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Sujet: Hamilton Dim 23 Avr 2017 - 17:35
Sujets Hamilton
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Sujet: Quand Hamilton cessa toute production civile pour ne se consacrer qu'aux armées Dim 23 Avr 2017 - 18:20
La deuxième guerre mondiale a créé un immense besoin en montres de tous types -Bracelets, poche, chronographes, montres 24 heures, chronomètres de marine, chronomètres de bord etc ... Malgré tous les efforts des manufactures suisses, il leur était impossible de satisfaire à la demande des armées américaines, anglaises et françaises. En 1941, le gouvernement américain sollicita des manufactures américaines un effort exceptionnel pour que chaque GI ait sa montre dans son paquetage. Des commandes furent passées auprès de plusieurs manufactures mais celle qui s'engagea le plus loin dans l'effort militaire fut sans nul doute Hamilton. La firme développa avec ses ingénieurs en moins de deux ans des pièces exceptionnelles d'une précision supérieure aux montres suisses. Son chronographe devint ainsi une référence pour les bombardiers américains ... En 1944, Hamilton produisait autant de chronomètres de marine que toutes les manufactures suisses additionnées.
L'effort de guerre d'Hamilton obligea l'entreprise a cesser toute production civile et la marque s'en expliqua par voie de presse en 1943...
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Dernière édition par ZEN le Dim 11 Juin 2017 - 10:44, édité 1 fois
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Sujet: L'incroyable défi des chronomètres de marine Hamilton Dim 23 Avr 2017 - 18:21
L’incroyable défi des chronomètres de Marine Hamilton
Disposer d’une heure précise et fiable est un besoin fondamental à bord d’un navire. Cela permet de calculer sa position et en particulier la longitude. Malgré des appareils radio sophistiqués, cette référence dans les années 1940, est encore sécurisée par un instrument mécanique, le Chronomètre de marine, comme c’est le cas depuis la fin du 18ème siècle. Cet instrument est également un moyen de coordonner les actions militaires grâce à une heure de référence commune sur tout le navire. Avant la seconde guerre mondiale, aucune firme américaine n’avait jamais produit en série des chronomètres de marine. Les manufactures d’horlogerie d’outre Atlantique concentraient leur production sur les montres avec beaucoup de succès tant par les volumes fabriqués, que la qualité des pièces, reconnues comme très précises et d’une excellente finition. L’engagement de l’armée américaine dans le conflit mondial crée dès 1939, un besoin conséquent de chronomètres de marine destinés à être embarqués à bord des navires de l’US Navy. Les militaires américains s’étaient jusqu’alors contentés des chronomètres fabriqués en Europe, essentiellement en Suisse, en particulier par Ulysse Nardin qui était reconnu comme détenant une immense expertise dans ce type de pièces. Cette manufacture accumulait d’ailleurs avec un quasi monopole, les premiers prix des concours de chronométrie notamment de l’Observatoire de Neuchâtel dans la catégorie des chronomètres de marine. A partir du juin 1939 et jusqu’en juin 1940, l’USNO (United States Naval Observatory) qui était aux Etats-Unis l’autorité de référence en matière de chronométrie et d’instruments de navigation, s’adressa par courrier à huit compagnies américaines afin de les inviter à produire des chronomètres de marine pour l’armée. Les firmes horlogères américaines faisaient de la précision leur fer de lance et quasiment chacune disposait de son propre observatoire et d’un centre de recherche très pointu. La firme Hamilton, de Lancaster, répondit à l’invitation de l’USNO par courrier le 2 juillet 1940 en sollicitant toutefois, que soit mis à sa disposition un chronomètre de marine du type de celui que l’on souhaitait lui faire fabriquer. Les experts de l’USNO après examen donnèrent un agrément officiel à la manufacture Hamilton, le 26 février 1941.
Hamilton va alors poursuivre l’objectif de produire un chronomètre de marine dans les mêmes conditions industrielles que ses montres. Pendant plusieurs mois, horlogers, ingénieurs et développeurs de la firme réunis dans la « Hamilton’s Research and Work laboratories and Product and Equipement Design section », l’équivalent d’un bureau d’études et de développement industriel, travaillent en étudiant plusieurs chronomètres de marine et notamment ceux de l’anglais Thomas Mercer et ceux de la manufacture suisse Ulysse Nardin. La firme Hamilton comme à son habitude va tout repenser avec un raisonnement à finalité militaire et industrielle qui induit précision sans faille, fiabilité extrême, solidité et facilité de maintenance. La manufacture va tout fabriquer en interne avec son département mécanique (Hamilton’s Mecanical Department), y compris les étampes, les outillages et accessoires.
Le 27 février 1942, soit 13 semaines après la bataille de Pearl Harbor et un an après que la firme se soit engagée dans le développement de son propre chronomètre de marine, celle-ci est en mesure de livrer ses 2 premiers prototypes pour examen à l’Observatoire Naval de Washington DC. Les experts de l’USNO sont alors sidérés par le niveau de précision des deux pièces et les innovations technologiques développées. Hamilton a réussi en outre, à concevoir un mouvement dont la fabrication industrielle et donc en volumes, semble particulièrement aisée ce qui la distingue des fabrications européennes. La première version de mouvement dite « Model 21 » est conçue sur les bases d’un design qui se rapproche de ce que fabriquent les Suisses mais avec des innovations tout à fait propres à Hamilton. C’est le cas par exemple, de l’échappement à détente redessiné pour pouvoir être fabriqué par des machines et du balancier avec son spiral en Elinvar. Tout est pensé pour faciliter la production en série avec des critères esthétiques finaux du même niveau que les pièces anglaises réputées comme étant les mieux finies. Hamilton outre son Model 21, livre à partir du 22 juin 1942 le Model 22 dont le calibre va équiper outre des chronomètres de marine, des montres de bord pour les sous-marins et les Torpedo boats.
Ainsi, 18 mois après s’être engagé dans la course pour produire son propre chronomètre de marine, le premier fabriqué industriellement sur le sol américain, Hamilton est capable de fabriquer 300 pièces par mois puis très vite 400 et enfin 500 pièces chaque mois, soit davantage que toutes les manufactures suisses confondues qui ne peuvent livrer qu’un peu moins de 500 pièces par an. En août 1944, au plus haut de sa production, Hamilton Watch C° réussit la performance extraordinaire de fabriquer 546 chronomètres de marine, tous d’une précision extrême, équivalente aux meilleures pièces suisses et ceci pour des prix de 390 à 625 dollars, soit moins de la moitié des prix suisses. A la fin de la guerre en 1945, Hamilton a déjà produit pour ses armées 10 902 chronomètres de marine. Le calibre « Model 22 » est en outre intégré à des montres d’observation qui ressemblent à de très grosses montres de poche et dont la manufacture produira au total 9 780 exemplaires. Ce mouvement avec ses 57 mm de diamètre, dispose de 21 rubis et d’un réglage dit « 6 adjustments » soit 5 positions + température. Il profite d’une réserve de marche de 56 heures au total même si son cadran n’en affiche que 48. La grande innovation de ce mécanisme est le recours à l’Elinvar pour le spiral et la serge du balancier dont les bras sont en Invar. Le choix de ces matériaux très peu sensibles aux écarts de températures est original pour un chronomètre de marine. Il garantit une résistance parfaite à la corrosion et une stabilité des réglages. La très faible déformation potentielle en cas d’écart de température, va « ovaliser » très légèrement le balancier sans faire perdre au mouvement sa stabilité isochronique. Le spiral est préformé et traité thermiquement de telle manière qu’il existe peu de variation de l’un à l’autre ce qui assure une continuité de qualité à la fabrication. On évite ainsi les ajustements manuels nécessaires sur les spiraux en acier, ce qui facilite une production en série à la machine.
Les performances chronométriques du mouvement relèvent de l’excellence et ce de manière totalement standardisée. L’écart annoncé par le fabricant était inférieur à 2 secondes par jour sur chaque pièce livrée. Les résultats étaient souvent très en dessous de ce chiffre puisque l’écart moyen relevé restait inférieur à une seconde quotidienne. En moins de 18 mois et en partant d’une feuille blanche, la manufacture Hamilton a réussi une performance tout a fait exceptionnelle qui démontre le très haut niveau de ses ingénieurs et horlogers. Un délai si faible entre l’engagement du projet et la mise en fabrication industrielle est extrêmement rare dans l’horlogerie. Outre la Navy américaine, La Royale Navy britannique a reçu quelques livraisons des pièces Hamilton qui ont marqué à la fois l’histoire de l’horlogerie militaire et celle de la fabrication en série de pièces mécaniques. L’outil industriel dont disposait Hamilton Watch C° était sans doute en matière d’horlogerie l’un des plus performants de la seconde guerre mondiale.
Hamilton offrit au président Roosevelt l’un de ses chronomètres qui fut conservé à la Maison Blanche où il était maintenu en fonctionnement permanent dans le bureau où le président américain prenait le temps d’écrire. Lorsque dans les années 1970, la firme Hamilton dut tourner une page de son histoire, elle avait produit pas moins de 23 000 chronomètres « Model 22 » qui restent à ce jour parmi les plus performants jamais fabriqués.
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Sujet: Hamilton Deck watch, l'histoire d'une exceptionnelle réussite horlogère. Dim 23 Avr 2017 - 18:25
Hamilton Deck watch
Malgré le nombre élevé de manufactures horlogères américaines, la première guerre mondiale avait fait prendre conscience à l'armée américaine de son déficit de montres fiables. Si les manufactures Waltham, Elgin, Hampden ou Hamilton ont concentré depuis 1891, leurs moyens sur la production de montres pour les chemins de fer, elles n'ont pas vraiment anticipé ce que la demande militaire pourrait leur apporter.
A la fin de la première guerre, lorsqu'en 1917/1918 les Américains envoient des troupes en Europe pour rétablir les communications et les infrastructures de transport, les besoins se chiffrent en dizaines de milliers d'unités. Les manufactures suisses deviendront ainsi les fournisseurs des Signal Corps en montres bracelets et modèles de poche et des Corps of Engineers.
Lorsque la seconde guerre mondiale éclate, l'armée américaine qui mobilise énormément d'hommes se doit de les doter en montres fiables afin d'assurer la synchronisation des actions. Des montres bracelet vont ainsi être distribuées avec chaque paquetage. Il faut aussi sur les navires, des pièces fiables qui serviront à donner une heure de référence. Ce sont autant des montres de bord dites "Deck Watch" que des chronomètres de marine. Avant 1941, les firmes horlogères américaines ne sont pas encore prêtes et la Navy va devoir se fournir en Suisse pour disposer de chronomètres de marine. C'est une compagnie de Chicago qui va servir d'intermédiaire à Zenith. Les Suisses ne peuvent en effet livrer directement la Navy car seule une compagnie américaine est habilitée par la loi américaine à le faire.
Vail Watch C° fait upgrader des calibres de 7 rubis prévus pour des tableaux de bord d'automobiles afin d'équiper des chronomètres de marine disposant d'une réserve de marche de 8 jours. Redoutablement précis, ces petits chronomètres de marine seront jusqu'en 1941, quasiment les seuls à équiper les navires de l'US Navy. L'armée américaine avait toutefois anticipé ses besoins et avait lancé un concours auprès des firmes nationales pour disposer d'instruments de mesure du temps fiables.
Aucune firme américaine ne s'était jamais intéressée à ce type de produits. Hamilton dont les bureaux d'études étaient particulièrement performants mirent au point en quelques mois des mouvements aussi efficaces que leurs homologues suisses et supplanta la concurrence américaine. La manufacture de Lancaster se mit dès 1941 à livrer non seulement l'armée américaine mais aussi à répondre aux sollicitations de la marine anglaise. Ses calibres 21 et 22 allaient démontrer des qualités chronométriques exceptionnelles et ouvrir à Hamilton un extraordinaire marché. La firme produit jusqu'à la fin de la guerre jusqu'à près de 500 chronomètres de marine par mois soit davantage que toutes les firmes suisses réunies pour une année.
Le calibre 22 va vite s'imposer comme le mouvement phare d'Hamilton. Précis, solide, fiable, son grand diamètre "Size 35" en fait un calibre exceptionnel. Inadapté pour des montres de poche, il est en revanche parfait pour les montres de bord et Hamilton va le livrer dans une double boite en bois pour le protéger. Son utilisation à plat recommandée pour optimiser la précision et le rembourrage de ses boitiers le rendent peu sensible à la houle qui peut parfois gêner la marche des instruments.
Cette montre au delà de tout équipement radio à bord donne la garantie à bord des navires de détenir une heure juste, celle-ci permettant de synchroniser les interventions et donc les montres de tous les militaires. En cas d'avarie électrique, cette heure juste permet aussi de repérer la longitude, condition essentielle de la navigation maritime.
Le boitier de la montre, taillé dans la masse, est travaillé par Keystone, grand fabricant de boite de l'époque, sur une Base métal. Le calibre comporte 21 rubis et comme il fut quasi-exclusivement livré aux armées, il mentionne son appartenance à L'US Navy BU. Il est ajusté en températures et 6 positions. Le fond de boite gravé précise " Bureau of Ships - US Navy, un numéro de référence et l'année de mise en service (ici 1943) Il comporte enfin la rare mention sur une montre américaine "Chronometer Watch". La réserve de marche est proche de 60 heures mais la précision n'est garantie que sur 56 heures. La montre est imposante et massive, évidemment sans bélière. La raquette à disque excentré est sophistiquée mais reste réglable avec la pointe de l'ongle même si cela est peu recommandé. Ces montres étaient de toutes façons vérifiées de manière draconienne. Elles sont restées en service jusqu'aux années 50.
Hamilton a réalisé un véritable tour de force en offrant aux armées des instruments de mesure du temps très précis. La manufacture durant la seconde guerre mondiale n'a quasiment plus produit que pour l'armée, sacrifiant sa clientèle civile. Elgin, Waltham eurent une logique industrielle approchante et personne ne se relèvera vraiment de la guerre. Sans Nicolas Hayek la marque aurait sans doute totalement disparu même si elle fut omniprésente au poignet des troupes américaines pendant la guerre du Vietnam.
Hamilton a scellé son histoire en démontrant une exceptionnelle aptitude à créer des pièces et des mouvements de qualité chronométrique dignes et parfois supérieures aux meilleures manufactures suisses. Hamilton fut une réussite industrielle mais, avant Swatchgroup, un échec commercial.
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Sujet: Hamilton et l'un des meilleurs mouvements de l'histoire de l'horlogerie Lun 24 Avr 2017 - 8:52
Au 19ème siècle puis au début du 20ème siècle, les Américains n'ont pas pris les mêmes options que les Européens pour équiper leur montres. Quand en Europe, la montre était en argent avec un mouvement doré, aux USA, la montre était en plaqué or avec un calibre rodhié. Quand en Suisse, on qualifiait de chronomètres avec un bulletin de marche des montres dotées de 15 rubis, on diffusait aux Etats-Unis des montres avec 21 et 23 rubis.
Les firmes horlogères américaines qui communiquaient sur leurs mouvements ultra-précis et très empierrés ont boosté les Suisses, les obligeant à emboiter le pas des Américains et à livrer des calibres avec 21 et 23 rubis. L'empierrement ne fut pas le seul argument qui conduisit à une surenchère. Les matériaux des pierres furent aussi un sujet de débat. Certaines marques suisses utilisèrent même des diamants. Ce fut par exemple le cas d'Omega avec ses calibres de qualité D Extra spécial.
Un siècle plus tard, la question reste entière de savoir qui a fait les meilleurs mouvements. Il reste difficile de trancher entre un calibre Omega de 21 rubis, un RR 56 Zenith, un calibre 22 Ulysse Nardin ou un H5 de IWC pour les Suisses et un 992 B d'Hamilton ou un calibre Howard, Elgin ou Waltham Vangard.
Ce qui est certain est que les américaines en argent à calibre jaune sont rares .
Dans les années 40, les Américains livraient encore en masse des Gold Filled (plaquées or) jaunes, roses ou blanches avec un or de plaquage de 14 ou 10 carats garanti, selon l'épaisseur, de 5 à 25 ans.
Les Suisses commencèrent alors à produire des montres en acier inox. Hamilton leur emboita le pas avec une montre "Railways special" dédiée aux chemins de fer et son calibre 992 B qui atteignait l'excellence. Ces mouvement sont 75 ans après toujours dans des normes de chronomètres de très haute précision .
Voici donc une Hamilton en inox avec ce fameux calibre 992 B ajusté aux températures et dans 6 positions ...
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Sujet: Histoire de Hamilton Watch C°, manufacture phare de l'horlogerie américaine Lun 24 Avr 2017 - 17:26
La Hamilton Watch C° manufacture phare de l'horlogerie américaine
Le seconde moitié du 19ème siècle voit naître aux Etats-Unis comme en Suisse plusieurs manufactures qui vont profiter de l'élan de l'ère industrielle pour se faire une place de choix dans l'industrie horlogère. La création des industries de tous domaines de compétences et d'activités a regroupé sur un même lieu de travail des gens qui antérieurement travaillaient de manière isolée. L'interdépendance des activités au sein des entreprises a imposé que l'ensemble des personnels exerce leur métier avec des horaires communs et cette nouvelle organisation du travail génère une immense demande de pièces d'horlogerie précises et fiables.
La montre à ancre qui se fabrique en série au même moment, plus précise et fiable, suscite un engouement qui la fait désirer dans tous les mieux socio-professionnels. Concrètement, ce sera la finition des montres, l'empierrement des mouvements, la décoration et les anglages ainsi que le type d'emboitages en métal commun ou précieux qui vont créer une différence. Mais de 7 à 26 rubis, la précision des montres permet à tous d'accéder à la détention individuelle de l'heure et pour la première fois de partager une heure précise et universelle... C'est la conquête sociale de l'heure.
La firme Hamilton fait suite à la Lancaster Watch Company qui elle-même était issue de la "Adams and Perry Watch Company" du nom de deux associés "d'infortunes" qui échouèrent dans la création d'une compagnie horlogère faute de capitaux. Leur projet installé à Lancaster en 1874 ne cessa d'aller de restructurations en refondations et c'est donc un modèle économique tout a fait différent qui va sortir la manufacture de l'ornière. Hamilton tient son nom de Andrew Hamilton, propriétaire du site de Lancaster sur laquelle l'usine est implantée. Hamilton Watch est né de la fusion de Lancaster Watch C° et de la société Keystone Aurora Watch (Illinois) diversifiée dans la fabrication notamment de machines. Parmi les fondateurs de la Hamilton Watch C°, on retrouve des investisseurs dans cette nouvelle firme et les dirigeants d'Aurora Watch C°.
Hamilton s'est d'abord spécialisée dans les Railroad watches qui représentaient un énorme marché en pleine expansion dès la fin du 19 ème siècle (après 1892, après l'accident de l'Ohio). En 1927, Hamilton rachète la Illinois watch C° en 1927 puis manufacture Howard watch C° en 1931.
La firme va lors de la seconde guerre mondiale se consacrer exclusivement à la fabrication de montres militaires pour les forces armées américaines en particulier. La demande est si importante qu'elle justifie que la manufacture ne produise plus de montres civiles. En février 1942, Hamilton fabrique 500 chronomètres par mois pour la marine américaine.
Hamilton s'est illustré par des calibres de haute précision dont le 992 B est sans doute le plus célèbre. La manufacture fut pionnière également dans le recours à l'Elinvar. Le spiral en Elinvar breveté en 1931 sera utilisé dans tous les mouvements de la firme par la suite. L'Elinvar est révolutionnaire par ses qualités d'élasticité et de résistance à la déformation quelle que soit la température. Les Suisses l'utilisent dès la fin des années 10 notamment pour des balanciers non coupés.
Superbe calibre Hamilton 940 de 1905- 21 rubis
Hamilton exerce ses talents dans les années 50 dans la montre électrique puis se diversifie sans doute un peu trop au point de se perdre tout en produisant des montres intéressantes jusqu'en 1969. La firme produit sous trois marques différentes, Hamilton, Vantage et Buren et ceci dans 6 usines dans le monde. La marque sera associée à Heuer et Breitling pour la fabrication d'un chrono automatique en 1969. Ensuite, la marque emboîte des mouvements extérieurs et notamment asiatiques avant d'être finalement rachetée par Swatch Group.
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Sujet: Hamilton Dual Time Mar 25 Avr 2017 - 7:43
Hamilton Dual Time
Les montres de poches à double fuseau utilisées par les personnels roulants de quelques compagnies de chemin de fer d'Amérique du nord constituent une sorte d'énigme dès lors que les catalogues des manufactures américaines n'en portent que peu de traces. L'une des plus connues est l'Hamilton Railway Special mais il y eu d'autres versions sans qu'il ne soit possible bizarrement de les lister et de les identifier clairement. Cela semble impossible et pour cause, il semble qu'aucune marque n'ait accepté de livrer ce type de montres et que les montres existantes soient des adaptations faites par les compagnies de chemins de fer qui auraient procédé directement à ces transformations, Hamilton ayant fini par accepter de livrer ce jeu d'aiguilles mais seulement dans le cadre d'un service fait sur la montre vendue initialement avec une seule aiguille des heures.
Ces montres possèdent donc "visuellement" une seconde aiguille des heures qui est toujours de couleur rouge. Le mécanisme de la montre est en tout point identique à la version classique et en porte les références. La différence n'est dont aucunement mécanique mais simplement située au niveau de l'aiguille. Cette seconde aiguille est solidaire par son canon avec l'aiguille "principale des heures" et les deux aiguilles ne peuvent donc afficher que l'écart sur la base duquel elles ont été assemblées, en l'occurrence une heure.
La montre est donc à double fuseau mais ne peut devenir "GMT" en ce qu'on ne peut élargir l'écart entre les deux aiguilles des heures. Le principe de ce type de montre et son utilité est de permettre de passer d'un fuseau à l'autre lors d'un trajet sans avoir à procéder à un réglage de l'heure en cours de trajet au moment du passage de l'un à l'autre des fuseaux. Cela est d'autant plus intéressant que le réglage de l'heure en roulant peut s'avérer acrobatique et que ces montres portant l'heure de référence ne doivent pas être déréglées par une manipulation intempestive en cours d'utilisation. Les risques sont d'autant plus fort sur les montres américaines que la mise à l'heure se fait par une targette située sous la lunette solidaire du verre et qu'il faut dévisser cette dernière pour y accéder. Le risque alors est de toucher les aiguilles, de les arracher et de ne plus pouvoir accéder à l'heure exacte. Il est à noter que les militaires de l'US Navy et de la Royal Air Force se feront fabriquer des montres spéciales avec des mises à l'heure au pendant, système usuel sur les montres suisses.
L'explication pourrait s'arrêter là mais il s'avère que les compagnies de chemins de fer étaient plutôt hostiles à ce type de montres en estimant qu'elles généraient des erreurs de lectures absentes lorsque la montre profitait d'un réglage lors du changement de fuseau. La montre ne fut donc pas autorisée par certaines compagnies de chemins de fer. La chose fut donc réglementée dès le 1er février 1929 dans les "Rules Governing Time Service For Employes in Train, Engine, Yard, Roadway and Station Service" des "Atchison, Topeka and Santa Fe Railway System".
"Article 3 : Les aiguilles des heures supplémentaires, peintes ou émaillées en rouge, peuvent être utilisées sur les montres portées par les personnels ferroviaires, ingénieurs, pompiers dans les divisions occidentales, du 1er district du Colorado, des Plaines, Pecos, Albuquerque et Arizona, Central et Mountain, ou Mountain et Pacific où l'heure standard est en usage."
Malgré cela, les fabricants sont restés rétifs à adapter leurs montres. Si Elgin mentionne bien ce type de pièces dès son catalogue de 1915, c'est pour préciser que le produit ne peut être livré que sur commande spéciale. Il faudra attendre les années 1950 pour qu'Hamilton place ce type de montres dans son catalogue officiel. Beaucoup de celles qu'on trouve parmi les plus anciennes n'ont jamais servi pour les chemins de fer mais sont des adaptations faites à partir d'aiguilles retrouvées par des collectionneurs qui au cours des 20 dernières années ont adapté eux-mêmes des montres (produites en grande quantité). Ces montres furent en fait davantage tolérées qu'encouragées et en aucun cas imposées par les services ferroviaires des compagnies américaines.
Ces Dual Time ne sont donc aucunement des montres à complication et la seule complication qu'on puisse réellement leur reconnaître est celle de la lecture de l'heure finalement complexifiée par cette double aiguille dont la différence de couleur n'est perceptible qu'en pleine lumière. Les Dual Time constituent des curiosités car elles sont assez rares surtout en Europe. Il existe des versions suisses de ce type de montres et d'aiguilles mais elles sont extrêmement rares et ne sont venues que pour apporter une "équivalence" à l'offre américaine.
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Sujet: Hamilton : L'histoire d'un dérapage incontrolé... Dim 11 Juin 2017 - 16:08
Hamilton : L'histoire d'un dérapage incontrolé...
Hamilton est sans doute la manufacture horlogère la plus atypique qu'il soit. Le parcours de cette grande maison l'a portée au firmament avant que ses dirigeants ne la conduisent dans une voie sans issue lors de la seconde guerre mondiale et ceci malgré une communication grand public très élaborée. L'histoire d'Hamilton résume à elle seule ce qu'un cumul d'erreurs stratégiques peut casser dans le succès pourtant préécrit d'une firme industrielle.
Le seconde moitié du 19ème siècle voit naître aux Etats-Unis comme en Suisse plusieurs manufactures qui vont profiter de l'élan de l'ère industrielle pour se faire une place de choix dans l'industrie horlogère. La création des industries de tous domaines de compétences et d'activités a regroupé sur un même lieu de travail des gens qui antérieurement travaillaient de manière isolée. L'interdépendance des activités au sein des entreprises a imposé que l'ensemble des personnels exerce leur métier avec des horaires communs et cette nouvelle organisation du travail génère une immense demande de pièces d'horlogerie précises et fiables.
La montre à ancre qui se fabrique en série au même moment, plus précise et fiable que les montres à cylindre, suscite un engouement qui la fait désirer dans tous les mieux socio-professionnels. Concrètement, ce sera la finition des montres, l'empierrement des mouvements, la décoration et les anglages ainsi que le type d'emboitages en métal commun ou précieux qui vont créer une différence d'une marque à l'autre, d'un continent à l'autre. Mais de 7 à 26 rubis, la précision des montres permet à tous d'accéder à la détention individuelle de l'heure et pour la première fois de partager une heure précise et universelle... C'est la conquête sociale de l'heure.
La firme Hamilton fait suite à la Lancaster Watch Company qui elle-même était issue de la "Adams and Perry Watch Company" du nom de deux associés "d'infortunes" qui échouèrent dans la création d'une compagnie horlogère faute de capitaux. Leur projet installé à Lancaster en 1874 ne cessa d'aller de restructurations en refondations et c'est donc un modèle économique tout a fait différent qui va sortir la manufacture de l'ornière. Hamilton tient son nom de Andrew Hamilton, propriétaire du site de Lancaster sur laquelle l'usine est implantée. Hamilton Watch est né de la fusion de Lancaster Watch C° et de la société Keystone Aurora Watch (Illinois) diversifiée dans la fabrication notamment de machines. Parmi les fondateurs de la Hamilton Watch C°, on retrouve des investisseurs dans cette nouvelle firme et les dirigeants d'Aurora Watch C°.
Quand la firme Hamilton est créée, l'horlogerie se cherche. Il y a bien entendu un intérêt pour les montres et un potentiel immense de consommateurs à équiper mais les thèmes de communication de l'horlogerie sont enfermés dans l'élégance, le prix et la précision. Le marché du rail américain va s'intéresser aux montres de précision à l'issue d'un accident survenu le 19 avril 1891 près de Cleveland dans l'Ohio. Ce jour là deux trains de voyageurs se télescopent sur une voie unique tuant 9 d'entre eux. L'enquête engagée aussitôt démontre que le mécanicien de l'une des machines s'est engagé trop vite à cause de sa montre qui avançait de 5 minutes. Les compagnies de chemins de fers américaines en tirent immédiatement la conclusion qui leur faut équiper le personnel de montres précises et sollicitent après un accord commun un horloger de Cleveland, Webb C.Ball pour qu'il rédige un cahier des charges avec des normes très strictes en matière de montres de service.
Dès lors les montres des chemins de fers vont être encadrées par un règlement draconien qui impose des calibres de 19 ou 20 lignes à échappement à ancre, à simple plateau comptant au moins 17 rubis et ayant au moins une précision de 30 secondes par semaine ce qui correspond à une précision de chronomètre. Ces montres seront baptisées "Railroad watch" qui les distingue des "Train watch" qui ne sont que des montres fantaisie dont le fond ou le cadran est orné d'une locomotive. Hamilton va trouver dans ce contexte un créneau très favorable pour placer ses montres et organiser la thématique de sa communication. La manufacture Hamilton va ainsi se spécialiser dans les Railroad watches qui représentaient un énorme marché en pleine expansion dès la fin du 19 ème siècle. En 1927, Hamilton rachète la Illinois watch C° en 1927 puis la manufacture Howard watch C° en 1931.
Jusqu'à la seconde guerre mondiale, Hamilton développe des moyens considérables pour améliorer la précision de ses montres et proposer des pièces de poche particulièrement fiables. Les dirigeants d'Hamilton sont si préoccupés et si satisfaits de leurs résultats liés au Railroad qu'il finissent par en oublier de faire passer les montres de la poche au poignet. Bien entendu, le catalogue Hamilton propose des montre bracelets mais les Railroads restent la spécialité d'Hamilton qui ne fait pas grand chose pour faire évoluer cette image aux yeux du public. Ainsi de moderne et innovante, l'image grand public de la manufacture devient un peu désuète et ancrée dans le passé. Les ventes stagnent au tournant des années 1940 quand la guerre va considérablement changer la donne.
La deuxième guerre mondiale crée un immense besoin en montres de tous types -Bracelets, poche, chronographes, montres 24 heures, chronomètres de marine, chronomètres de bord, etc. Malgré tous les efforts des manufactures suisses, il leur était impossible de satisfaire à la demande des armées américaines, anglaises et françaises. En 1941, le gouvernement américain sollicite des manufactures américaines un effort exceptionnel pour que chaque GI ait sa montre dans son paquetage. Des commandes sont donc passées auprès de plusieurs manufactures mais celle qui s'engagea le plus loin dans l'effort militaire fut sans nul doute Hamilton. La firme développa avec ses ingénieurs en moins de deux ans des pièces exceptionnelles d'une précision supérieure aux montres suisses. Son chronographe devint ainsi une référence pour les bombardiers américains ... En 1944, Hamilton produisait autant de chronomètres de marine que toutes les manufactures suisses additionnées.
L'effort de guerre d'Hamilton obligea l'entreprise a cesser toute production civile et la marque s'en expliqua par voie de presse en 1943...
Jusqu'à la fin de la guerre, toute la production civile d'Hamilton cesse au profit de l'approvisionnement de l'armée américaine et beaucoup plus accessoirement de l'armée anglaise. A la toute fin de la guerre, Hamilton "reprend contact" avec la clientèle civile et use de sa spécialisation militaire pour valoriser l'image de ses montres. La manufacture communique alors en expliquant que la guerre lui a permis de se spécialiser dans la plus haute précision et qu'elle peut désormais livrer quelques pièces aux civils.
Le dispositif de communication est habile mais nous sommes en 1945 et la montre de poche est déjà totalement dépassée. Les autres maisons en sont aux débuts des montres bracelets automatiques quand Hamilton en est encore à s'émerveiller d'avoir produit des chronomètres de marine, en partie copié d'ailleurs sur les modèles suisses d'Ulysse Nardin. Le décalage est patent et malgré des efforts énormes, la firme américaine qui sera l'un des fournisseurs de montres de l'armée lors de la guerre du Vietnam ne remontera jamais son image et ne rattrapera pas son retard technologique et de perception par les consommateurs. Des tentatives liées à la montre électrique des années 1960, il ne reste aujourd'hui presque rien.
Il faudra attendre que les Suisses via Nicolas Hayek s'intéressent à Hamilton pour que la marque retrouve une dynamique équivalente à ce que la manufacture connaissait dans les années 1930.
Les années de guerre ont suffit à placer Hamilton sur un chemin sans issue malgré un succès technologique prodigieux, le développement d'un outil industriel exemplaire et le travail d'un bureau d'études irréprochable dont le travail fut couronné de succès. Il y avait tout, tout sauf la dimension commerciale. L'histoire démontre que celle-ci reste le nerf de la guerre, un paramètre essentiel qui fait qu'on peut faire de très bonnes montres mais que si elles ne se vendent pas, cela ne sert à rien. Hamilton en se mobilisant pour un seul client -l'armée américaine- sur une courte durée a lâché une clientèle durable, a axé sa technologie sur des pièces qui n'étaient pas grand public et dont les consommateurs se sont désintéressés, et a raté sa communication en s'ancrant après la guerre sur son travail pendant celle-ci et en oubliant le futur de son développement. Il y a là de grandes leçons à tirer ...La première est sans doute qu'il ne faut jamais oublier ses clients.
Pour en lire davantage : https://forumamontres.forumactif.com/t208967-hamilton
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Sujet: Hamilton : Les montres militaires G.T.C. en 24 heures chrono Jeu 1 Nov 2018 - 14:18
Hamilton : Les montres militaires G.T.C. en 24 heures chrono
Hamilton Watch C° fut l’une des marques américaines les plus prospères pendant la seconde guerre mondiale. La firme mit toute son énergie à fabriquer des montres militaires pour répondre aux commandes de l’armée américaine au point de se consacrer en quasi-totalité à cette production. Parmi les modèles emblématiques livrés par la manufacture, la montre chronomètre G.C.T (Greenwich Civil Time) fut l’un des instruments les plus précis jamais livrés.
Une montre au mouvement déjà affranchi
Lorsqu’éclate la seconde guerre mondiale, consciente qu’il faut que ses troupes se coordonnent avec des instruments de mesure du temps précis et fiables, l’armée américaine équipe ses hommes de tous grades, de montres pour lesquelles elle impose au fabricant, un cahier des charges drastique. Plus que tout autre corps désireux de précision, « Army & Navy » (Les lettres « AN » sur le fond de boite) font naturellement appel à Hamilton watch C°, compagnie florissante et réputée notamment pour ses montres de chemins de fer dites « Railroad watches ». Hamilton fabrique en effet, une montre conforme aux exigences extrêmes imposées par les compagnies de chemins de fer depuis qu’en 1891, un accident dû à une mauvaise synchronisation de trains sur une ligne unique, a conduit ces dernières à acquérir des chronomètres pour leur personnel.
Le mouvement mis au point par Hamilton, le 992 B d’une taille (américaine) de « 16 size » soit 19 1/8 lignes, fut doté de 21 rubis et profita de 6 réglages liés aux températures et à la position de la montre. Il devint sans doute le plus connu des calibres de montres de poches américaines. Pendant la seconde guerre mondiale, « The Army Air Corps » connue aujourd’hui sous le nom de l’US Air Force, sollicite Hamilton pour la livraison de montres dotées d’un cadran et d’un mécanisme proposant un affichage de type « 24 heures ».
Les ingénieurs de la firme préfèrent modifier ce mouvement et l’adapter aux besoins de l’armée de l’air américaine plutôt que d’en créer un autre. Ils font donc évoluer l’échappement, le train de rouages et adaptent le cadran et les aiguilles qui, sur la nouvelle version, comporte une trotteuse centrale. Le mouvement est baptisé 4992 B et passe à 22 ou parfois 23 rubis. Le cadran n’est pas marqué au nom d’Hamilton mais comporte 3 lettres en majuscules : «G.C.T.» pour Greenwich Civil Time. Le fond des montres comporte les numéros d’inventaire de l’armée de l’air et la référence du contrat qui lie l’armée à ces livraisons. Par exemple, AF 42 -42366 Contract NO W535 ac-28072 fera présumer d’une montre produite en 1942 et livrée dans le cadre d’un contrat de l’armée référencé comme précédemment indiqué. La montre dont les boites étaient fabriquées dans leur quasi-totalité par Keystone étaient en général en nickel chromé et parfois en argent. La mention AN 5740 est une référence militaire qui correspond aux montres dites « Master Navigational Watch », soit les montres de ponts donnant à bord une heure de référence.
Pour son balancier monométallique et son spiral, Hamilton Watch C° a recours à l’Elinvar, alliage de pointe peu sensible aux variations de température et donc favorable à une meilleure précision quelles que soient les conditions d’utilisation. La firme était en la matière très au fait des technologies les plus modernes et à leur mise en œuvre industrielle.
Un usage bien contrôlé
Ce type de montres fut engagé d’une part, dans des vols de courtes distances dans des missions ponctuelles et était réputé être d’une précision redoutable et d’autre part, dans des opérations de la Marine et de l’armée de l’air de grande envergure. Profitant d’un système de stop seconde lorsque la couronne de mise à l’heure est soulevée, le mouvement pouvait facilement être synchronisé avec d’autres montres ou des horloges de bord sans dévier de l’heure donnée en amont. Cela pouvait être essentiel voire vital quand sur des missions de plusieurs heures, des tirs devaient être coordonnés entre différents groupes d’hommes en intervention. Les montres une fois fabriquées étaient emballées individuellement dans des boites comportant toutes les références du contrat dans le cadre duquel elles avaient été produites et livrées. Chaque boite mentionnait une date de « péremption » renvoyant à une révision de la montre si celle-ci était mise en service au-delà d’un laps de temps trop long, à l’issue duquel Hamilton ne pouvait plus garantir la précision de la pièce à cause notamment de l’état des huiles de lubrification des mouvements. La qualité des pièces était celle de chronomètres reconnus parmi les meilleurs.
Pour préserver la montre dans des milieux hostiles notamment à cause des chocs, plusieurs systèmes furent validés par l’armée dont une boite vitrée dans laquelle la montre était placée en suspension, maintenue en place par des systèmes assortis de ressorts amortisseurs. Plus simplement, il fut également proposé une sorte de surboite en matière souple absorbant les chocs directs et venant recouvrir la carrure et le fond.
La boite de livraison - La date de péremption après la dernière révision est mentionnée par sécurité sur la boite
Ces pièces étaient très soignées par leurs utilisateurs. C’est sur elles que reposait l’heure de référence de l’équipage. L’un des membres de celui-ci, le plus souvent le chef quart était chargé de veiller à ce que le chronomètre du navire soit remonté chaque jour et toujours parfaitement entretenu et en état de marche. Il devait en outre veiller à la sécurité de l’instrument en l’enveloppant en cas de risques de casse et le cas échéant, l’emporter avec lui si l’équipage était contraint de quitter le navire.
Hamilton sous contrat militaire perdit ses marchés civils
Hamilton signa plusieurs contrats, celui de 1943 étant de plus de 24 000 pièces pour livrer des 4992 B dans une période si prospère pour la firme grâce aux commandes de l’armée, que celle-ci dut réduire à minima ses productions « civiles », compromettant ainsi son avenir et son équilibre économique. Les premières livraisons de chronomètres Hamilton aux Militaires datent de février 1942. La manufacture américaine produira jusqu’à 500 chronomètres par mois. La quasi-totalité des contrats liés à l’ensemble des livraisons de montres militaires furent résiliés dès la fin de la guerre alors que toutes les montres commandées n’étaient pas encore livrées, laissant Hamilton Watch C° dans une situation difficile. Même si la manufacture fournit aussi les armées canadiennes, anglaises et plus étonnamment les forces russes, la fin de la guerre et l’arrêt des livraisons ne fut pas sans déséquilibrer l’entreprise.
Plusieurs marques fabriquèrent ce type de montre, l’aéronavale française passa par exemple par la maison Breguet qui lui livra une montre marquée non pas G.C.T. mais T.U. pour Temps Universel et dont le mouvement était celui d’un chronographe de type Valjoux 5 dépouillé de sa partie chrono.
Les montres ne comportaient jamais d’aiguilles ou de cadrans recouverts de matière luminescente. En revanche, les aiguilles étaient blanches tranchant avec le noir mat des cadrans. Leur forme dite « Poire » était déterminante pour la lisibilité de l’heure sans risque d’erreur en une fraction de secondes. Le cadran séparant bien les minutes et les heures rend enfin impossible la confusion entre les minutes, les secondes pointées par la longue trotteuse centrale à contrepoids et les heures. La version fabriquée par Hamilton est de loin la plus répandue car distribuées à l’armée américaine dans les plus grands volumes.
Ces montres furent actrices et témoins de la libération de l’Europe, aux mains d’une armée de pointe qui engagea d’immenses moyens au service de la liberté et de la démocratie. Elles restent aujourd’hui des pièces de grand intérêt même si la lecture d’une montre graduée sur 24 heures impose un temps d’adaptation à tout possesseur d’un modèle de ce type.
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Sujet: Hamilton Khaki Field Mechanical : Une légende au poignet Mar 27 Nov 2018 - 8:53
Hamilton Khaki Field Mechanical : Une légende au poignet
L'idée d'Hamilton de rendre elle-même hommage aux montres que la manufacture d'autrefois fabriquait pour l'armée américaine est une excellente initiative. Placer la montre sur un bracelet Nato dont la texture se rapproche des montres livrées aux armées est aussi une bonne approche du sujet. Cela méritait un test de l'objet dont le prix public de 420 euros en fait une montre plus que compétitive pour une pièce "Swiss made".
Une montre à l’esthétique soignée
L’Hamilton Khaki Field Mechanical est livrée montée sur un bracelet Nato dont les passants sont en cuir et qui est renforcé également de cuir sur les perçages prévu pour l’ardillon. La pièce est légère et plate car le mouvement à remontage manuel est dénué d'un pont d'automatique qui en augmente nécessairement l'épaisseur. Le mouvement est un ETA 2801 sans date. Ce mouvement d'une architecture classique n'est pas décoré et ne présente pas un intérêt esthétique particulier. L'initiative de retenir un fond plein et non un fond vitré pour ce modèle est donc tout à fait judicieuse. Le cadran est noir et dessiné à l'identique des montres historiques servies depuis la seconde guerre mondiale et jusque dans les années 1980 aux armées américaines. Les aiguilles sont teintées "façon vieux radium" ce qui rend la lecture agréable. Les index luminescents auraient toutefois pu être un peu plus colorés pour être assortis à la couleur des aiguilles. La boite en acier inoxydable est sablée comme l'étaient les boites en inox livrées à l'US Army à partir de 1949. La version proposée aujourd'hui est plus grande que les versions originelles qui avaient un diamètre de 33 mm. Hamilton a retenu une taille de 38 mm. C'est une bonne idée car la couronne surdimensionnée en épaisseur débouche sur une largeur totale de 42 mm, c'est à dire que la couronne crée une excroissance de 4 mm. Comme le remontage est manuel, cette couronne large est évidemment très agréable à manipuler et cela ajoute au côté militaire de la montre. Il faut toutefois noter que les versions strictement militaires les plus récentes des années 1970 et 1980 comportaient des couronnes moins épaisses car les soldats les arrachaient involontairement avec les uniformes ou lors des opérations et exercices.
Versions comparées du modèle historique réglementaire de l'US Army et de sa réédition.
Le verre autrefois synthétique est aujourd'hui en saphir bombé sans anti-reflet. Un antireflet interne aurait été un atout notable car le saphir prend la lumière comme un miroir. Il offre l'avantage de la résistance aux rayures. Une boite sablée "antireflet" aurait mérité un traitement du verre. Si autrefois, les verres en plastique n'étaient évidemment pas traités, ils prenaient beaucoup moins la lumière car plus petits et la matière était plus docile. La boite est étanche à 50 mètres, ce qui est un peu juste, car avec une couronne aussi épaisse, on peut facilement intégrer un joint de couronne en pression, ceci, sans vissage de celle-ci et proposer une étanchéité jusqu'à 120 à 150 mètres.
L’épreuve du porté
Une fois au poignet, la montre ne trouve pas immédiatement sa place. Le bracelet Nato est difficile à équilibrer. On peut évidemment mieux centrer la montre mais, malgré tout, la boucle ne se place pas parfaitement au centre du poignet et la montre tourne un peu ce qui est plutôt désagréable. L'inconvénient est mineur et il faut donc adapter un bracelet en cuir car un bracelet en silicone ne serait pas cohérent avec la pièce. On trouve de très beaux bracelets en veau pour moins de 100 euros mais c'est un surcoût à bien intégrer lors de l'achat. Les cornes étant percées, le montage démontage des pompes est facile sans rayer les cornes et à la portée de tous. Une fois sur cuir, la montre est très confortable à porter. La couronne ne blesse pas le poignet ce qui est fréquent avec des couronnes épaisses. Ici, aucune gêne particulière n'est à déplorer. La montre est jolie, bien dimensionnée et sympathique. Il lui reste à passer l'épreuve de la précision.
La taille de la montre la rend adaptable à tous les poignets
Un calibre ETA 2801 est capable d'une précision chronométrique à moins de 2 ou 3 secondes par jour. Hamilton profite du savoir-faire d'ETA et sur l'exemplaire testé puisé au hasard dans une série, le résultat est à +2 secondes par jour. C'est excellent pour une montre à 420 euros. Une telle dérive était impensable il y a encore quelques années sur des pièces dans cette catégorie de prix. L'écart est comparable aux pièces anciennes testées en parallèle de cette Hamilton contemporaine. Celles-ci sont en effet après révision également à +2 secondes par jour. Comment un mouvement qui a plus de 40 ans et seulement 7 rubis peut-il être aussi précis qu'un 2801 ETA neuf qui comporte 17 rubis ? La question reste un mystère mais atteste de la qualité mécanique des versions originelles de ces montres militaires.
Une montre d'autant plus plate que son remontage est manuel.
Cette Hamilton Khaki Field Mechanical est au final une excellente montre à un prix très étudié qui la rend très désirable. Le client en a pour son argent surtout si l'on considère que la pièce dispose d'un calibre ETA "Swiss Made" réputé pour sa fiabilité et sa résistance. Hamilton n'a ici pas commis d'erreur et cet hommage a le mérite d'avoir une légitimité historique. C'est sans nul doute un point à souligner dans un contexte où la multiplication des hommages par des maisons parfois éphémères donne plutôt l'impression d'un piratage. Cette pièce simple et au prix très attractif est digne des modèles Hamilton dont elle est issue historiquement et c'est là, un hommage non seulement aux versions militaires postérieures aux années 1940, mais aussi à la marque elle-même.
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Sujet: Quand 1917 renvoie à la seconde guerre mondiale-Les militaires Hamilton & Elgin Jeu 11 Avr 2019 - 19:52
Quand 1917 renvoie à la seconde guerre mondiale
La seconde guerre mondiale provoque, dès 1939, un immense besoin horloger. Il faut alors équiper chaque navire de guerre, chaque soldat, chaque officier, dans tous les corps d'armée et dans un délai très court. L'armée américaine tente de ne pas renouveler ce qui s'était produit lors de la première guerre mondiale où il avait fallu faire appel massivement aux fabricants suisses. Cette fois, les manufactures américaines sont largement mises à contribution au point, pour certaines d'entre elles comme Hamilton, de cesser pendant la guerre, la production civile et de privilégier la fabrication pour les armées.
Un modèle « standard » pour l’armée américaine
Au début de la guerre, même s'il subsiste des utilisations bien précises pour les montres de poche ou de bord, l'essentiel "en volumes" de la commande militaire porte sur des montres bracelets simples à trois aiguilles. Selon les besoins, les cadrans sont noirs ou blancs crème et, la plupart des aiguilles et cadrans, sont peints avec une matière luminescente à base de radium pour faciliter la lecture nocturne de l'heure.
Si les premières livraisons sont en métal chromé, on voit apparaître dès la fin de la guerre et surtout après celle-ci, des montres militaires avec des versions de boites en acier inoxydable, en particulier chez le fabricant de boites "Star", qui sera ensuite relayé par la maison Keystone. Pratiquement toutes les maisons américaines sont sollicitées pour emboiter des quantités considérables de montres aux mouvements de qualités variables, mais dont la précision est en général constante. De 7 à 17 rubis, les petits calibres "Size 8" soit 23,7 mm ou 10,5 lignes ont une finition qui varie de « sommaire à soignée ».
Trois modèles réglementaires de l'US Army
La dynastie Hamilton
Parmi les mouvements les plus intéressants, les plus anciens sont les 987 et 2987 d’Hamilton. Ils offrent l’intérêt d’un empierrement de 17 et 18 rubis qui les classent dans le haut de gamme. Par la suite, le plus beau calibre « courant » de montre bracelet est sans doute le 747 à 17 rubis d'Hamilton avec ses ponts anglés et sa décoration à côtes. Le mouvement produit de 1947 à 1954 est, comme ses prédécesseurs, d'une redoutable précision. Il équipe nombre de montres civiles après 1948. Parallèlement, le ministère de la défense américain recycle des montres livrées à la fin de la guerre en métal chromé et y fait adapter des boites en acier inoxydable. Les quantités sont si importantes qu'il est difficile de discerner ce qui est une montre "reconditionnée", une montre "dans son jus" c'est à dire produite pendant la période de conflit et une montre totalement postérieure. Les gravures de fond de boites ne semblent pas être un critère pertinent même si elles apportent une certitude quant au passé militaire de la pièce. Les numéros de série gravés sur les mouvements participent au faisceau d’indices quant à l’origine de la pièce.
La qualité des calibres était une condition d'accès aux marchés des armées
Parmi les montres bracelets militaires du département américain des armées, on recense des pièces à cadran noir ou à cadran blanc, des montres sans trotteuse, à trotteuse centrale ou à petite trotteuse à six heures. Hamilton, Elgin, Waltham, Bulova en sont les principaux fournisseurs avec d'autant plus de ressemblance visuelle que les boites sortes de la même usine. Conçues pour être étanches, ces montres ont un diamètre de 32 mm hors couronne et 36 mm avec celle-ci car les couronnes sont épaisses pour faciliter le remontage et la mise à l'heure. Cette caractéristique inscrite dans le cahier des charges militaire est commune à toutes les montres. Le fond vissé « à pas long » qui bute sur un joint, contribue à l’étanchéité efficace des boites.
Le calibre 554 d’Elgin
Elgin livra à l'US Department (ministère de la défense) son calibre 554, fabriqué de 1943 à 1952. Celui-ci, était reconnu pour la précision chronométrique de son mouvement. Empierré seulement de 15 rubis et doté d'une finition simple, la performance est d'autant plus remarquable que la manufacture Elgin en produisit jusqu'à 450 000 exemplaires par an en 1950 et 1951. Sur la totalité de la période de fabrication, Elgin fabriqua presque 2 millions de mouvements 554 ! Un chiffre qui aujourd'hui ferait rêver plus d'un fabricant pour une seule référence de calibre.
Vers un nouveau service actif civil
Si les montres de petit diamètre sont passées de mode, les versions militaires demeurent des pièces de collection, portées par les amateurs éclairés en raison de leur histoire. Les modèles en métal chromé produits pendant la guerre ont des boites souvent usées laissant apparaître le métal blanc chargé de nickel allergisant dont le contact avec la peau peut laisser des traces désagréables. Il est donc plus facile de porter au quotidien les versions plus tardives avec des boites en acier inoxydable. Celles-ci au passé tout aussi militaire n'ont certes pas servi pendant les années de guerre mais sont ouvertes à de nouvelles années de service actif auprès des amateurs. Le radium encore présent sur les aiguilles et sur les cadrans fera sans doute hésiter à les porter durablement mais le danger est surtout présent lors du démontage de la montre ou du dépôt du verre.
Les modèles sont visuellement identiques d'un fabricant à l'autre
Les modèles plus tardifs de montres bracelets militaires de l'armée américaine ont plus généralement un cadran noir, un diamètre plus large de 33 mm hors couronne et une trotteuse centrale. Les mouvements sont le plus souvent à 7 rubis sans pour autant perdre de leur précision. Les finitions sommaires témoignent d'une recherche d'économie. Les très gros volumes fabriqués notamment pendant la guerre du Vietnam ont pour conséquence de limiter la cotation des pièces et de les rendre facilement accessibles aux amateurs. On assiste toutefois, ces dernières années, à une augmentation du tarif chez les marchands.
Les montres montées sur un bracelet Nato retrouvent une nouvelle jeunesse
On porte en général ces pièces sur un bracelet en textile de type Nato ou sur un cuir brut. Les anses étroites de 16 mm sont mieux adaptées à un bracelet tissé. Ces montres s'intègrent facilement sur les poignets féminins. Elles tendent d'ailleurs à être recherchées par les dames. Elles trouvent avec cet usage mixte hommes/femmes une nouvelle carrière inattendue, éloignée des exercices militaires des années 1950. C’est en quelque sorte une pacification d’un instrument militaire.
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Sujet: Khaki Pilot Pioneer Mechanical : La montre Hamilton de l'armée de l'air anglaise Sam 18 Jan 2020 - 11:44
Khaki Pilot Pioneer Mechanical : La montre Hamilton de l'armée anglaise W 10 reprend du service
Quand en 1972 le ministère de la défense britannique, "MOD" pour Ministry Of Defence, se met en quête d'une montre pour la Royal Air Force, la Royal Navy et l'Army, il organise une opération d'envergure dont le programme est de rééquiper l'ensemble des militaires de pièces d’horlogerie ayant la précision de chronomètres et une résistance à toute épreuve. L'objectif est de remplacer le modèle, appelé "Smith's W10", dernière montre "mécanique" à usage général livrée à l'armée britannique.
Une montre historique
A l'époque, trois maisons sont en mesure de livrer le MOD dans les quantités et la qualité voulues. Les trois sont candidats et Hamilton se détache pour effectuer les premières livraisons. La manufacture d'origine américaine est habituée aux livraisons faites auprès des militaires. Elle livrera la montre baptisée couramment W10 à l'armée anglaise de 1973 à 1976.
Au-delà de la précision, le ministère de la défense veut des boitiers bien étanches et sécurisés en inox et donc peu allergisants. Il souhaite une lisibilité intuitive des cadrans dotés d'index luminescents et de chiffres arabes se détachant sur un fond noir. La résistance à l'humidité et de manière plus large, l'étanchéité de la montre apparaissent comme un besoin fondamental sur lequel les militaires n'imaginent pas de transiger. Tous les corps d'armée sont susceptibles d'évoluer dans des milieux hostiles, aquatiques en particulier et des atmosphères humides, tropicales ou empoussiérées.
Une pièce apte au service actif
Hamilton règle la question de l’étanchéité en proposant une montre dotée d'une boite monobloc, c'est à dire dont le fond est non pas vissé ou clipsé, mais solidaire de la carrure. Ainsi, la montre est à l’abri d'un problème de joint desséché ou déformé et d'un bricolage par un soldat en mal d'accéder au mouvement. L'acier est épais, les barrettes qui tiennent le bracelet sont fixes et indémontables, le verre est en plexi épais et bien solide. La boite de forme tonneau de 35 mm de large hors couronne et de 41 mm dans sa partie plus longue est bien adaptée à la plupart des poignets. Elle assure un confort au porté et se place facilement. Le design de ces boites est en outre très à la mode dans ces années-là. L'entrecorne de 18,5 mm impose aujourd'hui un choix de bracelet légèrement plus étroit ou légèrement plus large d'un demi-millimètre.
Un mouvement révolutionnaire
Le mouvement embarqué dès 1973 est un ETA 2750 de fabrication suisse, rebaptisé C649 par Hamilton, à remontage manuel de 17 rubis et d'une réserve de marche de 50 heures ce qui pour l'époque était une performance. Certes une telle durée est inférieure aux 80 heures offertes par la réédition du modèle de 2019 qui embarque un calibre H50 riche de 80 heures de réserve de marche, mais 50 heures est une durée supérieure à 2 jours et donc une sécurité quand le soldat oublie de remonter sa montre. En 1973, c'est une performance. Ce calibre de 15,5 lignes soit 26 mm évolue à 21 600 alternances par heure et il a la capacité de tenir le réglage d'un chronomètre. Au début des années 1970, il s’agissait d’un mouvement révolutionnaire car sa fabrication nécessitait moins de pièces que les précédents mouvements utilisés, ceci en réduisant le nombre de ponts entrant dans la fabrication. Le mouvement s'avérait ainsi plus robuste, plus fiable et d'un entretien facilité. La réduction du nombre de pièces libérait en outre un peu d'espace et autorisait de placer un barillet plus grand. Cela permettait de loger un ressort plus long portant la réserve de marche à 50 heures au lieu des 36 ou 38 heures couramment rencontrées. Ce mouvement fut au cœur des exigences du MOD qui l'imposa pour des livraisons par d'autres fournisseurs après 1976.
Un garde-temps universel
La "W 10" avec sa forme caractéristique fut distribuée aux 3 branches du ministère de la défense. On sait quel corps a reçu la montre en dotation par la lecture de la gravure inscrite sur le fond. Le code "W10" renvoie à l'Army, tandis que celui des montres de la Navy est "0552" et celui de la RAF "6BB". Les autres chiffres gravés se décodent ainsi : 6645 est le numéro de nomenclature OTAN d'une montre, 99 est la codification du pays, ici le Royaume-Uni, 523-8290 signifie que la montre-bracelet est à usage général. La Broad-Arrow, quant à elle, affecte la pièce à la propriété du MOD. Enfin, la dernière série de chiffres soit, par exemple, 21630/73 est un numéro de série suivi des deux derniers chiffres de l'année de mise en service de la montre. On connait ainsi tout d'une pièce à la lecture des indications gravées sur le fond.
Une réédition fidèle à l'originale
La montre des forces anglaises est aujourd'hui rééditée par Hamilton et prend le nom de Khaki Pilot Pioneer Mechanical. Son boîtier en acier inoxydable de 33 mm est mat comme la version originale de 1973 afin d’éviter tout miroitement inopportun. N'oublions pas que la montre servait aux pilotes. Son cadran, mat également, et son verre en forme de boîte avec revêtement antireflet sur les deux faces garantissent une lisibilité optimale. Cette version mise au goût du jour est fidèle au modèle des années 70 jusque dans ses plus petits détails. Son cadran noir possède une structure unique, qui évoque le boîtier grainé des appareils photo et des jumelles antérieurs à l’ère du numérique. Le mouvement à remontage manuel comme celui de la version historique profite des dernières technologies et évolue à 21 600 alternances par heure comme son aîné mais porte 80 heures de réserve de marche. Un bracelet NATO en textile résistant, gris orage ou en cuir brun vintage, vient compléter son design militaire.
La nouvelle Khaki Pilot Pioneer Mechanical est pleinement dans la lignée de son ancêtre de 1973 et réitère l'exploit d'une réserve de marche toujours plus longue pour satisfaire aux besoins du 21ième siècle. Digne héritière d'un modèle emblématique, elle procure au poignet la même émotion que la version née il y a près de 50 ans. Sa modernité participe à son pouvoir de séduction, la beauté de la pièce fait le reste.
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