Bonsoir à tous,
Ce qui m’a fait regarder les montres comme autre chose qu’un objet servant à fractionner le jour ou mesurer des durées, c’est mon travail sur le temps : finalement lorsque l’on veut commencer à le comprendre, le meilleur moyen n’est-il pas de regarder une montre (celle que vous voudrez..
ou déjà, empiriquement, le temps s’exhibe ? Cette aiguille qui tourne autour de son axe, ne donne –telle pas à voir le temps d’une façon apparemment limpide ?
En réalité, en l’habillant de mouvement, elle le déforme et en fait pour l’observateur un avatar de l’espace, ou si l’on préfère, de l’étendue. Il est évident que le temps ce n’est pas cela : si l’on arrête le mouvement d’une montre, le temps lui ne s’arrête pas et le caillou, dans on immobilité est aussi temporel que nous.
Bref, pour en revenir aux montres, ce que je trouve de remarquable et même d’hypnotique dans ces objets, c’est qu’ils déguisent le temps, mieux, ils le dissimulent, par le truchement de cette aiguille qui avance et ne montrant rien en définitive de ce qu’elle symbolise à nos yeux. Le temps est hors de l’horloge : partout présent, il est invisible à tous, indécelable, même aux rayons X.
Cet objet qui désigne sans montrer peut-il finalement créer du temps ? Croyez vous que dans l’espace, sur la lune ou les speedmaster ont posé un pied, du temps est apparu ? (je vous laisse le soin de répondre…)
Dés lors, l’histoire de la mesure du temps n’est pas aussi anecdotique que cela, en effet il n’est pas naturel de vouloir connaître le temps avec précision, ce qui est naturel ce sont les rythmes biologiques, les saisons. Longtemps le cadran solaire, les clepsydres ont mesuré le temps du lever au cocher du soleil, instruments encore tributaires de la nature, ils symbolisent cette existence rythmé par le cours naturel de la journée, sans souci de précision, sans souci d’obtenir une productivité mesurable.
La mise au point de l’horloge mesurant jour et nuit, heure après heure et aujourd’hui au niveau de ses battements le plus infimes, l’écoulement du temps, à contribué à dissocier le sentiment vécu du devenir de l’ordre naturel des choses. Et c’est cela qui est fascinant : comment l’histoire de la mesure du temps, des sabliers à l’horloge atomique, à transformé la conscience du temps.
Lorsque au 14e siècle on inventa l’horloge mécanique à sonnerie qui divisait la journée en 24 heures et lorsque cet instrument commença à rythmer l’existence entière, une révolution extraordinaire s’était accomplie. L’homme avait trouvé un instrument puissant capable de réguler dans la vie de tous les jours, le processus de modernisation fulgurant qui débutait à cette époque.
Pour finir que dire de plus sinon que dans nul autre objet que les montres, on ne trouve un tel concentré d’interrogations philosophiques, morales et sociologiques ?
Si j’ai eu envie de vous livrer ces quelques réflexions c’est que je termine un livre passionnant sur le sujet (l’éveil à la conscience du temps dans les villes et les monastères, du bas moyen âge à aujourd’hui): L’histoire de l’heure, par Gerhard Dohrn-van-Rossum, ed MSH que, vous l’avez compris, je vous conseille
Bonne soirée, Cdt
Jose-antoine