La révision d'une montre de poche implique une certaine humilité... et pas trop d'exigence sur les résultats chronométriques. La restauration et restitution des performances d'origines d'une montre de poche exigent d'autres qualités: opiniâtreté pour trouver l'horloger compétent acceptant de faire ce travail, prodigalité pour régler la note (qui peut dépasser la valeur de la montre) et accessoirement patience car l'attente peut être longue.
Je parle en connaissance de cause, travaillant chez un de ces "fous" qui s'amusent à faire des équilibrages dynamiques et à régler toutes positions des vieilles poches de cent ans et plus. Je ne l'ai jamais vu rendre une montre de poche à ancre au delà des 10s (plutôt moins). Le surcroît de travail pour y parvenir n'est pas négligeable et si la plupart des horlogers s'en dispensent il y a plusieurs raisons. Premièrement le plupart des clients ont déjà du mal à accepter un devis de révision "basique" alors facturer une journée de boulot en plus pour grapiller quelques secondes, c'est difficile à faire comprendre au client. Deuxièmement, quand on révise une montre de poche on travaille bien souvent pour que la montre finisse dans un tiroir ou au coffre et dans le meilleur des cas pour un porter occasionnel. Dans ces conditions l'intérêt de se casser le c*l pour que le client ne voit même pas la différence peut échapper à certains. Dernière raison: la flemme! C'est pas facile le réglage, c'est subtil et ça peut prendre du temps, alors il est tentant d'éluder la question en disant au client "C'est une vieille montre, on ne peut pas faire mieux comme réglage".
Concernant les rubis, le fait qu'une montre avec une pierre remplacée par un bouchon ait de bonnes performances chronométriques n'est pas un argument en soi. D'une part, cela pourrait être une simple coïncidence, d'autre part la fonction des rubis n'est pas d'augmenter la précision mais de supprimer l'usure des paliers et de diminuer les pertes de force par friction des pivots. Le palier en laiton ne pose de problèmes qu'une fois qu'il s'est usé; tant qu'il est en bon état il ne diminue pas la précision.
Cependant le raisonnement de Zénith en 1902 a une certaine valeur, en effet, sur les montres de poche l'empierrement du barillet et de la roue de centre peuvent sembler superflus. Eu égard à la dimension et à la vitesse de rotation de ces pièces il faudra un bon siècle ou plus pour que l'usure de la platine ne devienne problématique et un simple bouchon permettra de repousser le problème de 100 ans de plus!
Ce raisonnement n'est plus aussi valable pour les montres-bracelet ou la dimension des pièces et l'épaisseur des platines est beaucoup plus faible; a plus forte raison sur les montres de dame ou les extra plates. Là, un empierrement du barillet et de la roue de centre sont salutaires pour éviter une usure trop rapide.