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 Actu: "Il faut revaloriser les métiers du luxe"

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ZEN
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ZEN


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MessageSujet: Actu: "Il faut revaloriser les métiers du luxe"   Actu: "Il faut revaloriser les métiers du luxe" EmptyMer 20 Fév - 19:12

Citation :
Danielle Allérès : "Il faut revaloriser les métiers du luxe"
LEMONDE.FR

Entretien avec Danielle Allérès, économiste à la Sorbonne, spécialiste des métiers du luxe de la mode et de l'art, responsable du centre de recherche luxe-mode-art et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet.


Quel est l'objet de la mission "luxe" que vient de vous confier Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi ?


Danielle Allérès : A travers cette mission, ma volonté est de mettre en valeur les métiers du luxe pour de nombreuses raisons. D'abord, la France est leader du marché, avec 44 % du marché mondial. Notre pays est également l'inventeur du luxe. Ensuite, on parle d'un secteur où les métiers sont trois fois plus exportateurs que l'ensemble des activités françaises réunies. Ces métiers sont également très fortement porteurs d'image, de la "french touch", ils jouissent d'une grande notoriété. En bref, ce sont des métiers qui atteignent une véritable "complétude". Ils représentent environ 5 % de la richesse nationale.

La France parvient-elle à conserver cette hégémonie historique dans un monde où la concurrence est forte ?

Si l'on considère que le luxe concerne peu ou proue une trentaine de secteurs, la France est sept fois leader mondial, notamment dans les secteurs les plus prospères comme la mode, les plus rentables comme la cosmétique et parfumerie, les plus porteurs d'image et de notoriété comme la mode ou encore la maroquinerie. Ce sont ces sept secteurs qui sont représentés par le comité Colbert [une association loi 1901 fondée en 1954 à l'initiative de Jean-Jacques Guerlain qui rassemble aujourd'hui 70 maisons de luxe].

Pourquoi avec un tel potentiel, aucun gouvernement ne s'était penché sérieusement sur la question ?

Le luxe a culturellement une connotation négative. Il est associé au superficiel, aux paillettes. Mais cet oubli montre aussi le mépris indéniable et généralisé pour un certain nombre de métiers, artisanaux, manuels. Or, non seulement ces métiers n'ont rien de méprisable mais le secteur offre une panoplie de métiers très large : artistiques et artisanaux, bien sûr, mais aussi des emplois de services et tout ce qui est en aval (communication, événementiel, publicité).

C'est également un secteur où on emploie des jeunes et des femmes. Le résultat de ces présupposés est malheureusement limpide quand on regarde l'état de la chaussure française. Les cuirs sont désormais tannés en Italie et bon nombre d'usines françaises ont fermé. Pareil pour le mobilier haut de gamme, on exporte les bois en Italie. C'est donc là-bas que se fait la valeur ajoutée.

Comment a-t-on laissé fuir tous ces métiers ?

C'est essentiellement par manque d'organisation, de contrôle et de manque d'intérêt pour tout ce qui touche la fabrication et la distribution. En France on n'aime que la création, à qui l'on veut bien accorder des lettres de noblesse.

Quelles entreprises peuvent servir d'exemple ?

Sans hésiter, Hermès. C'est une société qui a intégré tout le processus de fabrication et s'efforce de fabriquer en France. Chanel est également un bon exemple : la maison a intégré ses sous-traitants [elle a notamment racheté le plumassier Lemarié et le brodeur Lesage]. Ce qui fait que ce sont de belles maisons de luxe, c'est d'abord le contrôle extrême de la qualité et l'attention portée à la distribution, plus précieuse. Ce n'est pas le produit qui fait la différence mais le fait d'être produit par une marque.

Vous avez été la première avoir soutenu une thèse d'Etat sur l'économie du luxe, à la fin des années 1980. Elle portait plus particulièrement sur le marché cosmétique et parfum, qu'est-ce qui a changé en vingt ans ?

Quelques chiffres : entre les années 1970 et 1990, on est passé de 500 à 200 entreprises de parfum et cosmétique. Depuis les années 1980, ce mouvement concerne tout le secteur du luxe, les entreprises se concentrent, les grands groupes tiennent de plus en plus le marché. Pour qu'il puisse s'agrandir ou même survivre, un jeune créateur a besoin de capitaux. Franck Sorbier [couturier] peut continuer ses collections grâce au soutien de Cartier. Christian Lacroix avant d'être revendu à des Américains [le groupe Falic] avait fondé sa maison grâce à LVMH en 1987.

Ces capitalisations mettent-elles justement en péril l'identité du créateur ?

LVMH tout comme PPR ont toujours respecté la liberté des créateurs. Je pense notamment à Tom Ford chez Gucci (groupe PPR) ou encore Galliano chez Dior (groupe LVMH). Entre elles les marques n'ont rien à voir : Céline [autre marque de prêt-à-porter LVMH] et Vuitton ne véhiculent pas du tout la même image.

Dans quels pays le luxe français devrait-il s'implanter prioritairement ?

Il faudrait mieux s'implanter en Chine même si nous avons déjà bien commencé à le faire. Mais il faudrait cibler davantage les produits, créer plus de magasins. En Inde, aller plus vite mais c'est un marché très difficile essentiellement pour des raisons de différences culturelles. Au Brésil, au Mexique, nous ne sommes pas assez présents non plus et l'Afrique du Sud est totalement mise de côté alors qu'il y a un fort potentiel.

Comment voyez-vous l'avenir ?

J'aimerais que l'on puisse fédérer ces métiers : les organismes existants s'entendent mal entre eux. Il faudrait leur donner un esprit de corps, les "booster". Il faut revaloriser ces métiers. Dans mes priorités, il y a bien sûr celle d'aider les jeunes créateurs. Il faudra pour cela mettre d'abord à plat tous les besoins, toutes les aides, chercher les talents et les pousser. Je vais m'efforcer d'atteindre au plus près ces objectifs avec les chercheurs, les spécialistes et les intellectuels qui vont m'entourer. Nous allons montrer que "luxe" n'est pas un gros mot, qu'il signifie esthétique et qualité.


http://www.lemonde.fr/economie/article/2008/02/20/danielle-alleres-il-faut-revaloriser-les-metiers-du-luxe_1013469_3234.html

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