Montres et aviation : La conquête des airs et des heures - Episode 3
La Première Guerre mondiale a fait opérer un pas de géant à l'horlogerie. D'abord, il a fallu équiper les militaires de montres précises et fabriquées en grande quantité et les exigences se sont diversifiées. Terre, air, mer n'ont jamais eu un tel sens puisque tous les corps militaires ont avancé leur besoins spécifiques.
Pendant la guerre ce sont donc les montres bracelet qui sont devenues un besoin jusqu'alors marginal. Les aviateurs ont porté ces montres souvent héritées des modèles de poche et grossièrement adaptées avec des anses soudées sur les boites.
Les calibres des montres de col des dames se sont mis à être emboités dans des montres bracelet pour messieurs. Les montres de poche montées dans des bracelets spéciaux se sont retrouvées aux poignets des militaires et des pilotes en particulier, Certaines montres de poche élevées au rang de chronomètres sont passées sur les ponts des navires et au tableau de bord des avions dans des systèmes d'attaches en cuir ou en laiton à côté des altimètres.
La demande de chronographes balbutiante avant la guerre est devenue une priorité militaire. Les montres d'éclaireurs servaient à mesurer depuis les avions la vitesse de progression des troupes ennemies en apparaissant dans le coin des photographies faites depuis les avions. La première guerre a vu exploser la demande de montres "instruments de précision" pour coordonner les actions, mesurer les distances et les temps de vol, connaitre par la durée la réserve de carburant, faire chauffer les moteurs …
Les manufactures horlogères tournent à plein et font au cours de la première guerre d'immenses bénéfices qui un siècle plus tard restent un tabou parce que de nombreuses maisons installées dans le territoire neutre suisse se transforment en consortium d'armement, livrent du laiton pour fabriquer des obus, imaginent des systèmes altimétriques de déclenchement des bombes et vendent des instruments de précision à qui les paie c'est à dire aux deux camps.
L'horlogerie anglaise entre en guerre avec Smith & Son
La fin de la guerre s'ouvre donc sur l'après d'une période faste pour l'horlogerie et personne ne croit vraiment en l'avenir de l'aviation civile. Les appareils volants sont trop petits, fragiles, pas assez rapides, chers, pas assez fiables et le transport de passagers semble inaccessible.
L'aviation doit faire ses preuves et cela va pousser les constructeurs et les pilotes à cultiver les défis et les records en se faisant accompagner d'une communication efficace portée par des journaux et des journalistes pour relayer les exploits. L'aviation doit être spectaculaire, passionner le public et attirer les foules. Cette logique va nécessairement intéresser les industries périphériques qui comprennent le parti qu'elles peuvent tirer de la notoriété de l'aviation. L'horlogerie va donc accompagner l'essor de l'aviation avec des contrats de partenariat, du sponsoring, de la réclame et du partage d'image. Cela va durablement sceller les deux industries au point que, plus d'un siècle plus tard, l'horlogerie fait partie intrinsèquement de l'aviation militaire et civile.
Les fabricants de montres ont vécu si confortablement de la guerre qu'ils se demandent en 1919 comment ils vont pouvoir gagner plus avec l'arrêt du conflit et la perception du peu d'avenir laissé à l'aviation.
A suivre A lire
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