Révision Jaeger-LeCoultre Futurematic

Bonjour,

Aujourd'hui, je vais partager avec vous quelques étapes de la révision d'une Jaeger-Lecoultre Futurematic Cal.837, calibre produit en très faible quantité (seulement 500 exemplaires).
Ce mouvement est relativement complexe (la rumeur courait que Jaeger le vendait à perte) et très bien exécuté.

Rentrons dans le vif du sujet et observons cette jeune demoiselle de 55 ans :







Ce qu'on peut en dire à priori : elle est en très bien conservée pour son âge avec une cosmétique presque parfaite.
Néanmoins, elle nécessite un nettoyage, d'où sa présence à l'atelier : elle ne tient plus l'heure, elle n'a presque plus d'autonomie et l'indicateur de réserve ne fonctionne plus. Bref, elle est encrassée.

Je dévisse le fond avec un outil spécifique. Il faut absolument la bonne empreinte sinon on abime tout (quelques horlogers peu compétents sont visiblement intervenus avant moi car les encoches sont passablement marquées). :



Le mouvement est emboité dans le fond (c'est à cause de la couronne). Je le désolidarise. On voit apparaître le rocher de mise à l'heure. Notez le joint complètement sec. Il sera remplacé par un joint neuf en nitrile.




J'installe alors le mouvement sur le porte mouvement. Il est un peu encrassé, comme collant. Observez le levier situé sur le pont du barillet : il réalise la fonction stop seconde lors de la translation de la couronne. Il vient stopper le mouvement du balancier lors de la mise à l'heure. Simple, mais efficace.



Je dépose alors le pont de barillet. Là on voit bien la crasse autant sur le pont qu'en dessous !



Je retourne le mouvement côté cadran, et je dépose les aiguilles et le cadran. Apparaît alors le mécanisme de réserve de marche, si particulier à la Futurematic. On notera également que la masse oscillante est fixée des deux cotés du mouvement, le prenant en quelque sorte en sandwich, ce qui lui confère une rigidité exceptionnelle par rapport à un montage classique en porte-à-faux.



Je dépose alors l'afficheur de réserve de marche. Notez le crochet qui vient bloquer la masse oscillante lorsque le ressort est complètement chargé. Quelle technologie de pointe pour l'époque ! (le réglage est fin).




Je retourne alors le mouvement et je peux maintenant retirer le rocher solidaire du rotor... puis la partie signée du rotor. Là encore il y a de la crasse.




Je dépose alors le pont de balancier et le balancier / spiral, suivi du pont d'ancre et de l'ancre.



Je retourne une nouvelle fois le mouvement et je peux déposer l'autre moitié du rotor. Je dépose alors le pont de la roue des heures et ladite roue dans le but d'inspecter les pièces et tout va bien, je peux remonter provisoirement.




Je dépose alors le système de rappel du mécanisme d'affichage de réserve de marche.





A ce stade, le mouvement part en direction de la machine à laver où il tournera dans l'essence pendant plusieurs dizaines de minutes. Il en ressort tout propre :




Je redépose le pont de roue des heures pour procéder au huilage de la chaussée. Puis je repose les roues et le pont.




Je retourne le mouvement et je dépose le pont de minuterie. Je contrôle que toutes les pièces sont propres et tournent rond. Tout est impeccable. Je repose alors la minuterie - c'est un moment très délicat, il faut que chaque roue soit parfaitement concentrique de ses rubis, que tout soit parfaitement aligné.




Je repose alors le pont de minuterie et je huile. Je dépose ensuite le pont d'ancre une nouvelle fois, je vérifie que tout est en ordre et je repose puis je procède au huilage de l'échappement.



Je retourne le mouvement et je repose le système de rappel de l'afficheur de réserve de marche. Le mouvement est super propre, comme neuf ! Notez la qualité d'éxecution de la manufacture Jaeger-LeCoultre : la finition est superbe !



Je repose alors le balancier et son pont, puis je procède au huilage de l'antichoc. Je positionne ensuite le barillet qui a également été nettoyé, puis je repose le pont.






Retour côté cadran, je repose les éléments d'entrainement de l'afficheur de réserve de marche, puis je commence la repose du rotor d'un côté, puis de l'autre.





Je pose enfin le reste du système : le levier d'affichage, le pont, le disque de seconde perpétuelle...




Me reste alors à poser le cadran et les aiguilles et je mets en boite (j'ai simplement ravivé le brossage sur les cotés de la carrure pour la rajeunir, le propriétaire ne souhaitant pas un polissage complet pour garder le coté vintage de la montre). Le remontoir fonctionne à nouveau et j'ai posé un mini joint sous la couronne. A ce joint s'ajoute le joint de fond de boite, ce qui vient parfaire l'étanchéité - toute relative - de la montre.

Quelques photos à l'établi :













En espérant vous avoir amusé.
Salutations horlogères, JM.

oui!

la futurematic porthole est une de mes montre préférée!

merci!

Merci du partage, JM!!
Sujet très intéressant, on ne voit pas ce mouvement tous les jours.

Toute belle montre !
Ce fut un vrai régal de suivre ce reportage... j'y reviendrai d'ailleurs
Merci d'avoir pris le temps de nous l'avoir présenté.

Charles

Merci !

L'état cosmétique du cadran et de ses aiguilles est en effet remarquable. Son design n'a pas pris une ride et méritait bien cette remise en fonction.
Reportage sympa pour un bien beau modèle!

tres belle montre !

merci pour ce partage de revision fort instructif

Merci du partage !

Modèle plus rare que celui à aiguilles, pour la seconde et la réserve de marche.

Felsa a utilisé un système identique de blocage de masse, offrant l'avantage essentiel d'une réserve de marche supérieure à celle octroyée par le système habituel, et pérennisé, à bride glissante.

Encore plus rare que la Jaeger, cette Felsa . Quelques réemboîtages de mouvements NOS de ce type par Comor, fin des années 70.

Piéces remarquables, jalons de l'évolution de ce système d'armage, au même titre que la Zenith 1724, ou la Longines 990. Et bien sûr, la Jaeger en cause.

post à mettre de côté si un jour il m'en tombe une sur l'établi

super boulot comme d'hab !


Isosta

Merci, très intéressant comme reportage
la couronne est donc sur le fond de la boîte? ça a un avantage particulier par rapport à une couronne tradi sur le côté?

isosta a écrit:

... si un jour il m'en tombe une sur l'établi ...

Tu as une trappe à Futurematic au dessus de ton établi?

Chez moi rien de tel n'est jamais tombé. Seulement de la poussière jour après jour.

Ashes to ashes, dust to dust ...

Sinon la montre, magnifique, fait partie de mes rêves. Surtout en boîte acier, c'est carrément rare

Hypnos a écrit:

Ashes to ashes,

hommage tout à fait d'actualité , mais le passé ne reviendra pas ....mon vieux !

pour les futurmatic , pourquoi pas ? j'en ai souvent laissé passer à restaurer car les pièces sont très difficiles à trouver

souvent la boite plaquée aux fines anses courbes , pas acier c'est vrai

Isosta

isosta a écrit:

Ashes to ashes,

hommage tout à fait d'actualité ...

C'était la journée David Bowie hier sur France-Inter

Ces montres sont vraiment sacrément belles

ariake a écrit:

... la couronne est donc sur le fond de la boîte? ça a un avantage particulier par rapport à une couronne tradi sur le côté?

La couronne n'a plus qu'un seule fonction, la mise à l'heure. Plus de fonction de remontage qui est assuré uniquement par la masse oscillante. Un peu comme les Harwood du début du XXème qui elles n'avaient carrément plus de couronne. C'était la lunette qui assurait la mise à l'heure. Comme le disait la réclame (c'est comme ça qu'on nommait la publicité en ces temps reculés) plus de problème d'étanchéité à la couronne. Et pour cause.

Un sujet d'un des piliers de notre forum qui donne des contributions sur un des bars d'en face ICI

Tout simplement excellent. Elle est sublime!

La Voumard, aussi, remontoir dessous, en effet . Les photos du mouvement me rappellent quelque chose, c'est curieux... Patek avait aussi un calibre auto de ce genre, le 350, sauf erreur.

Dans le cas d'une automatique, cette disposition de remontoir donne plus de liberté au constructeur pour établir et disposer le rotor, le passage de tige obligé d'une construction traditionnelle imposant quelques contraintes, parfois incompatibles avec certaines réalisations d'armage auto spècifiques.

Précisément le cas de la Jaeger, avec sa double planche de masse, rarissime. Et, partant, d'une rare robustesse.

Bonsoir à tous,

Voilà un sujet qui me plait beaucoup, concernant mon modèle fétiche :



Que je l'aime !

Une SR497 plus classique





Le livret...

Plus classique, certes, mais très désirable. En fait, c'est celle qui me manque.

A voir plus tard.

Elle est en effet superbe !
Patine magnifique !
Elle est très désirable

JM.

corsaire75 a écrit:

Plus classique, certes, mais très désirable. En fait, c'est celle qui me manque.

A voir plus tard.

Plus " classique ", et donc permettant la lecture précise de la RM, et surtout de la seconde synchronisable avec la minute, du fait du stop seconde .

Autant d'avantages à oublier avec l'emboitage " à disques ". Charmant, plus rare, certes, mais l'expression aussi d'une certaine désinvolture maladroite à l'égard d'une telle qualité de conception mouvement.

Echec commercial donc à l'époque, et paradoxalement , bien plus tard, de ce fait, succès collector ! Une série limitée en somme....

A l'usage, la lecture de la réserve de marche est finalement assez aisée.

Quant à la synchronisation à la seconde, si l'on n'est pas un maniaque de la précision, est-ce vraiment nécessaire ?

magnifiques ces JLC...

corsaire75 a écrit:

A l'usage, la lecture de la réserve de marche est finalement assez aisée.

Quant à la synchronisation à la seconde, si l'on n'est pas un maniaque de la précision, est-ce vraiment nécessaire ?

C'est clair, on peut se passer de cette précision, mais alors, à quoi bon concevoir un calibre d'une telle qualité réglante,incluant aussi un stop seconde, pas si fréquent à l'époque, pour gâcher ce bénéfice avec un mode d'affichage ne permettant pas de profiter desdites caractéristiques ?

Comme un véhicule de prestige italien dépourvu de compte tours, et de tachymètre, en dépit de sa merveilleuse technique de motorisation... Guère concevable.

Ne parlons pas des deux roues, surtout les vintages.