Le calibre 707
Préambule Travaillé, conçu, imaginé exclusivement pour les concours de précision, ce mouvement ne fut pas destiné à la commercialisation. Il fait partie des pépites de Zenith, une pépite qu'on ne trouve que très rarement… Ici cette pièce termina sa carrière comme montre d'atelier à Besançon sur l'établi d'un horloger. Quand la filiale de Besançon ferma, une partie des outillages regagna Le Locle, les papiers furent en grande partie livrés à la destructions et les mouvements en cours de travail suivirent cette même voie. Le personnel non repris ou transféré au Locle sauva de la poubelle des choses qui n'avaient à l'époque aucun intérêt ni valeur. C'est le temps qui leur a donné un intérêt. Le sujet est très technique mais il recèle une somme d'informations d'un rare intérêt.
GénèseLe calibre 707 est un mouvement d’observatoire. Surnommé « la patate » à cause de sa forme à la fois triangulaire et ovoïde, il fut conçu en 1961/1962 et construit en 1963. Exclusivement destiné aux concours, il ne connut aucune carrière commerciale.
Ce mouvement est le dernier conçu pour la spécificité des concours de l’observatoire par Zenith. Sans nul doute, ce n’est pas sa décoration qui le distingue particulièrement. Il tient son nom de 707 de la catégorie ouverte par le règlement qui limite la participation à des chronomètres de moins de 30 mm de diamètre et/ou à une surface de 707 mm carrés.
La surface exacte du 707 est de 687 mm carrés. Le choix de cette surface de 707 millimètres carrés est la conséquence d’une volonté d’avoir au concours des pièces qui soient ouvertes sur la créativité des fabricants qui y participent.
Aurèle Maire, Directeur technique de ZENITH s’investira avec son équipe dans ce projet d’autant plus qu’il a acquis la conviction que malgré toutes ses qualités, le calibre 135 a atteint pour les concours la limite haute des performances accessibles. Toute l’équipe de régleurs de l’époque composée de René Gygax, Jean-Pierre Vuille, Paul Favre et Jean-Pierre Sunier contribuent à ce projet.
Le mouvement participera aux concours dans la catégorie des chronomètres bracelets de 1963 jusqu’en 1967. Réglage, remontage et mise à l’heure se font par l’arrière au moyen d’une couronne. Le train de rouages (roue des minutes et roue de moyenne) est celui du calibre 17 ¾ lignes, un calibre de poche de 17 lignes et si le balancier est commun avec celui du 135, la ressemblance s’arrête là. En effet, le pont de balancier transversal s’appuie sur trois points dont deux sont situés du même côté et le troisième à l’opposé. D’une construction totalement atypique et asymétrique, le 707 répond au seul souci des chronométriers et se veut avant tout expérimental. Ses caractéristiques sont optimisées pour les compétitions auxquelles on le voue. D’une épaisseur de 5 mm, il reçoit un échappement à ancre, un balancier Guillaume de 13,80 mm x 0,99 mm à 14 vis, un double anti-choc Duofix à l’échappement et au balancier, 21 rubis, un ressort en inox 1.4310 Nivaflex de 460 mm pour une hauteur de 2,10 mm, une épaisseur de 0,16 mm, d’un diamètre enroulé de 15, 50 mm dispose d’une réserve de marche de 36 heures, d’un angle de levée de 52 degrés et sa fréquence est optimisée à 28 800 alternances par heure.
ZENITH teste pour son calibre plusieurs versions dont la fréquence varie en fonction d’une roue intermédiaire dont le nombre de dents est ramené d’abord de 48 à 45, ce qui abaisse le nombre d’alternances par heure à 27 000, puis à 42 dents pour une fréquence réduite à 25 200 alternances. Des essais sont également menés pour pousser la fréquence à 36 000 alternances ou au contraire l’abaisser à 21 600. C’est finalement la version à la fréquence intermédiaire de 28 800 alternances qui est retenue par l’équipe technique qui y voit le meilleur compromis. On peut rétrospectivement s’étonner que ZENITH n’ait pas testé des fréquences plus élevées que des marques comme Longines expérimentaient déjà. Il semble que l’équipe technique de la manufacture n’avait pas encore d’intérêt pour les très hautes fréquences qui pourtant feront son succès en 1969 lors de la présentation du El Primero. Il ne semble pas d’ailleurs que ZENITH se soit livré à des études sur des mouvements évoluant à 36 000 alternances par heure sur d’autres calibres que le 707 antérieurement à la conception de son chronographe mis à part quelques tests sur son 135. Les mouvements Movado qui avaient épousé cette fréquence avaient été conçus totalement en dehors de la manufacture du Locle.
Le dernier mouvement conçu par ZENITH pour les compétitions est donc celui qui évolue à la plus haute fréquence jamais proposée par la marque aux concours de l’observatoire de Neuchâtel.
Le choix du balancier Guillaume bimétallique coupé n’a rien de surprenant. Il est guidé par les exigences de compensation de températures lors des tests et épreuves du concours. La conception du pont de balancier étranglé en son milieu rend les ébats du spiral observables sur la totalité de sa longueur.
Tout ce qui a pu apparaître superflu a été écarté de la conception. En revanche, rien n’a été omis pour améliorer les qualités mécaniques du mouvement. Deux roulements à billes de 18 billes chacun viennent par exemple faciliter le bon fonctionnement du barillet. Les surfaces de frottements ont été réduites au minimum et le plan de lubrification optimisé. Les dents des roues sont effilées, chaque axe est poli, les pierres des palettes d’ancre et l’ensemble des rubis sélectionnés parmi les pierres de la meilleure qualité connue sont également polis soigneusement, bombées et olivés. Le porte piton mobile placé sur la raquette facilite le réglage du spiral sans risque de l’altérer en intervenant sur la virole.
Le mouvement obtient des résultats époustouflants aux concours notamment dans la catégorie des pièces isolées de type bracelets en 1964 où le chronomètre numéro 558 réglé par Pierre Gygax est premier avec une note de 2,62. Un autre chronomètre numéro 521 du même type réglé par Jean-Pierre Vuille se classe la même année, troisième avec une note de 2,78 tandis qu’un autre exemplaire numéroté 527, réglé par Jean-Pierre Sunier est neuvième avec une note de 3,43 et que le dixième chronomètre classé, numéroté 515 est réglé par Jean-Pierre Vuille avec une note de 3,43. Ainsi sur les 10 premiers chronomètres, quatre sont des 707 de ZENITH.
En 1965, René Gygax classe à nouveau au rang de premier un exemplaire numéroté 601 du mouvement avec une note de 5,58 puis de 4,39 l’année suivante en 1966.
La manufacture a construit à peu près de 200 exemplaires de ce calibre, numérotés à partir de 501.Il semble qu’il n’y ait eu que 127 exemplaires présentés aux épreuves des concours entre une et quatre fois. En 1963, 11 calibres 707 sont présentés à côté de 27 calibres 135. En 1964, 38 mouvements 707 sont soumis aux épreuves du concours et de 1965 à 1967, 50 exemplaires sont chaque année portés à l’observatoire de Neuchâtel pour concourir. A partir de 1965 et du numéro 571, les ponts et platines grises de la première série de mouvements reçoivent une dorure.
Il doit être noté que le 261 sera lui aussi présenté dans les derniers concours des années 60. La carrière de ce dernier fut un peu plus longue ...
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