Il y aura eu 50 pièces en platine en 2008 et autant en or rose l'année suivante. La date rétrograde fut une complication éphèmére dans la production Zenith. A cela il y a plusieurs explications. Il est toujours difficile à chaud ou presque d'expliquer pourquoi un modèle n'est plus fabriqué ou une complication n'a pas reçu de continuité dans sa production.
Il faut pour le comprendre revenir un peu en arrière. Quand Thierry Nataf reprend en main Zenith, le El primero est sur la sellette. On imagine même au sein de Zenith de le remplacer complètement au profit du Elite sur lequel on viendrait poser un module de chrono qui lui donnerait un aspect visuel identique au El Primero. L'idée est si évidente que le Elite voit sa trotteuse placée à 9 heures comme sur le El Primero. Le premier communiqué de presse sur le Elite repris par la presse allemande annoncera même la prochaine sortie de modules tels la réserve de marche, le second fuseau , la lune et le chrono... Le Elite est un tracteur réputé apte à "tirer" toutes les complications. Le El Primero est compromis car son diamètre n'est plus en adéquation avec l'inflation galopante sur le diamètre des montres. Sur des versions de 42, 44 ou 45 mm , le El Primero donne l'impression que ses compteurs louchent. Thierry Nataf voit pourtant dans ce calibre un potentiel qui implique de faire sur lui le pari industriel de l'avenir de Zenith.
Il faut trouver le moyen de l'élargir et de supprimer ce trop faible écart des compteurs. Plusieurs pistes vont alors être explorées. La première est de poser une double platine et de placer des roues qui renvoient les aiguilles de trotteuse et de totalisateur des minutes de quelques millimètres. Les simulations sont catastrophiques sur l'épaisseur du mouvement réputé être l'un des plus plats. Dans le même temps, plusieurs solutions de compteurs en trompe l’œil sont testées. On les retrouvera plus tard quand en 2009, on reprendra les compteurs superposés des versions de 1969 dans les New Vintage. La réflexion est un peu en plan courant 2002.
En 2003, Zenith présentera pourtant la version Open de son calibre mytique le El Primero. L'ouverture du cadran est une idée de Thierry Nataf qui trouve sympathique de voir le calibre par le fond de la montre mais dommage de n'avoir aucune perspective mécanique une fois le mouvement au poignet. Il propose donc de faire ouvrir le cadran. Le premier essai montre une platine pleine qu'il va falloir retravailler pour la rendre présentable. Les premiers essais ne sont pas positionnés à l'endroit précis où ils seront finalement retenus. On est davantage sur le centre du cadran et pour cause, il y a le disque dateur qui interdit d'aller à mois de 7 mm du bord de la montre. Le disque en effet, fait tout le tour du cadran et sa circulation doit être libre pour permettre le changement de date.
Le spectacle n'est pas assez animé et il est demandé aux ingénieurs de Zenith d'ouvrir la platine et de permettre de voir le balancier et les trains de rouage au droit de celui-ci. Thierry Nataf se souvient alors de son souci de placer en trompe l’œil, une caractéristique visuelle qui évite au cadran de donner cette impression que les compteurs louchent. L'ouverture devra tirer vers l'extérieur et donc ne pas être ronde mais d'une forme qui casse cette impression de trop grand centrage. Cela suppose de recalculer la résistance de la platine et des ponts pour éviter une déformation connue des gens qui squelettent les calibres et savent que certains points doivent être préservés. Ce que demande Thierry Nataf à ses troupes n'est ni plus ni moins qu'un squelettage partiel de la montre. Le résultat arrive quelques semaines plus tard avec un premier essai qui bluffe les équipes de Zenith. Ce petit balancier qui bat à 36 000 alternances visible à tout moment s'avère spectaculaire bien davantage que vu par le fond du calibre où la masse oscillante vient se placer à chaque fois qu'on veut le voir juste au dessus.
Le prix à payer de cette visibilité est la perte de la date. L'enthousiasme est fort autour de cette version Open et la date est rapidement sacrifiée sur l'autel de la transparence. Par contre, les ingénieurs de la manufacture ont une "fonction" qui depuis quelques années leur semble difficile à placer et qui ne suppose que très peu d'adaptations du calibre, c'est la réserve de marche. Celle-ci s'afficherait par une aiguille sur l'axe central porteur des aiguilles d'heures, de minutes et de trotteuse de chrono et ajouterait en épaisseur du mouvement et viendrait se superposer sur le totalisateur des heures et en rendrait la lisibilité assez aléatoire.
La réflexion est rapide, les cadres réunis dans la salle de réunion entendent tomber comme un couperet la suppression de ce totalisateur. L'idée est audacieuse et si nous sommes aujourd'hui habitué à celle-ci, à l'époque le cadran Zenith avec ses compteurs positionnés en 3,6,9 est une sorte de légende horlogère quasiment intouchable.
Des essais sont donc fait avec des cadrans open, sans totalisateur des heures. Là encore l'idée est lumineuse d’intérêt. Non seulement On gagne une fonction en plus avec la réserve de marche mais en plus le spectacle du balancier qui oscille à une vitesse fulgurante de 36 000 alternances par heure s'avère plus "visuel" que prévu. Les premières Open sont présentées à Baselwolrd...
Il restera un peu de travail pour polir les balancier sur la partie visible du cadran ( le polissage des deux cotés est très compliqué) et à arrondir les pointes de vis laissée au regard. Le bouchonnage de la platine sera aussi perfectionné. Le succès de cette version Open est malgré tout immédiat et crée une nouvelle image à zenith qui dépoussière ainsi quelques années de design jugé trop classique.
Très vite les amateurs de Zenith demandent une date sur leurs open... Le travail s’opère dans deux directions :
-Une date rétrograde chère à produire mais extrêmement fiable
-Une grande date
Zenith produit en test la date rétrograde sur une boite en Platine avec un cadran en or 18 carats et n'en fabrique que 50 exemplaire. C'est le calibre 4023. Par ailleurs la grande date trouve sa place à 6 heures et n'est pas compatible avec la version open. Il faut donc retravailler le sujet et trouver le moyen de déplacer cette grande date à 2 heures pour qu'elle ne gène pas l'ouverture placée de l'autre coté. Ce sera chose faite en quelques mois.
La date rétrograde est une innovation extrêmement intelligente. Les premiers essais de cadrans montreront à quel point il est difficile de calculer le dessin du cadran pour que l'aiguille de date tombe pile sur le jour. Mais l'idée reste absolument géniale. Le jour est indiqué par une aiguille qui pointe sur le cadran où a été dessiné un arc épais avec la mention d'un jour sur 2, l'autre étant symbolisé par un point. Une aiguille en or rose vient se positionner sur la date. Une fois arrivée au 31, l'aiguille se replace à 0. La date est un système rapide, à saut instantané qui se règle comme sur une version classique du mouvement.
Les premiers modèles édités en 50 exemplaires sont en platine dans des boites de 45 mm et 40 mm. Voici une petite présentation de la version 40 mm. Son cadran est en or gris comme ses index en or noir et ses aiguilles. La densité du platine et l'épaisseur de la boite en fond une pièce assez lourde mais d'un confort au porté qui est excellent. La version 45 mm est, comme toutes les très grandes montres, plus difficile à placer sous la manche de chemise mais la forme arrondie des cornes contribue au confort des deux versions. La lisibilité souffre, comme sur toute pièce, de la basse luminosité d'autant que les aiguilles renvoient en faible lumière le même reflet, quelle que soit la couleur. Ce sera le seul petit défaut de cette montre qui est une pièce sublime, très bien faite, réputée fiable. Zenith la déclina en or rose en 2009, hélas sans aucune publicité ni catalogue. Réalisée par le département de haute horlogerie, la finition est parfaite, la boite d'une qualité exceptionnelle, il n'a pas été négligé d'y mettre beaucoup de métal précieux.
Joël Jidet pour Forumamontres - Droits réservés - Novembre 2011- Remerciement à JR pour son prêt.