Parmi les facteurs qui ont joué à travers le temps pour une conquète toujours plus précise et toujours plus large de l'heure, on trouve d'abord la navigation et le calcul des longitudes, les guerres et le besoins de développer des stratégies "heurées" et coordonnées, les transports collectifs comme le train, l'aviation et la voiture.
Tous ces domaines de prédilection de la recherche du temps exact trouvent à la fin du 19ème et au début du 20ème siècle des développements nouveaux. Ce sont les heures de gloires des montres de poche qui passent du cylindre à l'ancre, de la mesure ordinaire du temps à la précision et de la précision à la chronomètrie.
Les chronomètres de marines deviennent des pièces de très haute précision qui ne pourront jamais être produits en grandes séries même si d'une marque à l'autre, il s'en fait de plus ou moins grands nombres.
Ulysse Nardin sera en Suisse le fabricant dominant de des chronomètres. Aux USA, toutes les grandes marques se livrent à ces fabrications de prestige.
Les guerres, celle de 1870 bien sur mais surtout la première guerre mondiale font passer les montres de la poche au poignet et monter l'heure à bord des avions. Les montres de bord font leur apparition.
Les premières voitures sont très vite équipées de montres de bord qu'on attache au tableau de bord et qui ressemblent furieusement à des montres de poche posées à l'envers.
Les chemins de fers sont évidemment un facteur de développement particulièrement privilégié par les marques qui tenteront de décrocher le maximum de marchés tant la notoriété qu'elles en tireront aura des conséquences sur les ventes des montres distribuées dans les circuits commerciaux.
Le marché du rail américain s'est intéressé aux montres de précision à l'issue d'un accident survenu le 19 avril 1891 près de Cleveland dans l'Ohio. Ce jour là deux trains de voyageurs se télescopent sur une voie unique tuant 9 d'entre eux. L'enquète engagée aussitot démontre que le mécanicien de l'une des machines s'est engagé trop vite à cause de sa montre qui avançait de 5 minutes.
Les compagnies de chemins de fers américaines en tirent immédiatement la conclusion qui leur faut équiper le personnel de montres précises et sollicitent après un accord commun un horloger de Cleveland, Webb C.Ball pour qu'il rédige un cahier des charges avec des normes très strictes en matière de montres de service.
Dès lors les montres des chemins de fers vont être encadrées par un réglement draconien qui impose des calibres de 19 ou 20 lignes à échappement à ancre, à simple plateau comptant au moins 17 rubis et ayant au moins une précision de 30 secondes par semaines ce qui correspond à une précision de chronomètre.
Ces montres seront baptisées "Railroad watch" qui les distingue des "Train watch" qui ne sont que des montres fantaisie dont le fond ou le cadran est orné d'une locomotive.
Il sera ensuite décidé de créer une montre de chemins de fers standard dite "Official RR Standard Watch" (RR pour Rail Road) répondant aux critères visé plus haut auxquels Webb C.Ball ajoute "Réglage aux 5 positions et aux températures de 30 à 95 ° farenheit ( soit -1 à +35°), raquette de réglage fin, double plateau, cadran bien lisible avec heures arabes et fortes aiguilles, remontoir au pendant à 12 heures et donc calibre Lépine, un nombre de 3 chiffres correspondant au grade gravé sur le mouvement ( exemple 992) . Obligation est faite aux cheminots de faire contrôler leurs montres tout les 6 mois.
Dès ce réglement adopté 37 firmes américaines sont agrées pour pour fabriquer ces montres standard dont Hamilton qui lance la Hamilton Railways Special.
Vers 1915, le nombre de fabricants agréés est réduit à 8 dont Elgin, Hamilton, Hampden, Haward, Illinois, Rockford, South Bend et Waltham.
Vers 1920, les calibres 20 lignes sont délaissés par les compagnies de chemins de fers qui se tournent vers les mouvements des manufactures Suisses.
Beaucoup se sont intéressées à ce marché des montres de chemins de fers dès le début du siècle.
Publicité Vacheron et Constantin 1908 L'ensemble des pays adoptent des réglements souvent assez proches des réglements américains et sur le territoire nord américain, nombre de Railroads sont équipées par Omega, ZENITH et Longines.
Omega propose souvent dans ces catégories de montes des calibres cccr tandis que ZENITH fera des séries spéciales de calibres sur ses modèles existants en particulier pour les chemins de fers canadiens.
Calibre OMEGA CCCRCalibre RR56 de ZENITH pour les Canadian RailwaysMontres Omega et ZENITH destinées aux Chemins de fers de Serbie (années 30) Gil Baillod dans un article écrit sur montres passions développe avec brio le thème des montres de chemins de fers. En voici un extrait...
"Vu l’immensité du pays et le rapide développement des chemins de fer, les Américains instituent en 1883 le système de l’heure universelle. La terre est divisée en 24 fuseaux horaires égaux limités par deux méridiens et, en 1884, Greenwich est adopté comme méridien d’origine. Afin de limiter les accidents sur les voies uniques et de tenir un horaire précis, les employés sont équipés d’une montre fournie dès sa création en 1892 par la Hamilton Railway Special. Un modèle de poche Lépine, calibre 19 lignes, ajusté aux températures dans cinq positions, régulateur à vis micromécanique, balancier Breguet, etc. L’origine de la précision de ces montres tient dans le rigoureux service après-vente géré par les chemins de fer et qui va profiter à l’amélioration du calibre. Un service à nul autre pareil dans le monde. Dans toutes les gares terminus se trouve un inspecteur des montres auquel les employés doivent se présenter une fois par semaine avec une carte de comparaison. La montre est confrontée à un chronomètre type de marine de fabrication anglaise, lui-même réglé une fois par jour par T.S.F depuis l’Observatoire de Washington, via la radio de Boston. (En Suisse, les premiers signaux horaires sont transmis par Radio Berne en 1926, d’après l’Observatoire de Neuchâtel.)
La tolérance est serrée: toute variation de 3 secondes des garde-temps est corrigée. Lorsque la marche hebdomadaire dépasse 30 secondes, la montre est remplacée pour être réglée. Une révision générale de celle-ci intervient tous les trois mois et un rhabillage obligatoire tous les dix-huit mois. Les montres sont examinées par un horloger des chemins de fer et leur réparation éventuelle confiée à un rhabilleur officiel agréé par Hamilton. Le rapport d’inspection s’établit en double, une copie va au directeur général des transports et l’autre à l’inspecteur en chef de l’heure, chargé de surveiller plusieurs réseaux. Hamilton Watch est informée de la teneur des rapports, ce qui lui permet d’intervenir au niveau de sa production.
En Amérique, le rail était le symbole de la ponctualité érigée en valeur suprême. C’est donc très naturellement que la firme Hamilton va largement utiliser sa qualité de fournisseur des chemins de fer ainsi qu’en témoigne l’annonce publicitaire parue dans le magazine Collier’s en 1912: «The fastest trains in America run on Hamilton Watch Time» (les trains les plus rapides d’Amérique roulent à l’heure des montres Hamilton), photos de puissants trains à l’appui et 22 portraits en médaillon, non de stars, à la mode d’aujourd’hui, mais de chauffeurs de locomotives et d’employés des trains!"
Crédit images http://elginwatches.org - Collection personnelle - Sources : Gil Baillod pour Montres passion , Voyage à travers le temps de Marco Richon/Omega, ZENITH, Archives privées.