Les horlogers du 18ème puis du début du 19ème furent confrontés à une question difficile liée à la généralisation des chronomètres de marine à bord des bateaux qui avaient besoin d'une heure précise pour le calcul de la longitude. En effet, l'air marin provoquant l'oxydation des spiraux faisait perdre aux chronomètres leur précision et rendait donc aléatoires les calculs de repérage des bateaux par rapport aux cotes et récifs.
Si le 18ème siècle fut une quète à l'isochronisme dans la mesure où la recherche portait sur la forme à donner au spiral et à son attache, les Suisses n'avançaient guère sur le sujet et achetaient la plupart du temps en Angleterre, leurs ressorts et spiraux.
La Société Neuchâteloise d'émulation patriotique organisa en 1820 un concours de précision de chronomètres et il s'avèra que l'ensemble des spiraux étaient d'origine étrangère ce qui fit prendre conscience de la dépendance de la Suisse à l'égard des Anglais.
Il fallut attendre le 4 juillet 1836 pour trouver dans un concours des montres contenant des spiraux Neuchâtelois. Les experts de l'époque Jules Jürgensen et Frédéric Louis Fabre Bulle constatérent alors la supériorité des spiraux Suisses qui avaient l'avantage sur les pièces de fabrication Anglaise d'être incassables. Ils testèrent ainsi les spiraux en les pliant et en les tordant et attribuèrent le prix de la Société à Olivier Quartier du Locle.
Débute alors une course à la précision qui va passer par le spiral et par le balancier des montres. La difficulté sera de donner sa courbe au spiral, de le rendre sphérique et d'éviter les effets de la mémoire de forme qui limite dans le temps la qualité des spiraux.
C'est Jean-Frédéric Houriet qui fabrique au milieu du 19ème siècle les premiers spiraux sphériques qui seront intégrés dans des chronos de marine. Toutefois, le travail ne le satisfait pas et il ne diffuse pas son invention. C'est un Français, l'ingénieur Edouard Philipps qui recherche une solution mathématique aux problèmes d'isochronisme ( c'est à dire à la régularité des oscillations) . Reprenant les calculs de courbes faits par Arnold en 1782, il formule un calcul des courbes à respecter pour les spiraux. Jusque là, tous les matériaux furent utilisés pour fabriquer des spiraux : Fers, cuivre, acier et même du verre. Pour soustraire ses spiraux à l'effet du magnétisme, Houriet avait même utilisé de l'or pour les fabriquer.
L'acier trempé sera rapidement détecté comme le meilleur des compromis. La société des Fabriques de Spiraux réunis a recours au milieu du 19ème à l'acier, puis au palladium et à l'Elinvar dès 1904.
L'acier présente en effet, l'inconvénient d'une sensibilité à la température et les observatoires , en particulier ceux de Genève et de Neuchâtel multiplient les tests à 5 températures ce qui ne laisse aucune place à un chronomètre approximatif.
Charles Auguste Paillard, s'intéresse dès 1860 à cette problèmatique et découvre les propriétés du palladium à la fois inoxydable et moins sensible à l'effet secondaire de la température. Il présente en 1878 un alliage de palladium que les chronomètriers vont rapidement adopter.
Les résultats semblent en effet révolutionnaires par la précision obtenue lors des épreuves des observatoires. A Genève, 2 chronomètriers se passionnent pour ce matériaux, H-R Ekegrèn et Alexis Favre implantent les premiers spiraux en palladium dans leurs chronomètres.
Au Locle, Paul David Nardin fait des essais et diverge de ses confrères Genevois quant aux réultats . Les mesures sont peu concluantes et ne mettent pas en avant un résultat meilleur que l'acier trempé. Un concours lancé par l'Obseravtoire naval des Etats Unis en 1902 opposera 16 chronomètres de marine à spiral palladium contre 11 pièces en acier trempé. Le palladium déçoit au vu des résultats qui coroboreront l'analyse de Nardin.
Cependant, le matériau de Paillard va emporter l'adhésion générale et ses spiraux seront intégrés dans la quasi totalité des chronomètres de bord et de marine. On est en 1879 et le soucis dominant est bien l'oxydation due à l'air marin humide et salé et aux pays chauds dans les mers desquels les bateaux se déplacent. Le palladium est léger, indéformable, inoxydable, amagnétique, il semble promis à un avenir certain.
Ce spiral est associé à un balancier bimétallique compensé qui allie acier et laiton. On aurait pu en rester là, si le Docteur Charles Edouard Guillaume n'avait fait des recherches sur un balancier dit Acier Nickel Invar qui allait à nouveau faire avancer la chronomètrie dans le sens de la précision ultime.
Balancier bimetallique coupé Au tournant du 20ème siècle, il n'est plus que les horlogers avides d'amagnétisme et d'inoxydabilité pour défendre encore le palladium. Les résultats mitigés de Washington ont cloué la planète horlogère qui sait que le produit aura peu d'avenir.
Les chronomètriers vont partir à ce moment à la recherche d'autres matériaux et se tourner vers l'invention du Docteur Guillaume qui fait porter sa recherche sur le balancier et plus accessoirement sur le spiral. Le recours classique à un balancier bimétallique coupé en 2 points associant un anneau de deux métaux inégalement dilatables acier à l'intérieur et laiton à l'extérieur permet de réduire les effets de températures et de dilatation qui en découlent. Les métaux s'allongent en effet à la chaleur et raccourcissent au froid.
Chronographe ZENITH de 1915 avec un des premiers balanciers monométalique non coupé( 12 exemplaires) La science horlogère à en ce domaine besoin de progresser et dès le 15 décembre 1883, un concours de compensation est lancé par l'observatoire de Genève. Objectif : La précision ultime à toutes les températures. En introduisant au début du 20ème siécle l'Invar et l'Elinvar dans les alliages des balanciers, le Dr Guillaume fait franchir un pas décisif à la précision. Paul Peret poursuivant les études de Guillaume en 1901 débouche en 1905 sur la production d'un Spiral en invar couplé à un balancier Guillaume. Quelques manufactures testent scientifiquement cette invention sur de très petites séries . Longines, ZENITH, Omega, Tavannes , Moeri produisent ainsi quelques chronomètres.
Peret sur les spiraux, Guillaume sur les balanciers entrent vite en concurrence au regard des intérêts commerciaux de leurs inventions. Le spiral "compensé" en invar réduit en 1897 à 1/20 ème de seconde la variation due à la température. L'invar va permettre de renoncer aux balanciers coupés et bimetalliques . Pour une une grande fabrique cela correspond à une économie annuelle de 100 000 francs suisses à un moment où la concurrence fait rage avec l'industrie Américaine dont les montres sont meilleur marché que celles fabriquées en Suisse. Il faudra attendre le début du 21ème siécle pour une nouvelle révolution des matériaux avec le silicium.
Le progrès à la fin du 19ème siécle est fondamental et il restera à généraliser l'échappement à force constante pour emporter les marchés et à généraliser l'échappement à ancre.
Une marque se distingue en matière de chronos de marine. Tandis que presque toutes les manufactures optent pour des échappement à détente pour ce type de pièces, ZENITH retient un échappement à ancre et introduit la première cette technique dans les chronos de marine. Le mouvement implanté sur cardans est en effet à l'abris des variations de position ceci pour garantir sa précision. En effet, si la montre reste à plat, le spiral n'est plus soumis à des inerties variables selon la position qui font qu'entre les goupilles l'ébat est plus ou moins contraint ou libéré.
Par ailleurs, l'échappement reste à plat et la garantie de constance du réglage optimise la précison. Depuis le 18ème siécle, les recherches se sont multipliées pour adapter le principe du chrono de marine à la montre et permettre à ses éléments réglants de garder une position à plat quelle que soit celle de la montre. Il fallait en l'espèce donner une autonomie de mobilité à l'échappement, au balancier et au spiral pour que l'ensemble reste dans une position homogène et optimum, c'est à dire à plat.
La difficulté était de transmettre l'énergie du couple ressort/barillet à cet ensemble sans que les frictions ne réduisent l'amplitude du balancier.
Aucun horloger n'a concrétement abouti dans cette expérience de manière satisfaisante...
Il a fallu attendre 2008 pour qu'un progrès significatif soit fait en ce domaine avec le 0G mis au point en interne par ZENITH. Au plan scientifique, ce calibre est une prouesse tout à fait novatrice...