage n’atteint qu’un pour cent de nos recettes. Dans ces circonstances, plus que jamais, un fonds de développement sans affectation précise serait bienvenu.
Ne faut-il pas craindre une mainmise de l’industrie sur la recherche? Certainement pas. D’une part, sur les 157 millions de fonds de tiers récoltés en 2007, l’industrie ne représente que 40 millions. La partie purement industrielle demeure donc modeste. Ce constat vaut également pour les Etats-Unis. Au Massachusetts Institute of Technology (MIT), réputé pour sa très grande ouverture vers le secteur privé, les fonds industriels n’excèdent pas 20% des recettes. D’autre part, l’EPFL garantit à ses professeurs une liberté académique totale.
Tout de même, les entreprises n’orientent-elles pas la recherche? Certes, il va de soi que l’offre de biotechnologie augmente quand Merck Serono et Nestlé financent cinq chaires dans ce domaine. Mais aucune de ces sociétés ne nous dicte ce que nous devons faire. Par ailleurs, nos doctorants doivent pouvoir publier le résultat de leur recherche sans la moindre contrainte. C’est une condition sine qua non de partenariat.
Il n’empêche que Merck Serono, pour ne prendre qu’un exemple, a bel et bien financé une recherche ciblée de trois millions, en plus des trois chaires offertes… C’est un excellent exemple. Avec Merck Serono, il y a d’une part un fonds pour les chaires qui disposent d’une liberté académique totale et d’autre part un fonds supplémentaire pour des projets de recherche spécifiques en relation avec cette société. Les deux fonds sont totalement séparés. Le second est d’ailleurs ouvert à toute la communauté de chercheurs de l’EPFL. L’argent destiné aux chaires n’est pas versé directement aux laboratoires : il va dans un fonds global qui gère les donations et c’est l’école qui finance ses chaires. Cela évite ainsi un lien direct.
Sans mécénat, le projet de la grande bibliothèque Rolex Learning Center était impossible? Sans aucun doute. Le Rolex Learning Center, cette grande bibliothèque en construction à l’architecture singulière et très belle, est le fruit d’un partenariat secteur privé-Confédération. Le mécénat couvre la moitié de son financement évalué à 100 millions de francs. Après que Daniel Borel eut financé le concours d’architecture, Rolex a immédiatement été séduite, suivie par Novartis, Credit Suisse, Logitech, Nestlé, Losinger et Sicpa. Idéalement, chaque building devrait avoir son sponsor!
Economiesuisse demande un relèvement des taxes d’études entre 2000 et 5000 francs par an. Qu’en pensez-vous? L’argent ne doit jamais être un facteur déterminant dans la poursuite des études. Mais je ne pense pas que l’écolage à zéro franc soit une bonne solution. Je constate par ailleurs qu’il est très difficile de suivre une formation scientifique tout en exerçant parallèlement une activité rémunérée. Que faire pour les étudiants aux conditions modestes et dont le nombre diminue au fil des ans à l’EPFL? Je suis favorable à un doublement de l’écolage pour autant que le montant récolté serve à les aider, par l’octroi de bourses, et non à financer l’école. Par ailleurs, je trouve injuste que des personnes financièrement défavorisées subventionnent des non résidents qui ne paient pas leurs impôts en Suisse. Et à qui on demande, de surcroît, de quitter le pays une fois leurs études terminées. L’écolage de ces non résidents doit donc être adapté.
Dans quel délai? Les associations d’étudiants sont ouvertes à cette réforme. Celle-ci devrait aboutir dans les deux ans à venir, après concertation de toutes les parties intéressées. http://www.hebdo.ch/Edition/2008-29/Actuels/suisse/patrick_aebischer_cherche_des_mecenes.htm _________________ Contraria contrariis curantur. (Les contraires se guérissent par les contraires).
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