Charlie avait un goût amer dans la bouche. Elle lui avait dit en quelques minutes toute une série de choses désagréables. Comédien, manipulateur, méchant, menteur...Elle avait du se convaincre de ses défauts pour atteindre le niveau commun de ce que n'importe qui dit à n'importe qui afin de justifier de tourner la tête.
Il se sentait comme anesthésié par tant de rancoeur annoncée mais il resta debout, abattu et debout. Il ne s'attendait pas à tant de haine lui qui ne lui avait donné que le plus positif de lui-même.
Il jeta un oeil sur sa Breitling qui marquait 19 heure 58. la maquilleuse lui fit un raccord de maquillage tandis que les projecteurs donnaient plein pot la lumière maximum sur le plateau.
20 heures... "Silence Plateau" hurla l'assistante. Le générique embraya et il lut les titres de l'actualité. Celle-ci démarrait par un évènement souriant... Il récita machinalement son journal puis anima la partie magazine. 20 heures 40, Il lança "à demain" et la lumière s'éteint pendant le génerique de fin ...
La maquilleuse vint le démaquiller, il réalluma son portable, il avait un SMS "Cherches une autre que moi". Il enfila dans la poche de sa chemise son Iphone et quitta le plateau. Il fallait qu'il aille boire un verre avec le chef du service des sports qui venait d'avoir une petite fille après 37 mois de grossesse de sa femme remplacée in fine pour la fécondation dans une éprouvette. Il plaisanta avec tous les autres journalistes et techniciens présents. Il allait partir diner quand il reçut encore un SMS lui disant qu'il était avec des gens qui n'existaient pas.
Il avait mal aux pieds avec cette nouvelle paire de chaussure en cuir et puis il prit l'ascenseur. Il descendit seul les 7 étages et croisa au rez de chaussée Lise la journaliste des potins. "Tu n'as pas bonne mine, tu couves quelque chose ..." lui dit-elle ... Il ne fallait surtout pas lui répondre s'il voulait éviter de faire la une de la presse people.
Il monta dans sa voiture. Le voyant signalait que l'air bag émettait un code d'erreur. Ca faisait trois jours que cette saleté d'air bag semblait hors service. Il démarra tranquillement, il était préoccupé par cette rupture unilatérale et puis il y eut ce tournant, cette plaque d'égout en travers de la route et ce coup de volant. L'air bag se déclencha, il mit la main gauche pour l'interposer et se protéger le visage. Son poignet fut coincé entre son front et le système pneumatique.
Lorsque les pompiers le dégagèrent, il avait cette horrible lunette de chronomat gravée sur le front. Les cavaliers lui avaient creusé la boite cranienne. Les médecins dirent immédiatement qu'il aurait une cicatrice à vie avec la forme de la lunette.
Cette fille lui avait donc laissé ce gout amer et cette cicatrice irréversible. Il n'aimait plus cette montre... Il n'aimait plus sa voiture non plus ni ce restaurant où il dinait souvent. Il n'aimait plus non plus son métier d'égraineurs de mauvaises nouvelles. Qu'est-ce que tu aimes ? se dit-il ... Il n'avait plus de réponse et c'était là tout son drame. Il avait basculé de l'autre coté ...