Billet & Interview de Romain Marietta : Le retour étoilé de ZENITH sur FAM ?

Un après-midi, près du Parc Monceau, j’allais à un rendez-vous pour revoir un ami. J’avais le pas rapide, même si le temps était au beau fixe, je ne m’attardais pas dans les allées du parc. J’avais hâte de revoir mon ami car j’avais quelque chose à lui montrer. J’avais reçu un colis depuis peu et j’étais sincèrement heureux de partager auprès d’un connaisseur ma dernière acquisition. J’avais rendez-vous avec un écrivain qui aimait raconter les petits morceaux de vie à travers les garde-temps qui ont traversé les âges. Jeune lecteur de FAM, j’avais été fasciné par ses récits dans laquelle la montre se trouvait toujours en filigrane, comme un observateur constant des époques et de nos vies. Je pense que vous avez reconnu la personne avec laquelle j’avais rendez-vous : c’était ZEN, le fondateur de FAM, et j’avais une Zenith Defy au poignet, celle de 1969.

Il portait ce jour-là le même modèle mais avec le cadran rouge. C’était il y a quelques petites années. Lui-même m’avait donné des conseils pour acquérir la mienne. Je me souviens encore : je l’avais commandée auprès d’un particulier italien, elle avait pris plus d’un mois pour parvenir à mon domicile. L’attente m’a semblé éternelle mais le jour où je l’ai reçue, j’ai été conquis par ce FAMeux modèle. Pour moi, elle avait un look unique. C’était une montre qui a été précurseur à son époque et, si dans les publicités elle avait le surnom de « coffre-fort », aujourd’hui encore je préfère le surnom de « boulon » donné par les passionnés. Une montre qui était vraiment solide et qui était en avance sur son temps avec son mouvement encagé et bénéficiant d’un amorti qui en aurait fait la G-Shock de son époque mais, à mon sens, elle était bien plus belle.

ZEN écrivit à son sujet :

« Plusieurs apports technologiques qui fondent la différence avec un modèle classique justifient le nom de baptême de cette collection dans les années 60. D’abord, le choix du calibre automatique 2562 PC produit dans l'unité ZENITH de Martel Watch qui préserve le joint d’étanchéité de couronne par rapport au mode manuel de remontage du mouvement. L’efficacité du remontage est améliorée par l’introduction de deux roulements à billes.

Par ailleurs, le verre est fixé par un écrou de blocage combiné à la lunette qui permet de changer le verre sans déboîter le mouvement et l’étanchéité est garantie par un joint spécifique de grande dimension. Ultime astuce, la lunette et le fond sont dévissables avec la même clé. Cette caractéristique fera prendre au modèle le surnom de « DEFY Boulon ». La publicité de l’époque la présente positionnée sur un gant de boxe. »

C’était il y a quelques années, je n’imaginais pas alors qu’il allait nous quitter quelques temps plus tard.  Le 22 janvier 2021, son aiguille s’arrêta un vendredi matin. C’était bien trop tôt.

Comment reparler de ZENITH sur FAM ? Comment discuter de l’actualité de la marque sans penser à ZEN ? L’histoire de ZENITH et de ZEN sont étroitement imbriquées. C’est ZEN qui m’a donné envie de lire et de collectionner les montres ZENITH. C’est lui qui m’a fait vibrer à travers ses récits sur la marque. C’est lui qui m’a guidé pas à pas depuis qu’il m’avait envoyé un message personnel pour m’inviter pour intégrer son équipe. Et c’est précisément pour toutes ces raisons que je voulais lui rendre un hommage, à lui et à sa marque de cœur. Oui, il fallait reparler de ZENITH car parler de ZENITH c’est je pense aussi faire revivre cette belle période pendant laquelle il était encore près de nous.

Pour reparler de ZENITH, le format qui m’a semblé le plus adapté n’était pas une revue ou une analyse mais une grande interview. ZENITH aura bientôt 160 ans d’existence aussi il me semble nécessaire de repartir à la découverte de la marque, pour peut-être discerner son futur, pour prendre le pouls de son actualité, regarder ses dernières sorties et ainsi peut-être nous aurons l’occasion de redécouvrir tout ce qui fait le charme de la marque étoilée. J’ai alors décidé de contacter Romain Marietta, le Chief Products Officer, celui qui est derrière toutes les dernières montres de ZENITH et celui qui fait revivre certaines de ses plus FAMeuses références.

C’était aussi l’occasion de faire un « cadeau » pour notre grande communauté horlogère, j’ai voulu prendre le temps d’aller jusqu’en Suisse, au siège de ZENITH, au Locle plus exactement, et évidemment tout cela sans aucune contrainte, dans la plus parfaite liberté, sans la moindre contrepartie. Je n’oublie pas mes débuts auprès de la communauté, je n’oublie pas mes origines, je n’oublierai jamais ZEN, sa mémoire et l’impact qu’il a eu auprès de nous.  

Aussi, je souhaite à vous tous de profiter de cet échange dans lequel Romain Marietta et moi-même n’avons posé aucune limite à nos échanges, avec toute notre sincérité pour (re)découvrir ZENITH, son passé, son présent et peut-être aussi son avenir.

Bonne lecture à tous.

RM : Bonjour à FAM, alors j’ai rejoint en 2006 la marque ZENITH et aujourd’hui j’en suis le directeur Produits et Héritage. Je suis Suisse, marié et père de deux enfants.

RM : Je participe à l’élaboration de la stratégie et de la vision future de ZENITH tout en permettant de créer des passerelles et des ponts avec l’héritage fantastique de la marque. L’année prochaine, ZENITH aura 160 ans. Mon rôle en définitive est de faire le lien entre le passé, le présent et le futur de la marque.

RM : J’ai commencé en tant que Product Manager sur une ligne de produits puis sur plusieurs. C’était sous Thierry Nataf, puis j’ai été pratiquement le seul rescapé du marketing quand Jean-Frédéric Dufour est arrivé [Note de Don : devenu depuis le président de ROLEX]. J’ai réellement commencé à participer au développement produit en tant que tel sans pour autant avoir un passé d’ingénieur, j’avais commencé dans la fonction marketing mais je me suis intéressé très tôt au développement du produit en lui-même. J’ai appris tout sur le tas chez ZENITH mais il faut avouer que j’étais à bonne école, mon père était ainsi dans une entreprise de cadrans, aussi l’horlogerie restait toujours dans mes veines depuis mes débuts. Pour autant, avant je ne me destinais pas au métier de l’horlogerie, c’est par la suite que j’ai développé la passion de l’horlogerie et le goût pour les belles montres.

RM : ZENITH est une marque qui a une forte implantation locale en Suisse aussi il n’est pas rare d’avoir des membres de la famille ou des proches qui ont travaillé pour la marque étoilée. Mon propre père faisait ainsi des cadrans pour le compte de ZENITH dans une entreprise qui les fournissait. De mon côté, ce qui m’avait attiré à l’époque, c’était la flamboyance de Thierry Nataf, je trouvais qu’il y avait du dynamisme dans la marque qui osait d’autres designs et l’organisation d’événements dans le but d’attirer l’attention sur la marque. Je voulais intégrer plutôt la communication mais c’est au final par le produit que j’ai réellement fait mes armes chez ZENITH. Mon expérience produit m’a conduit à interagir avec tout ce qui était en rapport avec les composants d’une montre. Auparavant, je connaissais un peu les cadrans du fait de ma famille mais c’est chez ZENITH que je me suis mis à m’intéresser à tout ce qui fait une belle montre. J’ai vraiment fait toute ma carrière chez ZENITH, j’avais commencé comme stagiaire et aujourd’hui je fais partie du comité de direction de la marque. J’ai conscience que ZENITH n’est pas encore reconnue à sa juste valeur alors qu’elle a une histoire fantastique, elle a eu une influence très importante dans le développement de l’industrie horlogère. L’histoire de Georges Favre-Jacot [Note de Don : le fondateur originel de la marque qui prit d’ailleurs le nom de ZENITH par la suite sous son égide] ou Charles Vermot [l’horloger qui a pris l’initiative de cacher les plans et les outils nécessaires du mouvement El Primero dans une partie cachée du grenier de la manufacture pour le préserver de la mise au rebus décidée à l’époque qui semblait mettre fin aux mouvements mécaniques] sont sensationnelles. C’est vraiment l’histoire de ZENITH qui m’anime aujourd’hui et aussi sa taille humaine que j’aime.

RM : Oui, je confirme qu’on observe un vrai retour de la couleur dans les cadrans pour revenir vers davantage de fun dans les montres. Par rapport à un cadran noir classique, un cadran de couleur permet d’apporter plus de gaité à une montre quelle que soit la saison. ZENITH a été parmi les précurseurs dans le recours à la couleur dans les cadrans comme justement dans les Defy avec ces dégradés de couleurs.  Le cadran historique d’El Primero avec les sous compteurs de couleur, c’était ZENITH qui l’avait apporté à l’époque.

La part Héritage de la marque est immense aussi c’est pour ça que nous faisons un certain nombre de rééditions. Rendez-vous compte : nous sommes la seule marque qui continue à fabriquer le même mouvement de manufacture depuis 55 ans, cela démontre l’excellence de sa conception.

RM : C’est notre but. Les efforts ont commencé avant l’arrivée de Julien Tornare puis ils se sont accentués après son arrivée. Zenith ne pouvait pas se contenter de séduire son public traditionnel : un public de connaisseurs qui aiment les belles montres mécaniques, qui savent apprécier les qualités du El Primero par exemple. Nous sommes fiers de plaire à un public éclectique mais pour une marque cela n’est pas suffisant pour la redévelopper. Pour grandir, ZENITH devait conquérir davantage de poignets. Jean-Claude Biver l’avait compris lors de son passage chez ZENITH, il fallait proposer aussi d’autres modèles pour attirer l’attention sur la marque et retrouver davantage de notoriété auprès d’un public plus large. Cela n’avait pas été bien compris à l’époque car sous Jean-Claude Biver, certains trouvaient que nos modèles pouvaient être comparés à Hublot par exemple. Aussi, nous avons voulu revenir vers ce qui faisait le succès de ZENITH. Nous avons réétudié notre propre passé et nous avons voulu faire certaines rééditions, nos « revivals » pour faire honneur au passé de la marque mais aussi en les modernisant comme la ZENITH A384 ou A386.  

Pour cela, nous avions lancé un programme pour reprendre des pièces historiques, ZENITH Icons, pour que nous puissions aussi satisfaire les demandes de nos clients qui voulaient des pièces historiques de ZENITH certifiées et que nous n’avions plus en stock. Comme tu l’as dit, il y a eu un impact sur l’évolution du CA qui s’est développé à la suite de ces efforts. Il y a eu aussi un travail de recentrage. Quand j’étais arrivé chez ZENITH, il y avait 15 lignes de produits et 800 références. Aujourd’hui, il y a 4 lignes de produits et on est à 120 références. On a écrémé mais on a aussi voulu renouer avec des esthétiques historiques chez ZENITH et être le plus « vrai » par rapport à l’héritage de la marque. Aujourd’hui, ZENITH avance dans une ligne claire, nous n’allons plus dans une direction puis dans une autre, nous avons fait ce travail de clarification. Benoit de Clerck, le nouveau président de ZENITH, a pris la suite de Julien Tornare mais le but n’est pas de changer à nouveau radicalement de stratégie. Comme tu l’as dit, notre ligne directrice est plus cohérente et c’est ce qu’on veut perpétuer. Cohérence et profondeur. Dans la collection Chronomaster par exemple nous voulons en faire une ode au El Primero, la collection Defy c’est perpétuer la tradition des montres robustes avec des designs forts, la collection Pilot – il faut savoir que nous sommes les seuls à pouvoir utiliser le nom Pilot pour une collection de montres depuis 120 ans – c’est la tradition des montres pour l’aviation et enfin la collection Elite c’est une collection classique et qui [Note de Don : attention teaser pour FAM] qui va renouer avec un passé encore plus glorieux l’année prochaine. On va voir arriver chez ZENITH pour 2025 des modèles très forts et que Joël Duval tenait à cœur avec notamment le calibre 135.

RM : Nous voulons nous attarder à raconter des histoires vraies sur ZENITH. Nous avons un grand livre sur l’histoire de la marque [Note de Don : Zenith : La saga d'une manufacture horlogère étoilée par Joël Duval] et nous n’hésitons pas à nous en servir pour faire redécouvrir nos modèles mais aussi pour travailler notre futur.

RM : C’est le fruit de nos discussions entre Julien Tornare, le directeur de la création et moi-même. Il est difficile d’attribuer la paternité de ce retour à une seule personne. 1969, ce n’était pas seulement l’année du El Primero, c’était aussi celui de la Defy. De même pour la Chronomaster Sport, c’était un modèle que je souhaitais faire pendant des années et quand j’ai rencontré Sébastien Gobert, il y a eu un « fit » entre nous et il a réussi à matérialiser ce que j’avais en tête pour la Chronomaster Sport.

Pour revenir avec la Defy, c’était effectivement l’une des premières montres octogonales et étanches, plusieurs années avant Gérald Genta et l’arrivée de la Royal Oak. Je pense que la Defy n’a pas eu le même destin que la Royal Oak [Note de Don : la RO n’a également pas connu un succès immédiat] parce qu’il y a eu beaucoup de changements chez Zenith dans les années 70 et aussi des atermoiements dans la marque, il faut bien le reconnaître. Zenith a appartenu tour à tour à des suisses, à des américains puis au grand groupe français LVMH. Zenith a été beaucoup connu pour ses mouvements aussi il fallait faire redécouvrir les modèles de la marque et qui ne déméritaient pas.

RM : Oui, c’est vrai. Chez ZENITH, nous manquions d’un véritable modèle célèbre que tu associerais dans ton esprit à la marque. Toutes les marques qui se sont développées et ont connu le succès avaient des modèles qui venaient immédiatement à l’esprit. C’est aussi pour cela que nous voulions faire la Chronomaster Sport, pour que les gens fassent cette association d’idées. Peut-être qu’avant, les gens avaient d’abord en tête le modèle Open qui était une idée brillante réalisée sous Thierry Nataf en 2003, pour montrer le cœur battant de la montre avec ses 36000 alternances par heure. Ce modèle existe toujours 20 ans après dans nos références. Mais il fallait renouer davantage avec notre passé glorieux. Aujourd’hui, notre Chronomaster Sport est notre bestseller.

RM : C’est un modèle qui nous vient directement de notre passé, présente dans le catalogue de cette époque. C’est un modèle très intéressant et je tiens à dire qu’il est passionnant de partir à la (re) découverte de nos anciens modèles. Cela nous a ouvert tout un champ des possibles pour faire des plongeuses. Il a été logique pour nous de vouloir faire le revival de la Defy Plongeur A3648 pour être bien plus présent dans le segment des divers tout en ayant de vraies histoires à raconter à leur sujet. Elle a cette bonne gueule spécifique, avec cette forme octogonale, avec la sous lunette qui tourne avec ces touches d’orange et la couronne à 4h30.

RM : Tout à fait, la couronne à 4h30 a annoncé un positionnement de couronne qui s’est répandu surtout dans les années 70. La Defy Plongeur a un côté vintage et nous avons réussi à en faire une version moderne. Il était temps pour nous de revenir dans le domaine des Divers et évidemment nous espérons qu’elle trouvera un écho favorable auprès du public, pour partager aussi ce morceau d’histoire de notre passé. Même si le contexte d’aujourd’hui n’est pas aussi porteur de manière générale pour le secteur des montres, c’est une partie de notre histoire que nous voulions repartager avec les passionnés et les amateurs de montres.

RM : C’est précisément là que nous avons fait évoluer le nouveau modèle par rapport à l’ancien : les techniques ont évolué depuis. Aujourd’hui, il y a des cercles d’emboitage qui permettent d’absorber suffisamment les chocs, les échappements ont également évolué, les normes de fabrication aussi. Ainsi, la fiabilité et l’étanchéité sont assurées par ces progrès. Il faut reconnaître ce que ZENITH a été capable de faire à l’époque pour produire des montres ultra-résistantes et étanches à 600 mètres. De même, nous avons préféré un fond apparent aujourd’hui par rapport au fond plein de l’époque et tout en conservant l’étanchéité de 600 mètres, auparavant ce n’était pas une option, aujourd’hui ça l’est. Nous avons tiré parti aussi que le calibre Elite d’aujourd’hui a les mêmes proportions que le calibre de l’époque : le 2552. Le calibre Elite a été créé dans une suite logique par rapport aux anciens mouvements du ZENITH des années 60 et c’est un avantage aujourd’hui car on peut faire des montres aux mêmes proportions qu’à l’époque, épaisseur et diamètre.

RM : Exactement. Nous avons la chance de manufacturer nos propres calibres qui sont déjà proportionnés pour faire des revivals fidèles aux modèles d’époque et nous sommes l’un des très rares à pouvoir le faire avec des calibres modernes. La Defy d’époque que tu portes aujourd’hui [Note de Don : mon modèle vintage personnel] et le nouveau modèle que nous avons fait ont exactement les mêmes proportions au dixième de mm près que celles de l’époque.

RM : Nous faisons du rétro-engineering en mesurant par laser les pièces d’origine et nous recréons les boitiers ainsi fidèlement.  

RM : On a les archives ! On peut s’appuyer là-dessus aussi mais rien ne remplacera de prendre une pièce physique qui même si elle a subi les assauts du temps nous permet d’être très précis dans le respect de notre passé.

RM : Notre positionnement est celui d’une manufacture qui produit ses propres mouvements que nous développons, fabriquons et assemblons nous-mêmes. Nous pourrions dire que dans les manufactures suisses nous sommes en quelque sorte dans « l’entrée de gamme » de ce monde des manufactures prestigieuses. C’est en fait un petit monde, mine de rien, relativement peu de marques ont la capacité de produire leurs propres mouvements. Il faut bien être conscient que certaines marques qui se disent de manufacture ne le sont pas parce qu’elles disposent d’un motoriste groupe qui permet de centraliser le développement et la fabrication des mouvements puis de les distribuer aux marques de son portefeuille. Les gens ont souvent tendance à faire des comparaisons de prix mais la réalité c’est que nous sommes peu à faire nos propres mouvements sans passer par une structure commune à plusieurs marques. Zenith fabrique entre 15 et 25 mille montres par an, on ne peut pas se comparer avec Omega qui vend des millions de montres ou même IWC qui fait 200,000 montres.

RM : Ce n’est pas vraiment notre but. Notre crédo c’est d’être une vraie manufacture, nous ne fabriquerons pas 200,000 montres, notre but n’est pas de produire les mêmes quantités que dans les années 60. Nous voulons assurer une certaine qualité et même si on pourrait accueillir le personnel et les outils pour le faire, ce n’est pas notre ambition. Nous voulons garder des produits plus rares. Oui, nous voulons conquérir de nouveaux poignets mais pas dans des proportions qui nous feraient sortir de notre direction actuelle. Passer de 20,000 montres à 200,000 montres n’est pas notre objectif actuellement.

RM : ZENITH était l’une des premières manufactures dans l’histoire à avoir intégré verticalement sa production. Aujourd’hui, celui qui a presque tout intégré dans sa fabrication, c’est ROLEX. Mais il ne faut pas oublier que même ROLEX n’a pas été capable de le faire sans recourir à des acquisitions pour intégrer par la suite ces compétences.

RM : Une manufacture qui intégrerait absolument tout, de la matière première au produit final, cela n’existe pas. Il y a toujours quelque chose qui échappe à une intégration verticale même très poussée. Nous, nous achetons aussi des composants à des fournisseurs : les bracelets, les cadrans, les boucles… Nous faisons en sorte d’acheter ces composants en Suisse. Notre cadranier, par exemple, est un cadranier groupe. Nos boites sont faites en Suisse, nos cadrans aussi, nos mouvements sont fabriqués par nous-mêmes en Suisse, c’est déjà pas mal ! Pour la suissitude, je pourrais vous dire que c’est à plus de 80%, facilement avec tous les composants les plus importants sourcés en Suisse.

RM : Par rapport à la taille que nous avons, c’est vrai que nous sommes très actifs en production. En tant que manufacture authentique, c’est notre devoir aussi d’être actif. Dans le pipe des revivals, il y a une belle liste de modèles que nous voulons faire parce que ce sont de beaux modèles qu’on rêve de faire à nouveau apparaître. Il y a aussi de nouveaux développements de mouvements, cela va venir mais il faut que le contexte nous le permette de le faire aussi. Il y a plein d’autres pièces que j’aimerais faire paraître. Nous avons ouvert un nouveau champ avec le revival de la Defy. Il y a de nouvelles plongeuses qui sont en préparation et j’aimerais beaucoup refaire la S58 par exemple.

RM : Oui, effectivement, elle est difficile à trouver. Mais toutes nos idées de relance ou de création de nouveaux modèles doivent aussi s’inscrire dans la cohérence de nos collections actuelles. Peut-être nous ferons quelque chose dans ce sens pour regrouper nos revivals dans une collection spécifique.

RM : Peut-être cela se fera dans le futur. Il y a dans tous les cas beaucoup d’effervescence chez ZENITH actuellement.

RM : C’est toujours la prochaine qui paraîtra.

RM : (Rires) Il y a le projet sur lequel on travaille depuis plusieurs années pour célébrer l’année prochaine les 160 ans de la marque, c’est ce qui me tient à cœur actuellement pour revenir vers la gloire passée de ZENITH mais je ne peux pas en dire plus pour le moment. Nous sommes la marque qui avons été la plus récompensée en chronométrie, c’est l’une des choses que Joël adorait dans la marque. Il en avait d’ailleurs beaucoup parlé sur FAM. J’espère que de là-haut il nous regardera avec un grand sourire en se disant « Enfin vous l’avez fait, bravo ». Sinon, pour moi, une pièce importante c’est la Chronomaster Sport, cette pièce a sa légitimité et son histoire propre, elle est la somme de 5 décennies du calibre El Primero et j’en suis très fier. J’aimerais que dans des dizaines d’années, quand ça sera à mon tour d’être en retraite, j’aimerais voir avec fierté ce qui a été accompli et les pièces que nous avons pu léguer. Cela me ferait très plaisir. Déjà avec la Chronomaster Sport ou la Skyline qui sont des pièces qui ont été très bien accueillies par la clientèle, je suis heureux du résultat.

RM : Il faut d’abord remercier LVMH, cela fait 25 ans que ZENITH fait partie de LVMH, le groupe nous a donné tout son soutien. ZENITH est la manufacture historique au sein de LVMH, apportant une caution horlogère. Les ambitions de LVMH sont fortes et plus encore depuis l’arrivée de Frédéric Arnault à la tête des marques horlogères du groupe. L’importance de cette division est encore plus mise en exergue, la division montres chez LVMH est la seconde en termes d’importance. Il y a un très beau portefeuille de marques horlogères chez LVMH. Evidemment que la marque étoilée rend des comptes mais nous bénéficions d’une grande indépendance chez ZENITH pour mener à bien nos projets. Il y a des synergies liées à l’appartenance à LVMH qui sont bénéfiques pour la marque ZENITH, notamment pour les regroupements d’achats ou la sous-traitance de certains aspects. Quand on sait ce qui se passe dans les autres groupes, avec les différents niveaux de validation qu’il faut passer pour faire avancer quoi que ce soit, nous nous estimons heureux au sein de LVMH. Ici, nous avons un supplément de réactivité car les décisions sont prises dans un comité chez ZENITH même. C’est une chance énorme pour la marque.

RM : C’est vrai, le contexte n’est pas porteur cette année. Les crises dans l’horlogerie sont cycliques et ces crises sont de plus en plus rapprochées. Généralement, on sait que cela va repartir à un moment donné. 2022 était une année exceptionnelle, on savait que cela n’allait pas durer à partir de la seconde moitié de 2023. L’année 2023 était en demi-teinte, 2025 ne sera probablement pas non plus dans l’euphorie. Et justement, il faut arrêter de tomber dans l’euphorie dans l’horlogerie à chaque fois que les affaires reprennent. Il faut davantage de prudence dans ce que l’on fait pour éviter des niveaux de stocks difficiles à gérer par la suite et encore plus en période difficile. On se focalise sur certaines nouveautés mais sans non plus en faire à profusion. Il faudra peut-être dans le futur encore restreindre le nombre de références par rapport aux 120 actuelles, c’est ce qu’on fait déjà depuis 10 ans. Pour le moment, on essaie d’identifier les meilleurs choix possibles et rationaliser. Beaucoup de marques attendent que la Chine se réveille.

RM : Alors je dirais que cela ne tient qu’à toi ! Honnêtement, cela serait avec plaisir. On avait perdu ce lien à la suite de la disparition de Joël Duval et il faut aussi le remercier pour tout ce qu’il avait fait par amour pour la marque. On a eu la chance qu’il a créé FAM et qu’il a beaucoup communiqué sa passion pour ZENITH. On pourra faire des confidences. Nous sommes ouverts à répondre aux questions et à écouter ce qui se dit sur FAM. La porte est ouverte dans tous les cas. Je pourrai par exemple aussi revenir sur le forum pour des sessions pour discuter avec les membres. On écoute beaucoup ce qui se dit en commentaires sur nos modèles et nos accessoires. Il y a un temps industriel pour mettre en application ce que nous souhaitons faire pour améliorer nos produits et intégrer les bonnes idées.

RM : L’expérience client peut faire toute la différence pour une marque. ZENITH a été très ouvert pour accueillir les clients et les passionnés au sein de ses locaux au Locle, nous avons des jours dédiés pour organiser des visites dans la manufacture. Vous pouvez rentrer dans les ateliers et discuter avec notre personnel. Aujourd’hui, l’omni-canalité est au centre de notre démarche pour que les gens aient une bonne expérience que cela soit online ou en boutique. Notre business model n’est pas fondé sur le fait d’avoir des boutiques en propre, nous en avons mais ce n’est pas le modèle prédominant chez nous. Nous travaillons avec des AD et nous savons bien que les détaillants sont des intermédiaires très importants pour interagir avec nos clients.

RM : Et beaucoup en sont revenus ! Dans un contexte économique difficile, avoir des boutiques en propre, c’est hyper lourd. Les coûts deviennent vite insupportables si vos profits sont en berne.

RM : On est en train de travailler sur des mouvements. Peut-être sur la base de mouvements de notre grand passé mais que nous sommes entrain de retravailler. Nous cherchons aussi à améliorer constamment nos mouvements existants. Avec plus de réserve de marche ou une meilleure cinétique et une précision encore meilleure. On est entrain de travailler sur des complications qui nous manquent actuellement pour assurer le futur de nos collections et les développer. L’année prochaine, une nouvelle étape va s’ouvrir avec le retour d’un excellent mouvement.

RM : Aujourd’hui je porte la Chronomaster Triple Calendrier, honnêtement je change très régulièrement de montres, je porte aussi beaucoup la Chronomaster Sport, la Shadow aussi, j’adore le bracelet échelle inspiré de l’ancien Gay Frères. Toi aussi tu le portes au poignet, c’est un bracelet que j’aime beaucoup. J’aime l’utiliser pour beaucoup de références que je porte.

RM : Il a une gueule et il est très confortable. C’est important de porter soi-même les montres au quotidien pour aussi chercher à les améliorer. On se rend compte de certaines choses qu’on ne voyait pas au départ malgré les tests. Je suis collectionneur aussi, et le week-end je porte d’autres références et même d’autres marques pour voir ce qui se passe.

RM : Je dirais une centaine. Je n’ai pas compté.

RM : Un grand plaisir partagé.

J’espère que vous avez profité de cet humble cadeau fait à la communauté. Et à la prochaine pour d’autres surprises. Peut-être avec ZENITH. Peut-être avec d’autres marques anciennes ou nouvelles.