1982…
Pierre Mauroy passait la semaine à 39 heures, les britanniques allaient se battre pour quelques bout de terre aux Falklands, Grâce de Monaco ratait son virage, Brejnev la rejoignait d'ailleurs peu de temps après, "ET" sortait sur les écrans et le premier bébé français sortait d'une éprouvette…
et Bulova sortait la Thermatron de son chapeau... la première montre fonctionnant grâce à la chaleur corporelle du poignet.
Je vous propose de découvir cette montre dont la spécificité a marqué l'histoire de l'horlogerie. Son échec commercial et sa très modeste et marginale descendance la classe dans la catégorie des montre rares et dignes d'intérêt. La marque qui l'avait produite ne lui survécu pas bien qu'elle fut auréolée d'une grande réputation.
Un peu plus d'information que j'ai pu collecter sur cette "impasse" technologique qui donne tout son jus à la bête.
Le principe de base est le suivant : un thermogénérateur électrique permet le fonctionnement du moteur pas à pas ainsi que le rechargement d'une batterie comme source secondaire d'énergie (Leclanché 1.1 V, certes révolutionnaire mais pas adaptée au rythme d'utilisation de la montre, en outre elle devait être remplacé au bout de 10 ans, ce qui explique le peu de modèles fonctionnant encore)
Le thermogénérateur fonctionne par "l'effet Seebeck" : lorsque deux metaux de nature différente sont mis en contact, la différence de température entre ces métaux génère un courant électrique. Le résonateur est à quartz.
Dans la Thermatron, les métaux combinés dans le thermogénérateur sont les suivants : antimoine, bismuth et tellurium. Une différence de 1.5 degrés C entre la peau/fond du boitier et la partie supérieure de la montre permet à chacun des couples thermiques de générer 0.25 mV.
700 couples thermiques sont arrangés en 4 groupes de 175 couples et produisent 175 mV au total. Il s'agit des 4 groupes visibles aux 4 coins du mouvement.
Cf photo ci-dessous
(photo P. Doensen "Watch")
le schéma ci-dessous, en allemand, permet de comprendre la disposition générale des composants
Le courant généré, trop faible pour alimenter le mouvement, est converti en alternatif par un circuit intégré. Par l'intermédiaire de la bobine modifiée, ce courant est amené à 1.4 V et permet au moteur pas à pas de fonctionner.
La puissance générée par la chaleur du poignet est de 50 milliwatts, le thermogénérateur produit 10 microwatts, ce qui est suffisant pour faire fonctionner la montre dont le besoin est de 2 microwatts. Le développement de la technique avait été assuré par le Centre Électronique Horloger (CEH) à Neuchâtel.
La montre a été présentée à Bâle en 1980 alors que son développement n'était pas terminé et avait sérieusement grévé les finances de l'entreprise. Sa mise en vente en 1982 fut donc prématurée, le produit n'était pas fiabilisé et son prix de vente prohibitif (2000 USD d'époque). La montre était produite à Bienne avec deux calibres 2467.10 et 2467.20 et 6 habillages différents. Le boitier était carré, à pans coupés, la finition du boitier pouvait différer allant de la couleur métal au noir PVD complet en passant par différent niveaux de polis intermédiaires.
Exemples de modèles
(photos "laserstone")
La montre présentée ici à le pourtour de la lunette poli miroir.
Sa largeur est de 32 mm hors couronne et sa hauteur de 36 mm. L'épaisseur est de 10 mm.
le fond est vissé par 4 vis pour lesquelles une clé spéciale est nécessaire. Le SAV ne pouvait d'ailleurs être effectué que par Bulova.
les flancs, en métal, sont creusés d'alvéoles
détail du traitement de surface
le bracelet est métallique, je n'ai pas connaissance de modèles cuir. Le bracelet est également traité, il a existé en couleur métal. La finition est correcte mais il dégage une impression plutôt frêle surtout en comparaison avec les production actuelles.
La boucle déployante d'origine est à l'avenant
Suite à cette commercialisation hasardeuse, la firme STW racheta la totalité des stocks de Bulova et apporta alors des modifications au calibre en remplaçant notamment la batterie par un condensateur.
Cette modification était viable mais les montres devaient être amorcées manuellement : le démarrage était effectué par une petite unité mobile comportant une pile conventionnelle et actionnée dans le dos de la montre. Ces montres sont semblables aux Bulova, hormis le marquage STW en lieu et place de Bulova et un fond modifié pour acceuillir le poussoir de démarrage en son centre.
(photos "hknebel.org")
et ici s'arrête l'histoire suisse de ce dinosaure dont la descendance fut japonaise par Seiko.
Pour acheter ce type de montre, je pense qu'il faut être conscient de la prise de risque que cela représente du fait de la durée de vie incertaine de l'accumulateur qui est, comme mentionné, introuvable.
Par ailleurs, il faut avoir un goût (particulier… j'avoue) pour ce type d'horlogerie qui sort des sentiers battus, mais ceci est une autre histoire.
Plus de détail sur l'effet Seebeck et des jolies formules pour les ingénieurs du site dans le lien suivant
http://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_Seebeck
Thermiquement votre ;-)
Xaipe
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