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L’infiniment précis
 Horlogerie | François Meyer fait cliqueter les combinaisons du coffre-fort dans le laboratoire de chronométrie de l’Observatoire de Besançon. Dans ce local exigu, une dizaine de personnes retiennent leur souffle: l’ingénieur de l’équipe Temps-fréquence sort délicatement une mallette en plastique. Il la pose sur une table, ouvre le couvercle. Une vingtaine de montres apparaissent, encastrées dans des alvéoles de mousse noire. De fort belles montres, sans aucun doute, mais que l’œil du profane ne distinguerait guère des modèles exposés dans les vitrines des bonnes bijouteries.


Laurent Aubert 20.06.2011 |

François Meyer fait cliqueter les combinaisons du coffre-fort dans le laboratoire de chronométrie de l’Observatoire de Besançon. Dans ce local exigu, une dizaine de personnes retiennent leur souffle: l’ingénieur de l’équipe Temps-fréquence sort délicatement une mallette en plastique. Il la pose sur une table, ouvre le couvercle. Une vingtaine de montres apparaissent, encastrées dans des alvéoles de mousse noire. De fort belles montres, sans aucun doute, mais que l’œil du profane ne distinguerait guère des modèles exposés dans les vitrines des bonnes bijouteries.

Le laboratoire et ses instruments, le coffre-fort, la mallette-écrin, les gestes lents et précis de François Meyer sont autant d’indices de la valeur inestimable de ces pièces. Ces dix-huit montres participent en effet à l’édition 2011 du Concours international de chronométrie organisé en Suisse. Présentées par des manufactures et des élèves horlogers, elles ont été montées et réglées avec un soin extrême, dans l’espoir de remporter cette course à la précision réservée aux montres mécaniques.

Président du comité d’organisation, Claude-Henri Chabloz explique: «Ces pièces sont en train de subir des épreuves de régularité qui correspondent aux normes en vigueur pour les chronomètres.» Les mesures menées par l’Observatoire de Besançon seront répétées par le Contrôle officiel suisse des chronomètres à Bienne. Et renouvelées après les épreuves de choc et de résistance aux champs magnétiques effectuées à la Haute Ecole d’ingénieurs du Locle.

François Meyer replace la mallette dans le coffre-fort. Mais pas n’importe comment: debout sur le côté droit. En effet, les montres vont reposer durant 24 heures dans une position donnée avant d’être vérifiées. Puis elles seront changées de position et une nouvelle mesure sera effectuée au bout de 24 heures.

Tests durant quinze jours

«Les montres sont testées durant quinze jours, explique Claude-Henri Chabloz. Chaque mesure va déterminer un état et la différence entre chaque état donne la marche pour chaque position.» Si l’une des marches excède la norme officielle – par exemple entre –4 et +6 secondes pour la «marche diurne moyenne» – la montre est éliminée. Des points sont attribués pour chaque critère, avec un total de 1000 points. En 2009, le vainqueur, une Master Tourbillon de Jaeger-LeCoultre, avait obtenu 909 points.

François Meyer se penche sur un microscope équipé d’un capteur optique: «Les montres sont placées sur cet instrument pour chaque relevé. Le capteur détecte le passage de l’aiguille des secondes et le compare avec les données des trois horloges atomiques de l’Observatoire.» Par rapport aux bancs officiels suisses largement automatisés, le dispositif est artisanal. C’est que le contrôle des chronomètres n’est plus qu’une activité annexe pour l’Observatoire qui consacre l’essentiel de ses activités à la recherche et à des prestations pour l’industrie. «Sa participation au Concours est une reconnaissance du rôle joué par l’industrie française dans la chronométrie, indique Charles-Henri Chabloz. Elle accroît également la crédibilité des mesures.»

Renouveau franc-comtois

Lors de sa création en 1883, l’Observatoire avait pour vocation première de vérifier les pièces fabriquées par les manufactures franc-comtoises. Au pied de la lunette méridienne, long tube noir cerclé de laiton, François Meyer explique comment les astronomes recalaient les horloges en observant l’heure de passage de diverses étoiles devant l’instrument. «Les mesures étaient effectuées chaque fois que la météo le permettait.» Pour gagner du temps, la lunette était équipée de cercles repérant la position de chaque étoile. L’étalonnage de ces cercles a duré trois ans à lui seul.

Dans le parc verdoyant qui entoure l’Observatoire, les archives font pendant à la lunette méridienne. Outre les résultats des observations effectuées jusqu’à la fin des années 60, l’édifice abrite le «puits aux horloges» où les trois horloges mère de l’Observatoire étaient conservées à des conditions de température et d’humidité aussi constantes que possible afin de préserver leur régularité. Fabriqués par la maison bisontine Leroy, ces instruments étaient alors le nec plus ultra d’une industrie horlogère française qui régatait avec sa concurrente suisse.

Symbole de l’horlogerie mécanique de prestige, Leroy a été sortie récemment de la léthargie dans laquelle l’avait plongée l’avènement des montres à quartz au début des années 70. Les Ateliers L. Leroy, installés en voisins à la rue de l’Observatoire à Besançon, présentent cette année une de leurs pièces au Concours. Dans la catégorie «Entreprise - Tourbillon», l’Osmior Régulateur Automatique se mesurera aux créations de marques suisses aussi prestigieuses que Chopard, Frédérique Constant ou Journe, notamment. Sans préjuger du classement qui sera proclamé le 20 octobre, cette participation française est un signe encourageant pour l’internationalisation du Concours souhaitée par ses organisateurs.

http://www.tdg.ch/infiniment-precis-2011-06-20

René Gygax, chronométrier officiel de Zénith, dénonce justement la perte de crédit scientifique des épreuves, en dénonçant les conséquences du nouveau règlement qui est: "un contrôle statistique des éléments fonctionnels et de ceux qui leur conservent, dans différentes conditions, leurs propriétés, en test de positions, thermique, dynamique, (...°, opéré sur la production de montres de même fabrication que celles dispos chez les détaillants, ce n'est plus un concours", puisque les résultats feront désormais l'objet d'un tableau anonyme, et en effet depuis 5 ans, on ne parle plus de premier prix, mais de "prix de chronométrie" pouvant être attribué au mérite et non, seulement, sur la base des résultats net.

Source: La revue des montres, Mai 2011, Joël JIDET