Je ne sais pas si vous avez remarqué mais il n'est pas coutumier en pays horloger de dire ce que l'on pense. Il est vrai que la culture d'entreprise au sein des grandes maisons n'est pas fondée sur le franc parler et la liberté d'expression. Non, là c'est plutôt "Si tu as un avis différent, casse-toi !" et de fait, celui ou celle qui même avec des décennies d'ancienneté veut émettre un avis contraire à son chef ou en interne de manière discrète à ses collègues, a toute probabilité de passer avant une heure par la comptabilité avant un licenciement à effet immédiat, licenciement dont il sortira au mieux de l'entreprise escorté par un vigile.
Le consensus est de mise.
Le consensus doit dominer. La presse est donc priée de se conformer aux communiqués officiels et aux éléments de langage servis par la marque. Malheur à celui qui va faire part de critiques, il est lapidé, mis de côté, ignoré et si on le peut, on le fera casser par sa hiérarchie. Les blogueurs subissent le même sort. Le gentil blogueur un peu chef de clan qui caresse dans le sens du poil est bien traité, retwetté, liké sur les réseaux sociaux, invité, hébergé, choyé aux étrennes et enchocolaté quand le critique vilain est écarté qu'il soit positif ou non. C'est qu'il ne suffit pas d'être positif, il faut être inféodé, totalement soumis aux désidérata de la maison.
Cela donne cette communication lisse, insipide et consensuelle, cette approche néo-historique des marques fondée sur une histoire résumée, redigérée et réécrite qui s'éloigne du vrai pour entrer dans le merveilleux pays d'Alice. On raconte n'importe quoi saupoudré de quelques points de vérité et parsemé de joli mots d'un vocabulaire simple que chacun maîtrise facilement... On n'en veut pas davantage.
Lorsqu'une montre apparaît ratée, une erreur de casting comme on dit, il n'est donc pas de bon ton de le dire, non il faudra s'adapter et remplacer la question du pourquoi par un sourire et une phrase du type "Jolie pièce !" Quelques rires gras et un petit coup de flute dans la flute de l'hôte seront de bon aloi pour garder la main et ses contrats de publicité... C'est ce que l'on appelle du public relation. Ça fonctionne bien tant que ça fonctionne... Ensuite, il restera ce qui tient sans ce tronc, c'est à dire les arbres qui auront construit leur propre tronc car tout ce qui est accroché à l'éphémère disparait avec lui ... C'est une question de temps de survie.
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Contraria contrariis curantur. (Les contraires se guérissent par les contraires).