Le dernier des poilu nous a quitté aujourd'hui... Il y aurait mille et une façon de lui rendre hommage et de penser un peu à tout ces que ses camarades ont représenté. Je ne connais que celle-ci...On est à à Metz en 1916. Rose est infirmière à l'hopital militaire. Les petits pavillons situés à coté du grand hopital construit depuis sont alors le centre de l'établissement. Mal éclairées, les chambres sont prévues pour 4 à 8 lits mais la guerre déverse chaque jour son lot de blessés. Du coup, les plus petites chambres logent 6 blessés et les grandes ne comptent pas moins de 10 lits. Les couloirs sont eux mêmes en surpopulation.
La médecine de guerre est une médecine dure faite de blessures profondes et de sinistres amputations. Les patients mettent du temps à comprendre ce qui leur est arrivé. Ils leur faudra des années pour s'admettre dans leur corps irréversiblement transformé par la guerre.
Personne ne se plaint car si on est là, c'est qu'on a échappé à la mort.
Jean Calmond est un jeune miltaire venu de Bretagne, son grand-père était anglais et s'était installé en France en 1872. Jean a maudit cette installation quand la guerre s'est déclarée mais finalement, il serait quand même venu se battre quand l'Angleterre s'est engagée, alors il sert sous le drapeau Français mais là n'est pas l'essentiel.
Jean a 21 ans ce 21 mars et le voilà, ici dans cet hôpital, au milieu des blessés tombés comme lui dans la boue, sous les balles de l'armée Allemande. Jean est blessé au visage, une joue arrachée, sa jambe aussi est perdue, il a en outre respiré ce dévastateur gaz moutarde qui lui ronge les poumons. Il vient de traverser 17 jours de coma et c'est Rose qui l'a pris en charge. Il avait sur lui peu de choses à son arrivée. Sa montre, une Omega en acier, un couteau pliant en bois, son livret militaire et une photographie avec ses parents et celle de Juliette, pas encore sa fiancée mais à l'image de laquelle il s'est rattaché depuis le 2 juin 1915 quand il a quitté la maison familiale.
Le réveil de Jean s'est fait progressivement. Il a au pied gauche qu'il a perdu, cette douleur qu'il voudrait qu'on lui appaise. Il ne sait pas encore qu'il n'a plus son pied et Rose détourne le regard quand il lui dit qu'il pourra vivre même s'il est moins beau mais qu'il n'aurait pas supporté de perde ses jambes.
Ce 21 mars est le jour choisi par le médecin pour retirer le pansement qui dissimule son visage. Rose est chargée de cette délicate mission. Son patient a peine à parler mais ses propos sont intelligibles. Rose mesure l'ampleur du désastre sur cette joue à jamais détruite et quand Jean demande un miroir, elle prétexte que le médecin a préconisé d'attendre...
Il faudra 8 jours à Jean pour trouver ce miroir. Il l'achétera par l'intermédiare du père d'un blessé qui vient chaque semaine visiter son fils mourrant. Pour payer son acquisition, Jean offre sa montre mais le père de son camarade de chambrée refuse cette contrepartie ...
Quand Jean découvre son visage, il est seul, isolé au milieu des 7 autres impotants, incapable de parler ou de se lever. Sans rien dire ni même pousser le moindre gémissement, il se coupe les veines avec son couteau et attends patiemment la mort en replacant ses poignets sous les draps.
Sur la table de nuit, il a laissé sur une lettre quelques mots avec sa montre. "Pour vous, Rose. Puisse cette montre vous donner du bon temps"
Rose a gardé cette montre sa vie durant et cette histoire est la seule qu'elle acceptait de raconter pour évoquer cette sinistre période.