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 Marc A. Hayek, président de Blancpain

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ZEN
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MessageSujet: Marc A. Hayek, président de Blancpain   Marc A. Hayek, président de Blancpain EmptyJeu 30 Mar 2006 - 22:17

Marc A. Hayek, président de Blancpain








Citation :
Dans le bureau du président de Blancpain, il y a un coupe-cigare ancien et des cartons de bonnes bouteilles qui attendent d'être transportées ailleurs. C'est assez hétéroclite, mais cela cadre assez bien avec les goûts de Marc Alexander Hayek.

De son père, Roland Weber, un industriel argovien, il a le goût des beaux vins; pas les châteaux bordelais tape-à-l'œil, mais des choses plus authentiques. Il a appris à aimer le dézaley, et à apprivoiser le fort caractère de certains côtes-du-rhône «un peu rustiques, et très honnêtes, pas faciles à boire». De son grand-père Nicolas G. Hayek, qu'il appelle «Senior» au bureau, il a aussi hérité l'amour des belles et bonnes choses. Celui des montres et des havanes. Si Nick G. était un opéra de Wagner, Marc A. serait plutôt un chant grégorien. Ou la note bleue de John Coltrane. Mais il avoue ne pas aimer les raccourcis.

A l'âge de 26 ans, après avoir tâté de l'horlogerie au département marketing, il décide de prendre son destin en main et ouvre un bar à vins – le Colors – à Zurich. Avant qu'on lui fasse une offre difficile à refuser: reprendre Blancpain. En quelques années, Marc A. Hayek a donné à la marque un souffle nouveau, sans esbroufe. En 2004, le chiffre d'affaires de la maison était estimé à 100 millions de francs. Il serait passé à environ 120 millions, «dans ces eaux-là».

Le patron de Blancpain n'est pas né dans le sérail horloger, mais celui-ci semble l'avoir adopté. A la fin de l'entretien, il dévoile des éléments de ce qui deviendra une collection pour femmes (lire p. 21). Il ne porte qu'une seule montre. Preuve qu'il est assez fier de son dernier opus: un quantième perpétuel dont la masse oscillante est gravée d'une feuille de tabac. Une pièce qui sera livrée dans un écrin en bois transformable en humidor, avec un coupe-cigare traditionnel. On ne se refait pas...

Le Temps: A quel âge a eu lieu votre premier contact avec le monde horloger?

Marc A. Hayek: Très tôt. Dès l'âge de 6-7 ans. Je voulais toujours m'arrêter devant les vitrines des bijoutiers pour voir les montres. C'est mon premier contact conscient. Après, ce fut l'époque Swatch: j'avais l'âge parfait,12-13 ans, pour m'y intéresser. Pour la première fois, il ne s'agissait plus simplement d'un objet pour lire le temps, mais d'un accessoire de mode, comme pouvait l'être une paire de Nike.

– Quelle fut votre première montre?

– Je pense que c'était une Tissot que ma grand-mère m'a offerte. Je l'ai toujours, chez mes grands-parents.

– Enfant, qui rêviez-vous de devenir?

– Quand j'étais tout jeune, je voulais être pêcheur. J'ai eu des passions qui se sont ajoutées à d'autres: la plongée, les motos, la mécanique automobile... Professionnellement, je ne pensais pas à un métier précis, mais je désirais construire quelque chose, avec comme moteur indispensable l'émotion.

– C'est ce que vous avez fait en montant à Zurich le bar à vins Colors. Etait-ce une manière

de prendre votre indépendance?

– Je voulais savoir ce que j'étais capable de faire. Le Swatch Group est un grand groupe: bien sûr, on peut toujours y créer. Mais je voulais faire quelque chose par moi-même. Cette aventure aurait pu durer très longtemps, mais après trois ans, l'affaire était rodée. J'avais le projet d'adapter ce concept dans différentes villes, en commençant par Saint-Moritz. Puis l'opportunité de reprendre Blancpain s'est présentée.

– Vous êtes donc revenu dans le groupe...

– Cette marque me fascinait depuis longtemps. On y trouve plus de passion, d'émotion que dans une marque moyen de gamme. Ces montres ne sont pas que des objets utiles. On part d'une fonction pure, puis on soigne les détails au point d'arriver à une œuvre d'art. Pour moi, il s'agit d'un art vivant. Ça me donne un équilibre.

– C'est aussi une approche particulière du temps. Les jeunes générations n'ont souvent pas de montre, elles lisent l'heure sur leur portable. Pensez-vous qu'elles ont une perception différente de l'écoulement des heures?

– Oui, pour moi, la lecture digitale du temps, indiquée simplement des chiffres, par exemple «1:35», engendre plus de stress. «Je dois faire ceci à telle heure, j'ai «x» minutes pour aller là...» On ne retrouve pas cette beauté du temps, liée à l'écoulement des saisons, qu'on peut sentir sur un cadran avec des aiguilles qui tournent. Mais c'est aussi une histoire de génération: lorsque j'étais plus jeune, je détestais m'ennuyer, et je percevais le temps qui passait trop lentement comme un ennemi. Je ne pouvais pas l'apprécier.

– La renaissance de la marque Blancpain doit beaucoup au génie marketing de Jean-Claude Biver. Hormis la passion partagée du vin et des montres, votre approche est différente, vous avez notamment nettoyé le message publicitaire...

– Comme lui, je viens du marketing et j'essaie de rester actif dans ce domaine. Mais pour moi, la beauté du marketing, c'est de réussir à communiquer une passion au consommateur. Avec une société comme la nôtre, il faut penser et travailler sur le long terme. Nous voulons bien sûr un succès rapide, mais pas au détriment du futur. Je travaille déjà sur des projets qui sortiront en 2010 ou 2011... Or, je ne peux pas construire demain avec des demi-vérités. Personnellement, si j'achète quelque chose – que cela coûte 5 francs ou 5000 francs –, si j'ai l'impression que ça les vaut, je suis content. Sinon, j'ai le sentiment d'être floué, même pour un objet à 5 francs. Une publicité exagérera toujours les côtés positifs d'un produit, c'est normal, mais il ne faut pas prendre de raccourcis.

– Au sein du groupe, la marque Blancpain est la plus proche concurrente de Breguet, à la tête de qui on trouve Nicolas G. Hayek, votre grand-père. Vous êtes dans un rapport de concurrence avec lui, comment le vivez-vous?

– (Il éclate de rire.) C'est assez passionnant! Les deux marques ont une identité différente, et le consommateur le perçoit. Mais dans certains pays, elles sont en concurrence directe. Et avec toute l'expérience et le punch de Senior, c'est une concurrence très difficile! Cette année, nous avons eu un taux de croissance très bon et, sur le marché chinois, nous avons une position plus forte que Breguet. Ça fait plaisir! Mais je sais qu'il s'est réveillé... Je sens que ça va être dur!

– Dans le domaine de la recherche et du développement, y a-t-il des priorités pour Breguet?

– Au sein du groupe, il existe un département qui fait de la recherche dans les domaines high-tech, les écrans tactiles, le GPS, la téléphonie... Mais pas pour les marques de luxe. Il n'y a pas de développements communs, à l'exception de la montre réveil, sortie en 2003. Breguet et Blancpain ont travaillé en parallèle pendant deux ans sur un même projet. Mais comme le développement chez Blancpain était plus avancé, nous avons intégré les résultats pour arriver à un mouvement commun, sur une base Frédéric Piguet. Si le mouvement est semblable, nous avons pris des chemins stylistiques très différents: leur modèle est très classique, le nôtre, dans sa nouvelle version présentée ce printemps, est très sportif avec une boîte en titane qui améliore le son – on arrive à plus de 70 décibels.

– Je me souviens surtout du réveil Breguet, pas du vôtre. Vous étiez en avance technologiquement, mais en termes de communication, ils ont pris les devants.

– Oui, j'ai pris une leçon. Il n'était pas prévu que les choses se passent comme ça car nous aurions dû communiquer ensemble... Mais aujourd'hui, en termes de ventes, en quantité, nous les avons dépassés.

– Si vous deviez retenir une leçon essentielle de la carrière de votre grand-père, quelle serait-elle?

– J'ai beaucoup appris à ses côtés, sans vraiment le réaliser. C'est surtout sa passion que je retiendrais, et le fait qu'il s'amuse en travaillant. Même s'il lui arrive de s'énerver, il ne se prend pas au sérieux. Il m'a toujours dit: «Fais ce que tu veux. Fais quelque chose, mais peu importe le domaine.»

– Vous êtes proche de lui, au point de porter son nom, et non celui de votre père. Comment avez-vous pu changer de patronyme?

– Je l'ai fait avec l'accord de mon père. Ma mère avait repris son nom de jeune fille après son divorce, et comme je vivais avec elle et mes grands-parents, à chaque déménagement, chaque changement d'école, on me demandait pourquoi je portais un nom différent. Cela facilitait les explications.

– Etes-vous un collectionneur de montres?

– Je ne suis pas un collectionneur classique. Je veux pouvoir profiter des choses: je ne conçois pas de laisser une bouteille dans une cave en me disant que je l'ouvrirai dans dix ans, ni de mettre une montre au coffre en pensant qu'elle prendra de la valeur. J'achète par passion et pour le plaisir. Je suis fasciné par les montres de Vincent Calabrese. J'adore essayer de comprendre comment elles fonctionnent; elles sont si différentes! J'ai aussi une grande admiration pour Philippe Dufour. Avec eux, ce n'est pas parce qu'on fait les choses de telle manière depuis 200 ou 300 ans, que cela doit rester figé. Ils osent explorer d'autres possibilités. Ça réveille!

– Quel est le modèle dont vous êtes le plus fier ?

– Je suis fier quand un passionné de longue date de Blancpain me dit: «Ça c'est bien fait. Ça c'est du vrai Blancpain.» Ce fut le cas avec l'équation marchante du temps que nous avons lancée en 2004. Je suis aussi fier de la montre que je porte: un quantième perpétuel très classique, très pur, mais si vous regardez bien, la masse est gravée à la main avec une feuille de tabac. Quand on grave avec une machine, on arrive à quelque chose de plus précis, mais qui n'a pas d'âme, qui n'a pas cette beauté.







Citation :
Quelques dates

24 février 1971: Naissance.

1994: Assistant marketing et relations publiques Swatch.

1995: Département sponsoring de Certina.

1997: Ouvre à Zurich le Colors, un restaurant-bar à vins trendy qui remporte le Prix de la revue «Wine Spectator».

2001: Nommé directeur marketing-vice-directeur de Blancpain.

2002: Nommé président de Blancpain.

2005: Rejoint la direction générale de Swatch Group.



Isabelle Cerboneschi
Mercredi 29 mars 2006

http://www.letemps.ch/template/supplement.asp?page=19&article=177586

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