Franck Muller se redéploie

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Franck Muller se redéploie


HORLOGERIE. La lutte à laquelle se livraient ses deux fondateurs est terminée.




Après les déchirements internes en 2003/2004, la scène était plutôt inattendue. Lorsque le groupe Franck Muller a reçu la presse il y a quelques semaines à Genève, Vartan Sirmakes et Franck Muller parlaient d'une même voix. Certes, chacun a compris depuis le malheureux épisode que Sirmakes avait pris seul les commandes opérationnelles du groupe, mais Franck Muller paraissait à nouveau concerné par les enjeux liés à la société et, surtout, à son domaine de prédilection, le produit.

Depuis lors, Franck Muller a entrepris une tournée en Asie et aux Etats-Unis. C'est dire que les rôles sont aujourd'hui clairement définis et que Vartan Sirmakes a délibérément choisi de tourner la page et d'aller de l'avant.

Après le rachat l'an dernier des sociétés Rodolphe & Co et Alexis Barthelay, le groupe gère aujourd'hui cinq marques: les deux précitées ainsi que Franck Muller, European Company Watch et Pierre Kunz. Et les expériences récentes ont montré qu'il n'était jamais évident de rééditer un premier succès remarqué.

Créée à fin 2004 à Neuchâtel, la société Neo SA occupe 12 collaborateurs. Elle travaille sur les mouvements haut de gamme du groupe et sur les échappements. Aujourd'hui relancée, la marque Rodolphe s'installera à l'automne dans l'ex-bâtiment de Credit Suisse (CSGN.VX) à Neuchâtel. Une vingtaine de personnes y seront occupées. Par ailleurs, le groupe prévoit une importante implantation aux Bois (JU) sur une parcelle récemment acquise de 24000 m2. Combinant bâtiments industriels et habitat groupé, le projet devrait démarrer l'an prochain et les premiers ateliers pourraient être ouverts avant l'été 2008. Le coût de l'ensemble est devisé entre 35 et 40 millions. «Il s'agit du plus grand projet de développement industriel du Jura», souligne Didier Decker, directeur opérationnel. Les activités déployées aux Bois iront de la fabrication des boîtiers à la production des composants du mouvement horloger. Une cinquantaine d'emplois devraient être créés dès l'ouverture, mais l'implantation à terme pourrait générer de 150 à 200 nouvelles places de travail. La volonté est donc de croître sans délocalisation des activités à Genthod. Afin de ne pas être en reste par rapport aux concurrents, les deux fondateurs annoncent pour septembre une innovation touchant au domaine de l'échappement. «Ce développement a trait à la lubrification et au dessin de l'échappement, de la roue et de l'ancre», lance Franck Muller. Dans la foulée, Vartan Sirmakes révèle pour septembre l'arrivée d'un mouvement chronographe qui sera réservé aux marques du groupe. On sait par ailleurs que les sociétés de Genthod achètent des mouvements aux nouveaux producteurs arrivés ces dernières années sur le marché, notamment Indtec et Sellita. Pour démontrer l'indépendance acquise en partie face à Swatch (UHR.VX) Group, Vartan Sirmakes se fait fort d'expliquer qu'ETA est tombée au 17e rang de ses fournisseurs.

La bataille rangée entre les deux fondateurs a fait des dégâts commerciaux. Alors que toute l'horlogerie de luxe était en progression, Vartan Sirmakes avoue pour 2005 un chiffre d'affaires pratiquement stable à quelque 330 millions de francs. Quant aux ennuis avec le fisc, le patron de Genthod, comme à son habitude, relativise et dit envisager les suites avec une totale sérénité.

Michel Jeannot/BIPH
Samedi 8 avril 2006

© Le Temps, 2006

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