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 Vieux métier : Chronomètrier

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ZEN
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MessageSujet: Vieux métier : Chronomètrier   Vieux métier : Chronomètrier EmptyMar 13 Sep - 21:16

Vieux métier : Chronomètrier Cronometrie

Citation :


Au temps des princes de la précision

Les concours de l’Observatoire de Neuchâtel
ont fait rayonner l’horlogerie suisse
dans le monde entier



Les meilleurs chronométriers attendent la proclamation des résultats. De gauche à droite: Joseph Ory (Omega), Robert Chopard, Fernand Wenger, Frank Vaucher (tous les trois chez Longines) et André Brielmann (Omega).
Les horlogers suisses sont les meilleurs du monde. Sans doute. Encore faut-il le prouver. Au milieu du xixe siècle, face à la montée en puissance d’autres nations horlogères, comme la France et l’Angleterre, voire les Etats-Unis, les fabricants de la douce Helvétie ont dû, pour la première fois de leur histoire, commencer à faire de la publicité. A montrer au monde qu’ils étaient les plus forts, les plus précis, les plus qualifiés. Comment? En brandissant une médaille, à la manière des champions, sous la forme d’un diplôme, obtenu après avoir fait passer au mouvement toute une série de tests, en diverses positions et à des températures extrêmes.
Tout commença, à Genève, en 1790 déjà: des épreuves chronométriques furent mises sur pied par la Société des arts, alors que le premier véritable concours fut instauré en 1816. Un dénommé Antoine Favan en fut le premier lauréat. Il s’agissait alors de présenter une montre dont les variations n’iraient pas au-delà de 3 secondes par 24 heures, qu’elle fut posée à plat, pendue ou portée et qu’elle soit observée dans une température qui parcourt 25 degrés de l’échelle Réaumur, relevait feu René Gygax, ancien régleur de précision chez Zénith, dans une brochure écrite en 1993.
A Neuchâtel, il faut attendre 1860, date de la création de l’Observatoire, pour que la course à la précision s’engage. Chargé, dès ses débuts, de déterminer l’heure exacte et de la transmettre, l’institut avait aussi pour mission d’observer des chronomètres et de consigner leurs performances sur des bulletins de marche. Six chronomètres de marine et treize montres de poche furent ainsi soumises, la première année, à un contrôle sévère. En 1861 figure déjà, parmi les fabricants, le nom d’Ulysse Nardin, qui ne cédera à aucun moment, jusqu’en 1967, les premiers prix de la catégorie des chronomètres de marine! Car dès 1866, les concours débutèrent. Ils prirent fin en 1972, dans le plus profond désintérêt, l’avènement de la montre à quartz ayant tué tout esprit de compétition. Comme le dit l’historien chaux-de-fonnier Charles Thomann dans son magnifique ouvrage «Les dignitaires de l’horlogerie», paru en 1982 aux éditions du Griffon: Le rêve était devenu réalité: lorsqu’on touche à la perfection, le but fixé s’estompe.

Quarante-cinq jours de tests

Cette course contre la montre dura ainsi plus d’un siècle. Les chronométriers, régleurs de précision, étaient les champions des usines d’horlogerie, des coureurs de fond qui passaient plusieurs mois, penchés sur leur établi, à régler balancier et spiral, à contrôler, à régler encore, avant de partir, leurs pièces sous le bras, les déposer à l’Observatoire; en Suisse, ceux de Neuchâtel et de Genève avaient mis sur pied ces concours. C’était ensuite la longue attente, qui durait 45 jours – les tests étaient plus longs que ceux des bureaux officiels de contrôle, ancêtres du COSC – et qui, parfois, consacrait le travail des maîtres du réglage. Ceux-ci n’étaient qu’une poignée. Ils se connaissaient et se respectaient, mais personne n’échangeait ses petits secrets, qui faisaient l’objet de nombreuses spéculations. La dernière génération de ces ténors est aujourd’hui à la retraite. Frank Vaucher, ancien régleur chez Longines, à Saint-Imier, a dressé tout récemment la liste de ses anciens confrères. Dans l’Arc jurassien, ils sont 18, domiciliés entre Le Locle et Bienne. Ils se sont retrouvés le 9 octobre dernier pour échanger des souvenirs et commenter les dernières nouvelles de la branche.
Un petit nombre d’entreprises se sont partagé les podiums. Participer aux concours coûtait en effet relativement cher: tous les fabricants ne pouvaient pas se payer une équipe attachée à plein temps au réglage des pièces de concours. Ulysse Nardin, Zénith, Omega et Longines étaient les quatre grands compétiteurs. Des marques comme Movado, Solvil, et même le Technicum de La Chaux-de-Fonds figuraient aussi au palmarès. Quatre catégories accueillaient les mouvements: chronomètre de marine, de bord, de poche, et chronomètre-bracelet. La toute première montre-bracelet a été déposée en 1914 déjà par un certain… Rolex Aegler, mais les petits calibres ne prirent leur essor que bien plus tard, dans les années quarante et cinquante. En 1967, sur 1700 pièces déposées, 1200 étaient des montres-bracelets.
Véritables stars des manufactures, les chronométriers n’avaient cependant guère de temps libre: le dimanche matin, ils devaient retourner à l’usine pour remonter leurs pièces. Mais à 9h30, j’étais déjà à l’église, se souvient Frank Vaucher. Et nous ne pouvions jamais partir en week-end, ajoute son épouse.
Surtout, les régleurs devaient rapporter des prix, faire des records, pour que le nom de l’entreprise rayonne dans le monde. Car dès les années cinquante, les concours étaient devenus un véritable instrument de marketing. Un nombre croissant d’acheteurs réclamaient les mouvements primés. Selon Charles Thomann, en 1956, 65% des bulletins étaient délivrés à des pièces commerciales.

La chambre froide du boucher

D’abord artisanales, les techniques de contrôle se perfectionnèrent au sein des entreprises. Ainsi, la glacière, l’un des trois principaux attributs du chronométrier, était parfois… la chambre froide de la boucherie du village, mise à disposition d’un fabricant, où quartiers de viande et chronomètres se partageaient l’espace! A l’Observatoire, les températures et la pression atmosphérique furent de mieux en mieux stabilisées.
Jusqu’en 1960, l’heure de référence, donnée par un régulateur, était encore déterminée de manière astronomique, en observant la position du passage des étoiles au méridien. Les horloges atomiques et leurs étalons de fréquence n’ont pris qu’ensuite le relais…

Le quartz a tué le jeu

Le drame? Il débarque au milieu des années soixante, sous la forme d’un oscillateur à quartz. Il se nomme Seiko, parle japonais et menace de battre l’industrie suisse sur son propre terrain. Pas toujours avec des moyens très honnêtes, mais c’est la guerre. Chez Longines, on se souvient d’un distributeur au Japon qui réclamait, comme cadeau d’anniversaire, une pièce de concours… A Neuchâtel, on évoque encore les délégations nippones qui passaient, à l’hôtel, les 45 jours de tests et montaient sans cesse à l’Observatoire pour quémander des résultats. Mais soyons honnêtes, analyse Charles Thomann. Ce ne sont pas les Japonais qui ont tué les concours. Mais bien l’arrivée du quartz. Et le fait que la précision était devenue l’affaire d’ingénieurs, et non plus d’horlogers.
Le Centre électronique horloger (l’ancêtre du Csem) n’était d’ailleurs pas en reste: en 1967, sa Bêta 21 remporta le prix à la barbe de Seiko, battant au passage tous les records de précision précédents. Mais le cœur n’y était plus et les concours s’étiolèrent. Ils cessèrent définitivement en 1972, laissant la place à la plus grave crise que subira la branche. Celle-ci s’en est relevée. Mais désormais, c’est uniquement le COSC qui délivre les bulletins de marche. Et René Gygax jugeait dommage, en supprimant d’une manière aussi abrupte les concours, d’avoir déprécié les constructeurs et les ouvriers. Ceux-ci ont pris leur revanche dans les années nonante en même temps que revenait au premier plan la montre mécanique…

Françoise Kuenzi

Extrait du site

http://www.limpartial.ch

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