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| Sujet: Actu : La guerre des montres: un feuilleton américain Mar 12 Aoû 2008 - 7:33 | |
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- La guerre des montres: un feuilleton américain
Par Dominique Dirlewanger
Lutte. En 1947, la Suisse n’aime pas assez le libre-échange pour adhérer au GATT, le haut lieu du commerce mondial. Mais Washington l’y forcera. L'essentiel en 3 points • En 1947, les autorités fédérales et le patronat suisse hésitent à adhérer au GATT, moteur de la libéralisation du commerce international. • Les Etats-Unis déclenchent une guerre commerciale contre les montres suisses. Avec comme but, forcer les Suisses à entrer au GATT. • Le risque d’un conflit plus grand avec les Etats-Unis persuade le reste du patronat suisse, le secteur pharma notamment, de sacrifier les intérêts horlogers et à se rallier au libre-échange.
Comment ça? En 1947, la Suisse, grande exportatrice de capitaux et de biens industriels, rechigne à adhérer à l’ancêtre de l’Organisation mondiale du commerce, le GATT (General Agreement on Tariffs and Trade). Pourtant, cet Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce veut baisser les droits de douane au niveau international. Or, chose méconnue, des secteurs de l’économie suisse freinent des quatre fers face à la libéralisation des échanges. L’agriculture, mais aussi le textile et l’horlogerie, craignent qu’elle ne profite à la concurrence étrangère en Suisse et compromette les positions helvétiques sur les marchés étrangers. Selon Maurice Vaucher, le président de la Fédération suisse des fabricants d’horlogerie de l’époque, «l’adhésion de la Suisse [au GATT] conduirait l’industrie horlogère à sa perte». Ni plus, ni moins.
Fer de lance de la libéralisation du commerce international, Washington va utiliser de multiples armes pour amener la Suisse dans l’arène du GATT. Une de ces offensives démarre le 5 juin 1950, quand le gouvernement américain écrit au Département politique fédéral, l’équivalent actuel des Affaires étrangères. Les Américains exigent alors l’introduction d’une «clause échappatoire» dans l’accord commercial conclu en 1936. Cette clause permet de suspendre les avantages douaniers accordés à certaines marchandises pendant une durée limitée. A Berne, le caractère unilatéral de la missive américaine, assortie d’un délai très court de deux semaines, fait l’effet d’une douche froide.
En juin 1950, une séance de crise se tient à la division du commerce du Département de l’économie publique. Comme souvent, c’est le délégué du patronat suisse, l’influent Heinrich Homberger, du Vorort (le comité directeur de l’Union suisse du commerce et de l’industrie), qui résume l’enjeu: «Les Américains justifient leur intransigeance par leur doctrine en matière de politique commerciale: les tarifs douaniers ne devront plus être l’objet de négociations hors du cadre du GATT». En décodé, Washington utilise un enjeu bilatéral, la négociation de la clause échappatoire, pour contraindre la Suisse à adhérer au GATT. Horlogers désorganisés. Les montres suisses sont, en réalité, la principale cible visée par l’introduction de la clause échappatoire. A cette époque, ce secteur clé de l’industrie helvétique rapporte près de 20% de la valeur totale des exportations. A lui seul, le marché américain pèse un tiers des ventes horlogères à l’étranger.
Fragilisée par la crise de l’entre-deux-guerres, la branche horlogère peine à organiser la défense de ses intérêts. Ses délégués et ses patrons se querellent, perdent leur sang-froid et appellent à des mesures de rétorsion radicales. Le 9 juin 1950, la Fédération suisse des fabricants d’horlogerie propose d’ignorer la requête américaine.
Au sein du Vorort, cette idée ne réjouit pas les autres délégués patronaux. S’ils partagent les inquiétudes horlogères quant au protectionnisme états-unien, ils ne veulent pas non plus s’aliéner un important partenaire commercial. Après discussions, le patronat décide de ne rien décider… En accord avec le Vorort, le Conseil fédéral ignore donc le délai fixé par Washington. Protectionnisme. Passant de la parole aux actes le 10 août, les Américains dénoncent l’accord commercial conclu avec la Suisse. Berne se doit de réagir. Pour les milieux exportateurs, il est exclu de faire supporter le regain de protectionnisme américain à toute l’industrie du pays. Il faut à tout prix sauver l’accord de 1936. Sous la pression des autres secteurs industriels, les horlogers se résignent à accepter la clause échappatoire. Mais au prix de compensations américaines. Une option qui doit retarder le plus possible l’utilisation de la clause. Craignant une guerre commerciale, le Conseil fédéral accepte cependant les conditions américaines le 13 octobre 1950.
Très vite, la clause échappatoire est invoquée par les horlogers américains. En effet, ces derniers estiment que les montres suisses mettent en péril l’industrie domestique et utilisent tous les moyens pour en limiter l’importation. Une enquête de la «Tariff Commission» s’ouvre en septembre 1953 à Washington. Après une courte procédure, les droits de douane sur les montres helvétiques sont augmentés en moyenne de 50% en juillet 1954. Découvrez l'entier de l'article dans L'Hebdo. http://www.hebdo.ch/Edition/2008-32/Mieux_Comprendre/histoire/la_guerre_des_montres_un_feuilleton_americain.htm _________________ Contraria contrariis curantur. (Les contraires se guérissent par les contraires).
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