Le calibre L990 de Longines, calibre automatique le plus plat du monde en 1977.
Préambule En 1977, l'heure à la mode venait du quartz. La vibration remplaçait de plus en plus souvent les oscillations mécaniques du balancier. Longines comme toutes les manufactures innove alors pour offrir ce que la technologie des mouvements mécaniques a de plus perfectionné. L'horlogerie traditionnelle lutte à sa manière contre l'invasion asiatique des montres bon marché, plus précises que ne peuvent l'être les montres mécaniques. Partout depuis la fin des années 1960, ingénieurs et développeurs sont convaincus et parviennent à convaincre les hauts responsables du secteur de la supériorité de la micromécanique. Cela se traduit par des mouvements à haute fréquence grâce à la roue Clinergic des fabriques réunies (issues de plusieurs grandes maisons) qui permet de faire basculer les calibres à 36 000 alternances par heure, à la présentation de mouvements plats, pas plus encombrants que les modules à quartz.
La montre mécanique peut donc être plate, avoir une grande réserve de marche et être précise au dixième de seconde. Tous les arguments pour "comparer" les performances du quartz et de la mécanique sont bons mais s'avèrent insuffisants quand pour 50 francs, une montre en matière plastique offre toutes ces qualités réunies.
Longines joue un dernier atout et présente un mouvement d'un niveau extraordinaire qui sera repris ensuite par des maisons prestigieuses à l'heure où il faudra aux marchés cesser de tenter de les influencer.
Génèse Le calibre L990 de Longines est né en 1975 et fut présenté en 1977 par Auréle Maire, Directeur Technique de Longines. Dans sa version première appelée 890 il est un peu plus épais que la version 990 mais possède déjà les caractéristiques de puissance qui en favorisent l'isochronisme.
Inventé au plus mauvais moment de l'histoire horlogère pour rester dans les mains de LONGINES, il fut cédé à Lémania qui après quelques modifications le baptisa "Lemania 8810". Calibre automatique doté de 25 rubis, tournant à 28 800 alternances par heure, il dispose d'une réserve de marche de 42 heures. Son diamètre n'est que de 26mm pour une épaisseur de 2.95mm.
Ce calibre fut conçu avec un double barillet qui donne force et régularité à la marche en assurant une fiabilité exceptionnelle.
La marque Longines présenta en février 2001 une série limité de 990 exemplaires de montres dotées de ce mouvement pour célébrer les 30 millions de montres vendues par la marque depuis sa naissance.
Le calibre L990 connait plusieurs variantes : 992 (sans date), 993 (sans date ni secondes) et 994 (avec date et sans secondes) chacun avec 17 ou 25 rubis. Ce calibre est le dernier mouvement entièrement manufacturé par Longines .
Sa reprise par Lémania date de 1991 sous la référence 8815. Lémania le déclina en version squelette (8881), un calendrier perpétuel (8840) une version à répétition des quarts (8860), heure sautante (8831), puis une version multizones. Bien entendu, le Lémania comme sa version originelle existe avec ou sans date et secondes.
Le calibre Lémania a équipé les montres Ebel 060, Girard Perregaux, Ulysse Nardin (UN 32), Bréguet (calibre 591) et RGM watch C°. Considéré comme l'un des tout meilleurs calibres à remontage automatique, il continue donc sa carrière mal entamée à cause du quartz qui déferla dans les années 70 et contribua à décimer l'horlogerie traditionnelle.
Pourtant Aurèle Maire, concepteur du calibre, voulait bel et bien défier le quartz avec ce mouvement extra-plat non soumis à l'usure des piles. Pour y parvenir, il fallait un calibre extrêmement précis. Pour gagner la fiabilité attendue, Longines choisit de sélectionner pour ce mouvement les meilleurs composants et d'opter pour les solutions techniques les plus robustes et évidentes. Avec en tête les calibres Lecoultre baptisés 2120 chez Audemars Piguet et 1120 chez Vacheron Constantin, il rechercha la plus petite hauteur.
La montre ne peut varier de par sa conception de plus de 2 minutes par mois. Mouvement le plus plat au monde à sa sortie, le L990 fut salué pour la qualité de ses élément réglants et son double barillet disposés l'un derrière l'autre (Xaipe dirait à la queue Leleu ), dispositif antérieurement adopté pour le calibre L890 présenté en 1975.
Beaucoup plus plat que le L890, le L990 est doté de deux barillets à rotation rapide dont il résulte des couples plus faibles que ceux des calibres à barillet conventionnel. La conception entraine une réduction de la force exercée sur les rouages et augmente la facilité de remontage. Longines a pu abaisser le rapport de transmission dans le rouage entre le rotor et les deux barillets. Dans une construction classique ce rapport est de 150 contre un tiers seulement avec le calibre L990. Longines a ainsi pu supprimer une roue et réaliser une masse oscillante plus légère et plate en métal Fritté à la densité plus élevée.
Le stockage d'énergie moins demandeur de force a permis d'opter pour un remontage unidirectionnel sans inverseur, inséré comme partie intégrante du mouvement sous le pont de barillet.
Pour assurer le maintien des oscillations du balancier, une quantité d'énergie deux fois moindre est suffisante par rapport aux calibres conventionnels.
Ce calibre est donc bel et bien un exploit technique orchestré pour Longines par Aurèle Maire qui créa un mouvement innovant qui de manière extraordinaire achèvera la carrière de Longines "manufacture" avec une pièce exceptionnelle.
La montre permettra de produire des modèles d'allure raffinée...
Malgré la contrainte économique pour Longines de se conformer aux exigences du marché, le mouvement L990 connut des développements notamment chez Breguet. Il reste aujourd'hui encore un exploit technologique à souligner dont il est dommage que Longines n'ait pas récupéré les fruits. Longines fait partie de ces grandes manufactures qui ont abondamment travaillé sur une multitude de calibres avec en point de mire une précision toujours meilleure et sur des durées plus longues. Longines a réussi depuis sa création à faire de nombreux mouvements d'une incomparable performance. Celui-ci fut le dernier d'une dynastie du "monde d'avant", celui où l'on multipliait les expériences en s'interrogeant sur leur rentabilité a posteriori.
Droits réservés - Forumamontres - Avril 2020 - Joël Duval