Question "technique": les huiles des mouvements (El Primero inside)

Les amis, Est-ce que le fait de beaucoup porter, ou au contraire de très peu porter, sa montre a une influence sur le "séchage" des huiles?

Admettons que c'est après + ou - 5 ans qu'un El Primero a ses huiles + ou - sèches: est-ce que si on a porté en continu pendant 5 ans son EP ça aurait "usé" (asséché) plussss les huiles que si on l'avait moins porté (par ex. que 2,5 ans sur 5 ans)?

Et quid si on laisse dormir pendant 5 ans un EP tout neuf (ou fraîchement révisé)? Est-ce que les huiles sèchent aussi si ça tourne pas? Probablement que oui, mais dans quelle mesure?

Et est-ce que les conditions climatiques ont également une influence sur les huiles? Ca s'assèche plus vite à l'intérieur de nos bestioles quand il fait très froid ou quand il fait très chaud?

Attention, la question n'est pas de savoir quand est-ce qu'il faudrait faire réviser sa montre, ni de savoir si c'est bon ou non de ne pas faire tourner les rouages du calibre pendant longtemps, mais juste de savoir quels sont les facteurs qui font que les huiles d'un mouvement s'assèchent plus vite ou plus lentement. Juste les huiles.

Nous avons sur le forum des chimistes qui pourraient répondre à cette question sur les pertes qualitatives.


Le principal défaut des huiles à l'asséchement, elles se transforment en gomme...la chimie de l'air, des métaux, sur le liquide

L'huile n'est pas éternelle . Mais l'huile synthétique résoud pas mal de pb.

Existe il un liquide qui est capable de garder toutes ses qualités?

Perso je sèche.
Effectivement, pour avoir des réponses vraiment précises, il faudrait des résultats d'expériences scientifiques. Peut-être que ça existe en interne, mais je n'ai jamais trouvé ce type d'informations. Pourtant, toutes ces questions sont intéressantes car on se les pose tous un jour. Une montre stockée dans un coffre froid, un squelette exposé aux UVs... intéressant d'avoir l'évolution des lubrifiants dans un peu toutes les circonstances, et intéressant également d'avoir des valeurs pour mesurer les évolutions sur quelques siècles, du pied de bœuf à la synthèse.

Si il y a un chimiste dans la salle, ou un responsable de R&D de chez Moebius...

Christian.

steyr a écrit:

Perso je sèche.
Effectivement, pour avoir des réponses vraiment précises, il faudrait des résultats d'expériences scientifiques. Peut-être que ça existe en interne, mais je n'ai jamais trouvé ce type d'informations. Pourtant, toutes ces questions sont intéressantes car on se les pose tous un jour. Une montre stockée dans un coffre froid, un squelette exposé aux UVs... intéressant d'avoir l'évolution des lubrifiants dans un peu toutes les circonstances, et intéressant également d'avoir des valeurs pour mesurer les évolutions sur quelques siècles, du pied de bœuf à la synthèse.

Si il y a un chimiste dans la salle, ou un responsable de R&D de chez Moebius...

Christian.

Probablement que les chimistes du Bordelais ou de Bourgogne connaissent ce sujet...

J'ai bu un bdx 1978 qui était remarquablemnt bon.
Du vin à la place de l'huile ?

Je me souviens d'avoir lu un post qui abordait la question (désolé, je suis incapable de le retrouver) et ce que j'en ai retenu, c'est que le principal facteur d'assèchement des huiles est l'âge plus que l'utilisation ou non de la montre.
Mais n'étant pas un spécialiste, je m'arrête là

Dans le viellissement des huiles il y a deux problèmes contradictoires :

- D'un coté si la montre n'est pas utilisée l'huile peut s'écouler paisiblement et "s'enfuire" des zones fonctionnelles pour aller "sécher ailleurs". C'est parfois ce que l'on observe sur de vieux mouvements qui n'ont pas tourné et son resté longtemps dans la même position ; les plans d'impulsion des levées sont secs, mais il y a une goutte d'huile séchée qui "pend" sous la levée. Lorsque le mouvement fonctionne les tensions de surfaces font que les pièces en mouvement ont tendance à "attirer" l'huile au niveau de la zone de frottement. L'huile ainsi "brassée" en permanence sèche moins vite. Dans le cas des graisses ou des huiles chargées (teflon molybdène) ce brassage est d'autant plus important qu'il évite une séparation du lubrifiant en plusieurs phase (comme une mayonnaise maison qui attend trop )...

- D'un autre coté lorsque une huile "travaille" elle est sans cesse soumise à des cycles de mise en pression (la pression de contact dans un échapement peut aller jusqu'à plusieurs centaine de MPa). Ces cycles de mise en pression finnissent dans le temps par "casser "les chaines moléculaires de l'huile qui perd alors peu à peu ses propriétés. De plus l'usure des pièces même infime finit par charger l'huile en particule (acier, rubis) qui agissent alors comme des abrasifs. C'est pour cela qu'il faut faire la vidange de la bagnole .

Avec les nouvelles huiles minérales (le pied de boeuf c'est plus le pied ) et les nouveaux épilamages (traitement d'accroche des huiles) on gagne sur tous les tableaux : moins de séchage dans le temps, meilleure résistance aux pressions alternées, meilleure accroche.


Donc au final une réponse bien longue pour pas grand chose car chaque cas est différent et nécéssite une huile adaptée. Le vieillissement de l'huile de l'échapement sera tres différent de celui de l'huile des incabloc etc... Mais j'éspère que ces quelques éléments répondront quand même un peu à ta question...

Personnelement je suis pour que nos tocantes vivent et ne pourrissent pas au fond d'un coffre ou d'un tiroir.

[Edit] Orthographe

Merci Tic&Tac pour cette brillantissime réponse. Tu es donc horloger? Y’a-t-il d’ailleurs beaucoup d’horlogers sur ce forum? Et merci aux autres aussi. Je vois que l'horlogerie n'est pas une science exacte et qu'il est donc difficile de formuler des règles toutes faites quand autant de facteurs entrent en jeu. Je vois aussi que la qualité des huiles utilisées semble fondamentale. Est-ce à dire que les huiles utilisées chez Zenith pour l’El Primero ne sont plus mêmes aujourd'hui en 2008 qu'alors en 1970?

Merci Tic&Tac pour cette réponse vraiment très interessante

N'y connaissans pas grand chose sur ce sujet, il y a tout de même un point ou je suis complètement de ton avis, c'est qu'une montre je la préfère au poignet que dans un coffre

mon horloger me conseille de faire tourner mes montres une fois par mois,
même si elle reste dans un tiroir ,
afin d'éviter que l'huile ne se fige, voir durcisse

Merci Tic&Tac, tout ce que je voulais savoir sans jamais oser le demander... Un résumé rudement efficace !

Tu ferais un bon horloger

Christian

Content que cette réponse vous ai plu

Pour les huiles du El-Primero, il est fort possible en effet que ce ne soit plus les même qu'en 1970. Par exemple Rolex a déposer il y a à peine quelques moi un brevet sur une nouvelle combinaison d'huile et de traitement de surface... Comme quoi l'évolution sur ce sujet continue...

icq a écrit:

Tu es donc horloger ?

Non, non pas horloger, mais j'ai pas mal bossé sur la lubrification ces dernières années...

steyr a écrit:

Tu ferais un bon horloger

Merci Christian, mais avec le café que je bois, les tourbillons tremblent quand il me voit arriver