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Suivez le mouvement !

Le montage d’un prototype permettra d’effectuer la batterie de tests nécessaires à la qualification du calibre. Crédits photo : (Éric Sander)

Voici, en exclusivité, le nouveau chrono à affichage central développé par Cartier. Un calibre d'exception qui aura nécessité trois ans de travail. Reportage, en Suisse, au cœur de la manufacture.


Créer un mouvement mécanique de haute horlogerie n'est pas une mince affaire, et toutes les marques ne s'y risquent pas. Du premier dessin esquissé à la main jusqu'à la réalisation finale du prototype qui validera la série, différentes étapes sont nécessaires pour mettre en œuvre les complications et l'affichage des informations temporelles.

Pour mieux comprendre les rouages de cette création « de l'infiniment petit », nous nous sommes rendus à la manufacture Cartier située en Suisse à La Chaux-de-Fonds, une ville dont le cœur économique bat au rythme des grandes maisons horlogères.

Comme nous l'explique Bernard Fornas, son président : « Cartier crée des montres à complications depuis des décennies. Mais comme nous sommes le numéro un mondial de la montre de joaillerie, notre compétence en matière de haute horlogerie est souvent passée inaperçue au profit de notre savoir-faire en ce qui concerne les "pièces de joaillerie qui donnent l'heure". L'autre facteur qui explique aussi notre faible notoriété dans ce secteur réside dans le fait que nous fabriquons peu de pièces compliquées dans la Collection Privée Cartier Paris et, le plus souvent, en séries limitées. Nos garde-temps d'exception étaient la plupart du temps déjà vendus à des collectionneurs avant même d'être produits. C'est pourquoi j'ai voulu mettre en place, il y a trois ans, une nouvelle politique pour accélérer le développement de notre offre haute horlogerie. Et, de fait, aujourd'hui, nous sommes capables de produire des pièces compliquées en plus grand nombre pour répondre à la demande sans cesse croissante. Pour ce faire, notre manufacture a été pensée et réorganisée pour s'adapter très rapidement aux fluctuations des différents marchés et pour répondre précisément à une demande qui serait plus forte sur tel ou tel modèle.

Dans un souci de satisfaction de nos clients, l'accent a également été mis sur la fiabilité, la durabilité et la qualité irréprochable des mouvements et des boîtiers dont nous maîtrisons en interne les processus de fabrication.

Notre objectif : devenir un des leaders incontestables de la haute horlogerie dans les cinq ans à venir. Et je suis sûr que la créativité et la technicité de nos équipes associées à la fiabilité de nos produits nous donnera dans ce domaine aussi l'image d'excellence qui a fait notre réputation dans nos autres métiers. »

Si les propos de Bernard Fornas ont le mérite d'être clairs, ils deviennent limpides une fois que l'on pénètre dans la manufacture Cartier de La Chaux-de-Fonds. Avec quelque 30 000 mè tres carrés et plus de 1 000 personnes sur place, la maison s'est visiblement donné les moyens de ses ambitions. De la création au prototypage, de l'édition limitée à la grande série, c'est une mécanique parfaitement huilée que déroulent en ces lieux les maîtres horlogers et les ingénieurs. Car c'est ici que se conçoivent et s'imaginent les mouvements de demain.

C'est notamment le cas du Calibre 9907 MC, l'un des derniers nés de la maison que Le Figaro Magazine vous présente ici en exclusivité puisqu'il ne sera officiellement dévoilé que la semaine prochaine au Salon international de la haute horlogerie, à Genève.

Etape 1 : la création

Au commencement était le brief. Pour le calibre 9907 MC, il était plutôt simple : concevoir un chrono avec un affichage différent. Comme le précise Carole Forestier, la grande prêtresse des complications chez Cartier : « Plus la demande est simple, plus le travail est compliqué. » Commencent alors les différents dessins et esquisses pour, dans ce cas précis, sortir des sentiers battus et trouver une vraie originalité. Une fois imaginé et choisi cet affichage particulier (ici avec deux cadrans superposés) vient alors la constitution de l'équipe de travail composée d'ingénieurs et d'horlogers représentant les différents corps de métier : conception, fabrication, décors, assemblage, réglages, contrôle qualité.

Etape 2 : la modélisation

Cette étape, qui caractérise la définition virtuelle de toutes les pièces du mouvement par ordinateur, dure environ six mois. Elle permet, grâce au logiciel 3D, d'effectuer les différents calculs et toutes les simulations nécessaires, notamment pour ce qui concerne les frottements, les frictions, les forces et l'usure des pièces dans le temps. Vient ensuite la réalisation d'une maquette en Plexiglas à l'échelle x 15 qui permet de concrétiser ce travail et de vérifier « en réel » la cinématique du mouvement. A noter que cette maquette servira également au moment de la construction du prototype, puisqu'elle indiquera à l'horloger l'ordre de montage des différents éléments.

Etape 3 : le dossier de fabrication

Etape importante du processus, ce dossier est un peu comme l'acte de naissance du calibre. Il indique les spécifications techniques indispensables à la fabrication de toutes les pièces du mouvement. On y trouve les plans, les schémas de montage, les éclatés et aussi l'indispensable plan de lubrification.

Qu'il s'agisse d'une pièce fabriquée spécialement pour le modèle ou d'un micro-élément standardisé, les 272 pièces constitutives sont précisement disséquées comme suit : taille, épaisseur, dureté, matière, traitement, surface, garnissage, décor... A ce moment-là, la forme et la taille du boîtier peuvent être décidées puisque l'on connaît avec précision le diamètre et l'épaisseur du calibre. Débute, dans le même temps, le développement de l'habillage : boîte, cadran, aiguille, bracelet, fermoir.

Etape 4 : le prototype

Pas moins de neuf mois seront nécessaires pour la mise en fabrication des pièces en petite série qui permettront le montage du prototype et la batterie de tests qu'il devra subir avant d'être validé.

Car au-delà des tests de fonctionnement classique, il devra aussi faire preuve d'une résistance irréprochable aux chocs, au vieillissement, à l'usure, aux champs magnétiques, aux écarts thermiques et climatiques.

En parallèle sont réalisés tous les outils et posages spécifiques au calibre.

Etape 5 : la production

Une fois le prototype certifié viennent alors la production en série du calibre, sa décoration, son assemblage et son emboîtage.

Il aura donc fallu pas moins de trois ans pour que du brief créatif initial à la production finale en série naisse la Rotonde Chrono Central, une montre Cartier dont l'affichage très particulier est conforme à la demande originelle. Une fois de plus, la créativité de la maison sort vraiment de l'ordinaire.

http://www.lefigaro.fr/lefigaromagazine/2009/01/17/01006-20090117ARTFIG00166--suivez-le-mouvement-.php