ZEN Rang: Administrateur
Nombre de messages : 57505 Date d'inscription : 05/05/2005
| Sujet: Actu : Le boom des complications 17/1/2009, 10:04 | |
| - Citation :
- Le boom des complications
Frank Declerck 16/01/2009 . Si dans le petit monde des manufactures, personne ne se risque à parler des perspectives de marché en 2009, nombreux sont ceux qui pensent que la très haute horlogerie tirera tout de même son « aiguille » du jeu.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Tel semblait être le credo des grandes maisons horlogères ces dernières années. Toutes rivalisaient d'ingéniosité pour présenter à chaque salon horloger des montres de plus en plus sophistiquées à grand renfort de fonctions plus ou moins utiles. Aujourd'hui, avec une crise financière installée, l'heure est à l'interrogation. La folie des garde-temps à complications va-t-elle se poursuivre en 2009 ? La fièvre acheteuse des collectionneurs avertis et des milliardaires néophytes va-t-elle retomber avec les cours de la Bourse ? Bonnes questions.
A quelques heures de l'ouverture du SIHH de Genève (Salon international de la haute horlogerie), les acteurs du secteur sont presque tous unanimes : la haute horlogerie - pardon, la très haute horlogerie - ne devrait pas trop souffrir du ralentissement de l'économie mondiale. Ces montres à complications, dont les prix atteignent parfois plusieurs centaines de milliers d'euros, pourraient même être le ballon d'oxygène de certaines manufactures qui auront plus de mal - c'est sûr - à écouler sur certains marchés les pièces d'entrée et de moyenne gamme.
Pour Philippe Léopold- Metzger, le président de Piaget, l'analyse est simple. « Les complications mécaniques sont une sorte d'antidote à la surabondance d'hyper-technologie. En fait, ces pièces d'exception semblent être le meilleur compromis entre l'émotionnel et le rationnel. Avec une montre à grandes complications, l'évidence est sous les yeux. Il suffit de voir le spectacle qu'offre un tourbillon - surtout s'il est relatif - pour comprendre la somme de travail et d'expertise qu'il a été nécessaire de déployer pour le concevoir et le fabriquer. » Richard Mille va encore plus loin, puisqu'il avoue ne pas connaître la moindre annulation de commande. « Notre production est structurellement limitée par les technologies de pointe que nous utilisons. Si la crise fait diminuer le nombre de nos clients, ils restent suffisamment nombreux de par le monde pour nous assurer un avenir plus que prometteur. A titre d'exemple, le carnet de commandes pour notre nouvelle montre de plongée est rempli sur plus de dix ans, à raison d'une fabrication de huit pièces par an. » On comprend mieux alors la frénésie des manufactures à proposer des pièces compliquées qui sont autant de défis intellectuels à la micromécanique qu'à l'apesanteur. La montre n'affiche plus des informations temporelles mais le statut de celui qui la porte. Elle ne donne plus l'heure, elle se donne en spectacle. Il suffit pour s'en convaincre de regarder fonctionner un gyrotourbillon de Jaeger-LeCoultre ou la Zero-G de Zenith. Le ballet en suspension des pièces plus petites les unes que les autres est tout simplement fascinant. Il en est de même pour le double tourbillon Breguet qui s'impose, avec sa platine centrale tournante, comme un véritable chef-d'œuvre technique et esthétique. D'autant plus qu'il s'agit, convenons-en, d'une certaine quête de l'inutile puisque l'on sait bien aujourd'hui que l'intérêt d'une cage de tourbillon pour améliorer la précision d'un mouvement mécanique sur une montre de poignet reste très discutable.
Rappelons que cette invention, déposée par Abraham-Louis Breguet en 1801, devait à l'origine compenser les effets de la gravité terrestre sur les calibres des montres à gousset qui restaient le plus souvent en position verticale dans les poches de gilet.
Obtenir un son puissant et cristallin
Qu'importe, la magie opère toujours. Chez Hublot, marque rachetée récemment par LVMH, on a produit pas moins de 282 tourbillons en 2008. Avec cette acquisition, le groupe a d'ailleurs renforcé sa présence sur le marché des montres de très belle facture. C'est un signe qui ne trompe pas, le créneau est porteur. Et, pour Jean-Claude Biver, le sémillant dirigeant de la maison, pas question de baisser les bras en 2009 : « Les vrais amateurs ne vont pas disparaître avec la crise, affirme-t-il, et, chez Hublot, on leur réserve encore de belles surprises puisque l'on présentera, entre autres, une répétition minute à tourbillon au prochain Salon de Bâle. De plus, pour gagner encore en autonomie et en capacité d'innovation, nous construisons pas moins de 6 000 mètres carrés supplémentaires à deux pas de notre manufacture actuelle pour produire encore plus de haute horlogerie tout en créant de nouveaux concepts et matériaux. Cette fusion de la tradition et du futur qui est notre signature est aussi, pour nous, la garantie d'un intérêt sans cesse renouvelé du public. »
L'autre complication qui a les faveurs d'un public averti, et qui est sans doute l'une des plus difficiles à réaliser, est la répétition minute. Elle permet, grâce à un mécanisme complexe de timbres et de marteaux, de connaître l'heure qu'il est non en regardant le cadran de sa montre, mais en l'écoutant. Utile en son temps puis qu'elle évitait d'allumer une chandelle, cette fonction peut paraître aujourd'hui incongrue et désuète. Et pourtant de nombreuses maisons en proposent à leur catalogue et prouvent ainsi leur maîtrise de la haute horlogerie.
Mieux encore, chez Gérald Genta, par exemple, des recherches sont toujours menées pour en améliorer le fonctionnement. « Avec le concours d'acousticiens et d'ingénieurs, nous avons mis au point une machine capable de mesurer la puissance sonore et l'harmonie d'une répétition minute, explique Gérald Roden, le président de la manufacture. Car c'est de la combinaison optimale de ces deux facteurs que va naître l'ultime perfection. Pour ce faire, nous testons même de nouveaux alliages de matériaux avec du magnésium ou de l'aluminium, et nous déplaçons parfois certains organes à l'intérieur du boîtier pour améliorer la résonance de la pièce. L'objectif étant d'obtenir un son puissant et cristallin. »
La maîtrise de ce savoir-faire permet, entre autres, à cette maison de pro poser des pièces uniques au monde com me la Grande Sonnerie à tourbillon dotée d'un ca rillon Westminster à quatre marteaux, dont le calibre est composé de quelque 950 pièces différentes. Notons, au passage, que les marteaux frapperont très exactement 35 040 fois sur leurs timbres dans l'année.
Mais les subtilités mécaniques que l'on retrouve au sein des garde-temps d'exception ne sont pas toujours des exercices de style, dont l'utilité reste discutable. Les montres à quantième perpétuel, par exemple, donnent le jour, la date, le mois - parfois l'année -, et ce, en tenant compte des années bissextiles. Chez IWC, on tient tout particulièrement à ce que les informations distillées soient avant tout lisibles. « Je pense que, dans les années à venir, l'utile va détrôner le futile, précise George Kern, le président de la manufacture de Schaffhausen. C'est pourquoi nous avons conçu une Da Vinci qui reprend les atouts d'une grande date pour donner un affichage optimal des informations calendaires. » Une nouvelle tendance ? L'avenir nous le dira.
« En période de crise boursière, la haute horlogerie peut devenir une valeur refuge, comme le précise Jean Lassaussois, le propriétaire des boutiques Les Montres, à Paris. Le succès que connaissent les grandes complications lors des ventes aux enchères en est la meilleure preuve. Les belles mécaniques s'imposent de plus en plus comme un placement plaisir au même titre que les œuvres d'art. La notion de patrimoine durable et transmissible est un facteur d'achat pour les clients. »
Il faut reconnaître que des maisons telles que Breguet, Cartier, Audemars Piguet ou Patek Philippe sont recherchées par les commissaires-priseurs, car elles assurent la réussite d'une vente. Même des marques emblématiques comme Rolex ou Breitling, dont la réputation ne s'est pas faite dans le domaine des complications, sont également très prisées en salle de vente. Que dire, alors, de Vacheron Constantin, dont chaque garde-temps est une démonstration éclatante de la maîtrise de l'infiniment petit par les artisans d'art ? Calibre squelette, fond émaillé et éditions limitées sont aussi les garants de la pérennité d'une belle cote dans le temps. Et, puisque c'est là de plaisir, de complications, de savoir-faire et de placement qu'il s'agit, terminons par l'une des œuvres horlogères qui a marqué l'année 2008 : la Patek Philippe référence 5207. Jugez plutôt : elle est dotée d'une répétition minute, d'un quantième perpétuel instantané à guichets indiquant le jour, la date, le mois et le cycle des années bissextiles, d'un indicateur de phases de lune et d'un tourbillon. Ultime coquetterie, ce dernier n'est visible que par le fond transparent. http://www.lefigaro.fr/lefigaromagazine/2009/01/17/01006-20090117ARTFIG00125--le-boom-des-complications-.php _________________ Contraria contrariis curantur. (Les contraires se guérissent par les contraires).
|
|