Voici de manière résumée, les grands moments qui ont fait ZENITH au travers de ses présidents les plus représentatifs. Cela permet de mieux comprendre cette manufacture.
Georges Favre Jacot
Président de 1865 à 1911
Le premier des présidents de ZENITH fut Georges Favre Jacot. C'est lui qui en 1865 créa l'entreprise, il n'avait alors que 22 ans. Il avait une solide expérience professionnelle de pivoteur, une ambition immense et un caractère trempé. Son idée était fondée sur un concept très en vogue aux Etats-Unis, à savoir l'interchangeabilité totale des pièces des montres. Cela supposait un concept industriel solide et un process de fabrication pointu. L'entreprise sortit de terre rue des Billodes au Locle et Georges fit prospérer la dot de sa jeune épouse en devenant un des plus grands propriétaires fonciers du canton. L'entreprise fut dès ses débuts gérée de manière empirique car Georges Favre Jacot n'avait qu'une instruction limitée aux études qu'il avait quittées à l'âge de 9 ans.
En 1892, il lui fallut trouver des partenaires financiers plus aventuriers que la Banque cantonale et il dut alors faire évoluer ses statuts pour faire entrer ses partenaires financiers dans le champ des actionnaires. D'abord discrets, ceux-ci devinrent de plus en plus exigeants suivant le cycle des performances commerciales.
A partir de 1904, l'autorité du patriarche commença a subir de sérieuses contestations. Son neveu et futur gendre s'imposait discrètement auprès de sa fille cadette et des coactionnaires qui avaient subtilement fait supporter à Georges les plus gros risques tout en limitant les leurs mais en prenant le contrôle opérationnel de la société.
Le neveu James Favre s'imposa et en 1911, Georges Favre Jacot fut évincé après des échanges assez houleux et un conseil d'administration mouvementé. Le règlement fut violent, entâché d'accusations diverses et rien ne fut concédé au patriarche. Même sa montre et son établi furent sujets à discussion... La société en commandite devient Société anonyme et devient « fabrique des montres Zenith ».
James Favre
Président de 1911 à 1925
Les début de James sont triomphants. ZENITH est prospère grâce à la fabrication de munitions distribuées aux alliés. Jamais les profits ne sont montés aussi haut. Le conseil félicite chaque année le président qui ouvre en outre de nouveaux marchés et fait entrer dans l'entreprise la société Le Phare. En 1917, le marché russe s'effondre, l'année 1921 est une année de grave crise horlogère. On applique du chômage partiel et les horaires sont réduits des 2/3. 1923 accentue la crise et les bénéfices de 800 000 francs en 1922 passent à 37 000 francs en 1924. James Favre est très contesté pour cet affaissement de son chiffre d'affaires. Il est contraint de démissionner en 1925, victime à son tour des pires accusations et est remplacé par Ernst Strahm et Fritz Cosandier.
Ernst Strahm et Fritz Cosandier
1925 à 1941
La période est sans histoire. Zenith remporte des marchés aux USA et La Banque Cantonale Neuchâteloise prend en pleine propriété la quasi-totalité des actions en compensation de ses engagements financiers. DIXI siège au sein du conseil d’administration de ZENITH en 1933. Dixi est spécialisé dans la micromécanique et l'armement. L'entreprise ZENITH intéresse pour son savoir faire et en 1941 c'est Georges Perrenoud propriétaire de Dixi qui en prend le contrôle.
Georges Perrenoud
1941 à 1948
L'entreprise est embrigadée dans la fabrication d'armes et peu d'investissements sont opérés dans les montres. Une partie du personnel devient polyvalente travaillant pour Dixi et pour Zenith qui est black listée en 1945 par les Américains comme entreprise ayant commercé avec l’Allemagne nazie. Perrenoud est sommé de revendre par les autorités politiques du pays et cède ses actions à Dupamo (nom donné à la banque Dupasquier et Montmollin).
Jean-Pierre de Montmollin
1949 à 1972
Cette période va connaitre la production du premier calibre à remontage automatique de la manufacture (calibre 133) et du fameux calibre chronomètre 135. De Montmollin plus financier qu'horloger va vite se passionner pour ZENITH et tout tenter pour maintenir l'entreprise à flot. Il tente des accords avec JLC qui existent quelques mois durant puis rachète Martel Watch en 1959. Il lance l'idée du El Primero, cultive l'association avec Movado et Mondia. Il doit céder en 1971 devant la crise horlogère due à l'arrivée du Quartz. Les Américains prennent le contrôle et en 1972, il démissionne avec un courrier poignant.
Présidence Américaine
1972 à 1978
Les Américains achètent une entreprise endettée et espère faire de Zenith une marque spécialisée dans la production de masse de montres à quartz. Ils déchantent très vite face à l'hostilité suisse à leur égard et face au marché très difficile. Ils réduisent les charges, cessent la production mécanique et abandonnent en 1978 l'entreprise à un prix bien inférieur à son achat.
Paul Castella/ François Manfredini
1978 à 1999
Zenith Chicago revend Zénith Watches C° pour un prix de 6 millions de francs suisses à un consortium de trois industriels suisses dont Paul Castella - Michel Manfredini est placé à la tête de ZENITH - Le personnel est réduit à 150 personnes. Manfredini relance la production mécanique soutenu en cela par Rolex qui équipe son chrono Daytona du El Primero. L'équipe de Manfredini dont Didier Leibundgut est l'un des animateurs pousse Zenith à relancer la production haut de gamme. La De Luca puis la Rainbow et le Chronomaster symbolisent cette relance qui débouche en 1999 par l'arrêt des modèles à quartz. Castella dans le plus grand secret engage des tractations avec LVMH sans prévenir ses collaborateurs.
Manfredini / LVMH
1999 à 2001
Manfredini reçoit des garanties pour continuer à diriger ZENITH mais le groupe a des ambitions très haut de gamme et rapidement la relation se dégrade au point de remercier Manfredini et son collaborateur.
Thierry Nataf
2001 -2009
D'abord Directeur général puis président, Thierry Nataf qui vient de Veuve Cliquot se prend de passion pour ZENITH et décide de relancer la marque en en dépoussiérant l'image. L'équipe précédente avait annoncé qu'il n'y aurait jamais de complications sur les El Primero. Thierry fait tout le contraire et fait parler de la marque qui rencontre à l'époque un déficit d'image et de notoriété. Thierry dit qu'il faut à tout prix faire parler de Zenith. Il en devient le représentant emblématique. Il crée des dizaines de nouvelles complications, multiplie les évènements et les collections comme on le ferait pour un produit de mode. Il secoue le paysage horloger, essuie les critiques de gens qui le copient bien souvent mais il préfère précéder plutôt que d'être suiveur. La crise met fin à la bulle horlogère qui enflait depuis la fin des années 90 et Thierry décide de partir pour d'autres activités.
Tous les présidents de Zenith furent contestés. Georges Favre Jacot car autodidacte, il avait pactisé avec les ouvriers plutôt que d'entrer dans les syndicats patronaux, il s'était mis à dos la profession. L'autonomie de la manufacture générait aussi beaucoup de critiques.
James Favre était un personnage assez cassant et peu ouvert à la critique. Il était performant au plan commercial et redouté par la concurrence pour défendre des positions perdues par les autres.
De Montmollin ne fut jamais reconnu comme horloger et toujours perçu comme un financier qui se faisait du gras sur le dos de la manufacture.
Manfredini fut perçu comme trop ingénieur et pas assez designer. ZENITH génait car était un concurrent redouté.
Thierry Nataf a payé son succès et, trop exposé, a subi directement les foudres. Son départ est dû à sa volonté de retrouver une sérénité que l'activité de gestion de ce type d'entreprise ne lui permet pas d'avoir car il ne peut plus avancer qu'en s'exposant davantage.
Tous les président à l'exception d'un ou deux, ont eu une vraie ambition pour Zenith et Thierry Nataf a marqué sans aucun doute la relance de la marque et son maintien dans un univers qui a considérablement évolué en 10 ans. Une manufacture sans caractère aurait disparu et ZENITH a réellement été sauvé par Thierry Nataf avec LVMH.
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Contraria contrariis curantur. (Les contraires se guérissent par les contraires).