Que celui qui pense qu'il ne se passe rien le dimanche dans l'horlogerie ose encore se montrer ! Quand SwatchGroup annonce son départ de Baselworld, c'est un dimanche ! Quand Breitling fait de même, c'est aussi annoncé un dimanche ! Et si l'annonce de Breitling est si proche de la date anniversaire du naufrage du Titanic, c'est que le jour J tombait un jour de semaine. Le choix du dimanche est, disons-le un coup bas à la presse "classique", un coup de pied de l'âne au journalisme qui s'arrête le vendredi soir pour ne reprendre que le lundi matin.
Le départ de Breitling est déjà dans l'actualité d'hier quand la presse s'en empare, mais là n'est pas l'essentiel. La renonciation à Baselworld par Breitling, c'est un peu la goutte d'eau qui achève de déséquilibrer la balance du "Poursuivre ou non " le salon de Bale. Il ne reste plus à ce qui du coup perd son statut mondial pour descendre au rang de salon régional que trois grands acteurs : LVMH, Rolex et Patek Philippe. Les autres maisons ne sont que des miettes.
Oui mais voilà si Rolex milite pour préserver le salon, la marque est bien la seule à militer. Patek Philippe plutôt favorable, faute d'autre chose, donne peu d'écho à sa position, des fois qu'il faille en changer et, pour LVMH, Jean-Christophe Babin a déjà fait savoir qu'il était très peu favorable pendant que Stéphane Bianchi dit réfléchir. Vu le poids de Bulgari, on n'imagine pas une seule et même position pour toutes les marques du groupe et l'on peut craindre que Jean-Claude Biver, mlilitant du maintien ne soit pas entendu.
Le départ de LVMH achèverait le salon, ce serait le coup de grâce, un évènement définitif dans le sens de la fin de celui-ci. L'absence de SwatchGroup a déjà quasiment fait déserter le salon. Si tout le monde s'accorde à louer les qualités d'écoute de la nouvelle direction, c'est au final un peu comme un grand professeur de médecine qui se pencherait sur un patient trop tard après que la maladie soit devenue irréversible.
Avouons-le, du coté des professionnels de la presse horlogère, la disparition du salon est une catastrophe car c'est là que tout le monde venait puiser des infos avec un concentré de marques qui facilitait le travail. Il faut maintenant courir partout pour se tenir au fait d'une actualité un peu moribonde depuis deux ans. Si l'actualité n'est plus à Bâle une fois par an, il faudra gérer la dispersion. C'est comme pour ces poissons du grand aquarium du stand Breitling qu'on a dû remplacer par des méduses parce qu'on pensait que les poissons souffraient de cet enfermement pour cause de manifestation commerciale. Mais qui s'est posé la question de savoir ce que pouvait en penser une méduse ? Georges Kern par sa décision met en effet une centaine de méduses au chômage technique lesquelles, protégées par aucune convention collective, ne seront pas reprises par une autre maison. Il y a là de quoi inquiéter les syndicats dans un pays, la Suisse, qui n'hésite pas à organiser un référendum pour interdire la possession de poissons rouges isolés dans un aquarium mais a une pratique du droit social beaucoup moins respectueuse des travailleurs.
Les méduses qui travaillaient pour Breitling ont donc toutes les probabilités d'être mieux traitées que les employés quoi que les remettre dans leur milieu naturel les exposerait à leurs prédateurs parmi lesquels le Requin d'Ulysse Nardin. Il ne manquerait plus que le requin s'intéresse de trop près à Breitling. Il est vrai qu'avec ces stratégies au fil de l'eau, avec ces annonces de bons résultats commerciaux martelés ici et là suivis d'un départ tonitruant qui démontre l'inverse, il y a de quoi appâter tout groupe qui rêve d'étendre son domaine.
Rassurons-nous toutefois car George Kern a indiqué qu'il pourrait revenir en 2021 dans l'hypothèse où quelqu'un pourrait y croire et imaginer que tout départ n'est pas un aller simple. Les méduses retrouveront donc du travail à terme si elles se conservent deux ans mais ça personne ne sait vraiment si une méduse mise en lumière quelques jours peut ensuite garder sa fraîcheur dans le placard. Les conséquences du placard sont toujours incalculables et on ne sait jamais si ce qui en ressortira sera plus fort ou plus faible. Stéphane Linder, ex Tag Heuer, qui conseille les investisseurs actionnaires de Breitling aurait dit-on une idée assez précise sur le sujet. Il faudra l'interroger...
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Contraria contrariis curantur. (Les contraires se guérissent par les contraires).