La Suisse est la cible préférée des Pink Panthers



Image Edouard curchod

La bijouterie Schaller, près du Montreux Palace, a été dévalisée en juillet 2009. Agissant à visage découvert, trois malfrats armés avaient raflé montres et bijoux se trouvant sur le présentoir de la vitrine d’exposition.



Les attaques de bijouteries attribuées aux Pink Panthers se multiplient depuis 2008. Notre pays figure désormais en tête de liste de ce gang. Ces hold-up ont permis à la police de mieux cerner ces voleurs, dont certains sont incarcérés en Suisse


Julian Pidoux - le 12 juin 2010


Le Matin Dimanche




Deux attaques de bijouteries attribuées aux Pink Panthers en 2008, sept en 2009 et déjà trois cette année: le constat est sans appel.
«La Suisse, avec la France, est devenue le pays le plus touché par des braquages attribués à des membres des Pink Panthers», confirme Michael Perler, chef de la police judiciaire fédérale. Plus de la moitié des cas concerne la Suisse romande.
Des soupçons fondés
Depuis trois ans, les enquêteurs de six cantons ont en effet permis de rassembler suffisamment d’indices permettant de porter des soupçons fondés sur ce gang dans une douzaine de hold-up, répartis dans sept villes différentes. Il s’agit de Genève, Lausanne, Neuchâtel, Montreux, Zurich, Bâle et Lucerne. Et il pourrait y en avoir d’autres.
«Nous n’avons pas encore de chiffres absolus, précise un enquêteur spécialisé de l’Office fédéral de la police (FedPol) qui, au vu de sa mission, a souhaité garder l’anonymat. Depuis l’automne 2008, nous estimons, au vu des éléments dont nous disposons, qu’entre dix et quinze attaques peuvent être attribuées à ce groupe. Ces cas sont à la hausse.»
Ce dernier précise également que la présence de ces mêmes braqueurs a été relevée lors de plusieurs casses.
Selon les services d’Interpol, les membres des Pink Panthers seraient environ 150. D’anciens militaires originaires d’ex-Yougoslavie pour la plupart. Sans hiérarchie établie, ils agissent dans le monde entier par petits groupes, en plein jour, armés et souvent à visage découvert. Leur cible: les montres de grand luxe.
Pink Panthers en prison en Suisse
Ces hommes ne craignent rien. «Ces malfaiteurs sont très bien organisés. Chacun sait ce qu’il a à faire, explique Michael Perler. Le repérage, le vol de véhicules pour la fuite et l’attaque elle-même, puis le transport des bijoux sont parfois menés par des personnes différentes.»
Hyperentraînés, sûrs d’eux, les Pink Panthers ont d’ailleurs longtemps posé des problèmes aux enquêteurs suisses. Mais au fil des attaques, ces derniers ont appris à mieux les connaître. Jusqu’à pouvoir procéder ou contribuer à leurs arrestations.
Après le braquage de la bijouterie A l’Émeraude en mai 2009 à Lausanne, le travail rapide de la police lausannoise avait, par exemple, permis d’arrêter deux hommes à Paris quelques jours plus tard.
«Des membres présumés des Pink Panthers sont actuellement emprisonnés en Suisse», confirme Stefan Kunfermann, porte-parole de l’Office fédéral de la police. Un exploit, lorsque l’on sait qu’une quinzaine seulement de ces hommes est actuellement sous les verrous à travers le monde.
Des butins introuvables
De nombreuses zones d’ombre entourent encore les Pink Panthers. L’une des plus grandes inconnues réside dans la destination des montres dérobées. «Les bijoux volés en Suisse ne sont pratiquement jamais retrouvés, reconnaît l’enquêteur de FedPol. Une montre est réapparue aux Etats-Unis.»
Cette absence de butin suggère par contre que les bijoux ne sont pas revendus à la sauvette sur le marché noir. Sur ce point, Michael Perler en vient à la conclusion que «ces vols se font sur commande».
«Ils ont des clients préalables, relève Michael Perler. Car les braqueurs savent exactement ce qu’ils veulent prendre. Preuve en est qu’ils n’hésitent pas à laisser certaines montres de luxe, alors qu’ils emportent celles exposées dans la vitrine d’à côté.»

Dans ce contexte, la qualité des montres helvétiques risque bien de continuer à attirer des Pink Panthers en Suisse.