En 1904, James Favre neveu de Georges Favre Jacot en voyage aux Etats-Unis est chargé de lancer la marque sur le territoire américain. Le marché y est difficile d’une part, en raison des mesures protectionnistes et des taxations qui en découlent pour les importations d’horlogerie et d’autre part, en raison de la vive concurrence que représentent des marques comme Hamilton, Elgin ou Waltham qui sont en plein essor. Cela n’arrête pas la dynamique expansionniste de la manufacture. Les montres ZENITH sont distribuées sur le marché américain dès 1905. Leurs mouvements sont améliorés spécialement pour ce marché et les finitions en sont adaptées.
Les marques américaines fondent pour beaucoup leur communication sur la présentation des mouvements qui tranchent visuellement avec le laiton des calibres Suisses. La clientèle Américaine a été habituée par les marques traditionnelles américaines comme Waltham, Hamilton ou Elgin à des calibres rhodiés très décorés, damassés ou finement gravés et guillochés et bien empierrés. Si la production de la manufacture du Locle est d’un niveau de qualité incontestable pour la précision de ses montres, il lui faut se placer au « niveau visuel » de la concurrence.
Les mouvements livrés sur place sont donc « décorés à l’américaine » avec des motifs décoratifs aussi variés que divers et des pièces d’une qualité supérieure pour « tirer » les collections. Les mouvements les plus haut de gamme dits de type prima, bénéficient d’un large empierrement barillet compris et de pas moins de 8 « adjustments » dont deux opérés en fonction de la température. Une raquetterie plus « tape à l’œil » et parfaitement efficace fait la même année, l’objet d’un dépôt de brevet. Elle restera très longtemps inscrite dans la fabrication des montres et sera même adoptée pour les montres bracelets jusqu’aux années 60.
La conquête de l’Amérique passe par la qualité, des prix d’attaque et une distribution auprès de revendeurs ayant pignon sur rue. Edmond E Robert « a Maiden Lane » sera à New York l’un des détaillants les plus actifs de la marque multipliant les publicités dans la presse pour vanter ZENITH notamment en 1909 après que la marque eut reçu le plus grand palmarès de récompenses dans les concours de l’observatoire de Neuchâtel.
James Favre bien entendu ne s’arrêtera pas à l’aspect esthétique des calibres et aux améliorations techniques. S’il revient notamment impressionné par la qualité des montres fabriquées outre Atlantique, il l’est aussi par leurs prix et le niveau élevé d’implantation des firmes horlogères Américaines. Fasciné par l’organisation qu’il a constatée, il en déduit que les locaux du Locle ne sont pas adaptés à une distribution rationnelle des tâches et qu’il faut donc construire de nouveaux bâtiments, il souhaite ensuite se pencher sur le rendement. Les Américains chronomètrent les taches des ouvriers et des ouvrières et les obligent à des volumes de travail en un temps donné. La méthode permet des gains de productivité et une baisse des coûts indispensable pour conserver sa position sur les marchés
Il y voit une concurrence sérieuse et un frein potentiel au développement de l’entreprise. Il propose de réagir au plus vite et repart aux Etats-Unis avec directeur technique de la manufacture pour visiter les usines des grandes marques.
Le calibre Zenith manifestement bien conçu, moderne et fiable permet de conquérir des marchés et d’affronter la concurrence tant Suisse qu’Américaine qui à travers le monde a entamé et parfois conforté une implantation massive. La manufacture doit s’adapter à ces marchés et démontre une capacité d’innovation qui lui assure une présence mondiale et une stature de grande manufacture. Elle n’hésite pas à faire évoluer son mouvement fétiche et à le protéger par des brevets qui viennent d’ailleurs s’afficher sur les ponts du mouvement.
Zenith devient alors une marque mondialement distribuée et reconnue tournant une page essentielle de son histoire
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Contraria contrariis curantur. (Les contraires se guérissent par les contraires).