ZEN Rang: Administrateur
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| Sujet: Actu : «Montres, objets secrets...» Mer 5 Nov 2008 - 7:40 | |
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- «Montres, objets secrets...»
Alfredo Paramico, banquier italien employéà la City, cultive depuis l'adolescence une passion pour des montres. Aujourd'hui, ses préférences vontà des modèles vintage bien particuliers.
Florence Gaillard, Londres Mercredi 5 novembre 2008
Aux publicitaires en quête de banquier élégant, Alfredo Paramico pourrait bien servir de modèle. Le costume italien impeccable, le cheveu poivre et sel, l'assurance détendue, le visage fin et juvénile, l'accueil chaleureux. Dans un étage de la banque qui l'emploie à la City, la baie vitrée offre un spectacle fascinant d'architecture en métamorphose: une citadelle de grues et d'énormes chantiers, un dédale urbanistique. Ici, l'architecture des affaires, verre et béton, grignote les vieilles briques de l'East London, longtemps artisanal et ouvrier. Alfredo Paramico, à sa manière, porte en lui ces deux mondes. La finance est son quotidien professionnel. Mais son jardin secret tient dans l'ancien, dans l'artisanal, le petit morceau d'histoire.
L'homme, à la gestuelle volubile comme il se doit, se montre direct, ouvert. Ce qui n'est pas forcément fréquent parmi les collectionneurs. Surtout parmi ceux qui, comme lui, réunissent des objets dont l'acquisition représente des transactions à plusieurs millions de francs. Lui collectionne les montres vintage. Pas n'importe lesquelles. De très belles pièces, majoritairement des Patek Philippe des années 40 et 50. Il aime l'extrême sobriété des belles manufactures, les mécaniques à complications, les modèles rarissimes.
Le Temps: Comment un enfant de Naples, aujourd'hui âgé de 39 ans, qui vit entre Londres et Milan, s'est-il pris de passion pour ces montres suisses?
Alfredo Paramico: Le mot passion est celui qui convient. Je suis fou de ces montres. Je suis fou de la passion même de ces montres. J'essaie de comprendre, de trouver une obscure explication... Pourquoi les montres et pas les voitures ou les maisons? Je viens d'une famille italienne de la classe moyenne, très normale, qui m'a inculqué le sens des valeurs essentielles. Rien qui ne devait conduire à l'univers des montres haut de gamme. Mais tout enfant, je me souviens que j'aimais avoir quelque chose de petit et lourd dans ma poche. Un objet discret, de valeur, connu de moi seul, qui m'apportait un sentiment agréable et joyeux de confiance en moi. Est-ce grave, docteur?
- Vos montres restent-elles, aujourd'hui, des objets secrets à conserver dans une poche?
- Dans la poche, non. Mais secrets, oui, en général. Franchement, porter une montre n'a pas d'intérêt pour moi. Quand les gens savent que vous collectionnez les belles montres, ils regardent systématiquement votre poignet. Je n'aime pas ça. Mon plaisir, c'est d'ouvrir mon coffre, puis d'ouvrir la boîte - les boîtes d'origine sont souvent de superbes objets - et de contempler. Mon coffre de montres est avant tout mon musée privé. Que j'ouvre pour moi.
- Quand avez-vous commencé à acheter?
- Adolescent, dans le milieu des années quatre-vingt, à Naples. J'avais vu dans une vitrine une Chrono Breitling qui marquait le début d'une nouvelle époque. Elle était bien trop chère pour moi. J'ai alors acheté une Bulova qui coûtait l'équivalent de 300 euros. J'étais très fier. Carrément heureux. C'est à cette époque qu'a commencé à paraître la première revue spécialisée en montres d'Italie. J'en connaissais chaque page. Ensuite, j'ai acheté ma première Rolex. Une Rolex Explorer II, très difficile à trouver. Il y en a eu d'autres, de différentes marques, et puis mes choix se sont affinés. J'ai ainsi, je crois, réuni la plus belle collection de montres Longines, une centaine de pièces. Et finalement, je me suis concentré sur des pièces que je juge au-dessus de toutes les autres.
- Les Patek Philippe, donc...
- Oui, c'est de l'art pur. Mes choix portent sur des modèles en acier, or gris ou platine. Jamais d'or jaune! Et sur une époque, les années 1940-1950. Parce que ces montres-là réunissent trois choses: le meilleur design en termes de dimensions et de proportions, les calendriers perpétuels et la couleur blanche. C'est rare.
- Qu'y a-t-il de si fascinant dans un calendrier perpétuel?
- Outre la technique, l'idée qu'une montre fabriquée il y a cinquante ans avait prévu le jour d'aujourd'hui, qu'elle le porte en elle depuis la première seconde où elle s'est mise à fonctionner. Symboliquement, cette montre vous dit que vous êtes au bon endroit au bon moment.
- Et pourquoi l'acier plutôt que l'or jaune?
- C'est beau. Et c'est rare. Prenez la 1518, le chronographe de Patek Philippe, produit entre 1941 et 1954. Il en a été fait 281 pièces en or jaune. En acier? Seulement quatre. Qui ne doivent leur existence qu'à la double difficulté, pendant la guerre, de trouver de l'or à travailler puis des clients pour cela. L'acier, considéré comme une matière non noble, était un pis-aller. Résultat: aujourd'hui, le modèle en acier vaut environ six fois le modèle en or.
- Et donc vous possédez l'un des quatre exemplaires dans votre «musée privé»?
- C'est bien possible...
- Quelles sont les qualités requises d'un collectionneur de montres haut de gamme?
- La patience, la diplomatie. J'ai appris à attendre, à instaurer le climat de confiance nécessaire à celui qui envisage de se défaire de l'objet que vous convoitez. Je peux passer plusieurs années sans rien acheter, par exemple.
- Les montres vintage que vous recherchez sont suisses. Se trouvent-elles en Suisse?
- Rarement. Mais c'est en Suisse que s'est écrite leur histoire et qu'ont lieu les ventes aux enchères. C'est à Genève que je retrouve de vrais passionnés, avec qui je peux parler pendant des heures d'un modèle particulier.
- D'où viennent ces collectionneurs?
- Des collectionneurs, il en existe beaucoup, mais ceux qui possèdent de petites collections effectivement exceptionnelles sont peu nombreux. L'Italie,où se trouve la majorité d'entre eux, en compte environ dix. Résultat de ce goût italien pour les beaux objets, pour un certain raffinement... Pour le reste, il s'agit surtout de Japonais, particulièrement amateurs de Rolex, et d'Américains.
- Comment voyez-vous l'avenir de ce marché de l'horlogerie très haut de gamme?
- Le marché est très haut pour les très belles pièces. Et pourtant, je doute qu'il baisse. Il existe plus de probabilités qu'il explose lorsque les nouveaux collectionneurs, Chinois ou Russes, y viendront. Pour le moment, ces gens n'achètent pas de montres anciennes. Pour eux, ce sont des vieilleries! Ils veulent du neuf, dont la valeur soit instantanément visible. Mais ça changera. Forcément, ça changera. Tant pis, tant mieux? Mes montres vaudront encore plus, mais en acheter de nouvelles sera hors de mes moyens... Tout ce que je sais, c'est que pour rien au monde je vendrai ma 1518 acier à Roman Abramovitch!
- Même si la sagesse recommande de «ne jamais dire jamais»?
- J'achète des montres par passion, j'y mets beaucoup de mon argent, mais je n'achète pas dans l'idée de profit. Ce n'est pas mon job. Si je vendais une pièce, ce serait pour une autre, afin d'améliorer ma collection. Je poursuis une logique de collectionneur, pas de spéculateur.
- Pour acheter quelle pièce, par exemple?
- Par exemple le chronographe acier Oversize de Patek Philippe, référence 530. Il n'y en a que cinq ou six dont on connaisse l'existence. L'un d'entre eux sera vendu aux enchères, chez Christie's, à Genève, dans quelques jours.
- Vous vous retrouverez donc à Genève parmi d'autres importants collectionneurs. Remarquez-vous un point commun entre vous tous, outre les montres?
- ... (Il réfléchit longuement). Oui. Il s'agit, dans tous les cas, de grands timides.
Vente aux enchères de montres. Genève, Christie's, Hôtel des Bergues, 17 nov. à 10h, 14h et 17h http://www.letemps.ch/template/supplement.asp?page=19&article=243226 _________________ Contraria contrariis curantur. (Les contraires se guérissent par les contraires).
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ppp Animateur
Nombre de messages : 1215 Date d'inscription : 10/05/2008
| Sujet: Re: Actu : «Montres, objets secrets...» Mer 5 Nov 2008 - 9:02 | |
| - Citation :
- - J'achète des montres par passion, j'y mets beaucoup de mon argent, mais je n'achète pas dans l'idée de profit. Ce n'est pas mon job. Si je vendais une pièce, ce serait pour une autre, afin d'améliorer ma collection. Je poursuis une logique de collectionneur, pas de spéculateur.
Rien à rajouter |
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grosseiko Passionné de référence
Nombre de messages : 3466 Localisation : Gironde Date d'inscription : 27/10/2008
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Jazzman Membre super actif
Nombre de messages : 304 Age : 47 Localisation : 73 Date d'inscription : 03/01/2007
| Sujet: Re: Actu : «Montres, objets secrets...» Mer 5 Nov 2008 - 10:50 | |
| c'est bien amené, je trouve sa démarche vraiment Un vrai passionné |
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Ay90 Membre très actif
Nombre de messages : 152 Age : 43 Localisation : Paris 17 Date d'inscription : 03/11/2008
| Sujet: Re: Actu : «Montres, objets secrets...» Mer 5 Nov 2008 - 21:08 | |
| ".... Mais tout enfant, je me souviens que j'aimais avoir quelque chose de petit et lourd dans ma poche. Un objet discret, de valeur, connu de moi seul, qui m'apportait un sentiment agréable et joyeux de confiance en moi. Est-ce grave, docteur? .... "
Je ne suis donc pas le seul !!! c'est rassurant !!! |
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manu 68 Animateur Chevronné
Nombre de messages : 1459 Date d'inscription : 28/05/2007
| Sujet: Re: Actu : «Montres, objets secrets...» Mer 5 Nov 2008 - 21:23 | |
| - Citation :
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- La patience, la diplomatie. J'ai appris à attendre, à instaurer le climat de confiance nécessaire à celui qui envisage de se défaire de l'objet que vous convoitez. Je peux passer plusieurs années sans rien acheter, par exemple.
Une grande leçon de savoir-vivre et d'élégance, comme quoi passion et raison peuvent faire bon ménage ! |
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Invité Invité
| Sujet: Re: Actu : «Montres, objets secrets...» Jeu 6 Nov 2008 - 0:31 | |
| Intéressant que ce monsieur ait fait la démarche Longines puis Patek. C'est dire quelque part tout l'intérêt en collection des montres de St Imier. Belle conversation. Å |
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